Après Gora Khouma qui a appelé les routiers à observer une grève de protestation le 1er juin, les marchands ambulants de Petersen ont décidé de bander les muscles pour retrouver les trottoirs et reprendre leur business. Malgré l’interdiction à eux faite par le commissariat de Rebeuss.
La grogne est en train d’écraser la peur liée à la propagation du virus. Après les transporteurs qui rongent leurs freins depuis deux mois et ont du mal à reprendre leur business, les marchands ambulants ont aussi décidé d’étaler leur colère. Et d’exposer leur mal-être. Comme tout le monde, ils veulent retrouver leur travail pour avoir leur «pain quotidien». Hier, ils ont décidé de violer le protocole sanitaire et sécuritaire mis en place au marché Petersen. Le temps d’une matinée, le rond-point du marché Petersen a été le théâtre d’une manifestation des vendeurs à la sauvette. Ils ont paralysé la circulation, obligeant même certains véhicules comme ceux de Dakar dem dikk à rebrousser chemin, de peur d’être caillassés. Les marchands ambulants se plaignaient de la décision du commissaire de Rebeuss, les enjoignant de ne pas vendre sur les lieux. Une décision qu’ils ont mal appréciée en bloquant pendant quelques minutes la circulation pour manifester leur courroux. «Ils nous ont interdit d’exposer nos marchandises. C’est la volonté du commissaire. Nous ne savons pas pourquoi ils nous interdisent de vendre. C’est le seul endroit que nous disposons pour faire nos activités commerciales», indique le commerçant Modou Ndaw. A l’en croire, ils ne comptent pas céder à cette instruction policière. «Nous sommes prêts à en découdre avec les Forces de l’ordre, car le coronavirus a plombé toutes nos activités et nous ne pouvons pas rester oisifs alors que nous avons des charges qui nous incombent», fait-il remarquer.
En écho, Mor Seck, un autre commerçant ambulant, ne cache pas aussi son indignation face à cette décision. «Ils nous avaient demandé de surseoir à nos activités au début de la pandémie. Mais quand le chef de l’Etat, le Président Macky Sall, a assoupli les mesures, ils nous ont dit qu’on pouvait revenir. Mais à notre grande surprise, le commissaire est venu ce matin (hier) pour nous demander de quitter les lieux. Nous n’avons plus de travail, plus d’argent pour subvenir à nos besoins, nourrir nos familles et payer nos locations. Nous n’avons même pas de quoi envoyer à nos parents restés au village. Nous avons arrêté nos activités depuis le début de la maladie. Nous n’allons pas respecter cette décision», martèle-t-il. Selon lui, les marchands ambulants ne bénéficient d’aucune considération dans ce pays. «Nous sommes les plus fatigués. S’ils veulent nous faire partir d’ici, qu’ils nous montrent un autre endroit», suggère-t-il. Toutes griffes dehors, une vendeuse de fruits fait dans la menace en lançant un avertissement au commissaire. «D’ailleurs, on ne doit plus accepter que le commissaire vienne ici nous importuner», soutient-elle, les yeux grandement ouverts.
Colère et incompréhension
Mercredi, Gora Khouma, vieux routier, ne cachait pas sa colère face à la situation «indécente» dans laquelle ont été plongés ses collègues. «Vu la situation, il est temps que les syndicats se lèvent, soient solidaires. Je demande aux détenteurs de permis et de carte à grise, que vous soyez dans le transport en commun ou de marchandises, de mettre en place notre syndicat. Il faut être courageux et se défendre, en immobilisant tous les véhicules sur toute l’étendue du territoire national.» Il ajoute : «C’est une action syndicale et les détenteurs de ces documents doivent prendre leurs responsabilités. Vous avez tous vu le convoyage des enseignants hier (mardi). Il est alors temps de prendre ses responsabilités. Il y avait des milliers de personnes sur place, sans mesures barrières avec la bénédiction du gouvernement. Il faut que tout le monde aille au travail ou reste chez soi.»