Contrairement au département de Podor où il n’y presque pas eu de commerces fermés, le mot d’ordre de grève des détaillants a été largement suivi à Matam. Sur l’étendue du territoire départemental, surtout dans les grandes agglomérations, les usagers ont constaté très tôt hier que les boutiquiers ont mis leur menace à exécution. Ils ont dû se rabattre sur les marchés hebdomadaires.Par Demba NIANG

– Il est 6 h. C’est le moment de l’ouverture des boutiques et magasins au garage de Thilogne. A cette heure de la matinée, tout était calme. Les boutiques et les magasins sont fermés et leurs propriétaires invisibles. Ainsi les commerçants de Thilogne, à l’image de leur collègues du reste du département de Matam, venaient d’annoncer la couleur pour le respect du mot d’ordre de 48 heures. Les usagers et fournisseurs de pain, très matinaux, se sont vite rendus à l’évidence. Ils avaient cru jusqu’à la veille que le mot d’ordre ne sera pas suivi. Aissata Seck, une ménagère, qui avait pris très au sérieux la menace des commerçants, a pris les devants : «Dès mercredi matin, j’ai récupéré le montant de la dépense quotidienne de jeudi et vendredi de la boutique où je venais chaque matin le récupérer. J’avais pris les devants, c’est plus prudent.» Même constat à Agnam et Bokidiawé où ceux qui avaient ouvert ont aussitôt fermé après avoir remis le montant de la dépense quotidienne aux femmes, qui insistaient à l’heure de se rendre au marché.

Dans la ville économique de la région de Matam, Ourossogui, les commerçants toutes catégories ont profité de cette journée pour faire d’une pierre deux coups. Le marché central était fermé et les commerçants, renforcés par les détaillants et ­grossistes des quartiers, ont organisé une marche à travers les rues de la commune. Une deuxième procession des commerçants du marché pour montrer leur désaccord à propos de leurs conditions de recasement. La quasi-totalité de boutiques et magasins fermés n’est pas du goût des habitants de la ville, mais aussi des étrangers qui y sont quotidiennement en grande nombre soit pour des affaires, des besoins administratifs, des soins médicaux. De retour d’un rendez-vous médical, I .G raconte : «Aujourd’hui (hier) Ourossogui est invivable car on ne voit même pas une boutique ouverte pour acheter un sachet d’eau.»

Du côté des commerçants, il s’agit de se battre pour que le gouvernement revoit les mesures prises. Grossistes, demi-grossistes comme détaillants sont unanimes : «On ne peut pas vendre à perte.» S .M, un grossiste qui était dépassé par le grand nombre de clients le jour du marché hebdomadaire de Thilogne, assène : «Fermer sa boutique le jour de grand rush, un commerçant ne le fait pas par gaieté de cœur, mais le jeu en vaut la chandelle.» Un boutiquier R .N brandit une facture et explique : «J’ai acheté le sac de 50 kg de sucre à 30 mille F et on me recommande de vendre le kg à 600 F. Donc avec les frais de transport, je vends à perte.» Cette situation a poussé à la ­fermeture de plusieurs commerces. Une fermeture qui a poussé les usagers à se rabattre sur les ­marchés hebdomadaires.

Thilogne et Galoya, marchés hebdomadaires sauveurs
A cause la grève des commerçants, le marché hebdomadaire de Thilogne a vu son taux de fréquentation augmenter ce jeudi. Les populations de la commune de Thilogne et des localités environnantes, ayant constaté que les commerçants ont suivi ­largement le mot d’ordre, se sont ruées au louma pour l’achat de provisions pour les deux jours. Parlant à un bana-bana, une femme, venue de Kobilo, avance : «Vous nous avez sauvées aujourd’hui (hier), mais j’espère que vous aussi vous n’allez pas vous solidariser avec les commerçants.» De nombreuses femmes sont venues d’un peu partout se ravitailler pour les deux jours de grève, surtout en produits alimentaires qu’elles achetaient d’habitude dans les boutiques et magasins. Après Thilogne, Galoya, où se trouve le plus grand marché hebdomadaire de Podor, va soulager les ménagères ce vendredi.
Correspondant