Une commission d’enquête libre et indépendante se chargera de faire toute la lumière sur les violentes manifestations de mars dernier. Le ministre des Forces armées, qui a donné l’information hier lors d’une conférence de presse, renseigne que cette commission sera ouverte à l’opposition et à la société civile.
On croyait que la page était tournée. Un mois après les violences notées suite à l’arrestation de Ousmane Sonko, le gouvernement a décidé de rompre le silence pour apporter sa part de vérité dans cette série de manifestations ayant entraîné des morts, des blessés et plusieurs dégâts. Face à la presse hier, Me Sidiki Kaba a remis sa toge d’avocat pour défendre le gouvernement qui ne pouvait pas être «tenu pour responsable des conséquences» des émeutes. Mais pour situer les responsabilités, le ministre des Forces armées a annoncé la mise en place d’une commission d’enquête libre et indépendante afin que toute la lumière soit faite sur ces malheureux événements. «Ce sera une commission ouverte. Les membres de l’opposition comme de la société civile pourront y être pour que cette commission puisse travailler en toute indépendance pour situer les responsabilités», avance Sidiki Kaba. Il a botté en touche les accusations selon lesquelles les Forces de défense et de sécurité ont fait un usage excessif de la force. Le ministre des Forces armées soutient que si elles n’avaient pas fait preuve «de sang-froid et de professionnalisme, peut-être qu’on aurait eu un bilan beaucoup plus lourd». Précisant qu’il ne faudrait pas croire qu’un policier ou un gendarme ayant commis un acte répréhensible du point de vue de la loi ne sera pas puni, M. Kaba informe que la commission se chargera de rétablir la vérité. Le ministre des Forces armées explique : «Je n’ai pas exonéré les Forces de défense et de sécurité. Dans la globalité de leurs actions, elles ont préféré reculer, prendre une posture qui n’est pas une posture d’agressivité. Dans le feu de l’action, il arrive pour maintenir l’ordre parce qu’il y a d’autres personnes qui sont là et qui n’ont rien à voir avec la manifestation, il faudrait les protéger aussi.» Il ajoute : «Et dans le cadre de cette protection, il peut y avoir des actes de nature à violer la loi. La commission rétablira la vérité. Il y a eu des vidéos de toutes sortes. Il faut faire leur compilation. Une commission d’enquête qui a la capacité de faire l’enquête sur l’ensemble des lieux de crise du territoire national pourrait éclairer sur ce que les uns et les autres ont pu faire. Les conséquences de droit seront tirées et les choses ramenées à leur juste proportion.» Convaincu qu’il peut y avoir de la manipulation dans cette affaire, M. Kaba insiste sur l’importance d’une commission indépendante. «Des autopsies ont eu lieu. D’autres se sont précipités à enterrer leurs morts. C’est pourquoi nous disons qu’il faut être prudent. Quand on fait un rapport il y a une méthodologie, il faut rencontrer les différentes personnes qui peuvent être impliquées et donner des lumières pour rétablir la vérité. On ne se précipite pas dans le sensationnel. S’il y a une commission, c’est pour établir la vérité. C’est ce que l’on fait dans un Etat de droit», a-t-il déclaré. Quid des «forces occultes» et des «nervis» qui auraient participé à ces manifestations ? Sidiki Kaba renvoie la réponse aux conclusions de la commission d’enquête. «Beaucoup de choses ont été dites sur ces évènements, mais disons la vérité. S’il y a des forces occultes, s’il y a des nervis, nous saurons à la suite de l’enquête que font-ils dans les manifestations. En ce moment-là, la vérité sera établie», a-t-il assuré. Lors de son face-à-face avec la presse, le ministre a aussi été interpellé sur le fait que toutes les personnes arrêtées lors de ces événements ont été libérées. Selon M. Kaba, «les procédures ont été respectées». A l’en croire, «les personnes qui ont bénéficié de liberté conditionnelle ont été entendues par un magistrat instructeur qui a estimé qu’il fallait les libérer». Il précise toutefois «qu’on doit pouvoir juger sans qu’on soit nécessairement dans une arrestation».