Tout récemment, le 24 octobre 2017, cinq chefs d’Etat de la Cedeao (Niger, Nigeria, Ghana, Côte d’Ivoire, Togo) s’étaient réunis à Niamey pour examiner la feuille de route définissant les conditions de la création de la monnaie unique de la zone. L’objectif de ce mini-sommet était d’accélérer le processus de l’instauration de la monnaie unique dans l’espace Cedeao.
Il avait été constaté, lors de ce mini-sommet de la Cedeao qui ne nécessitait pas, outre mesure la présence de tous les chefs d’Etat de la zone au nombre de quinze, que les progrès sur la convergence macro-économique des Etats restent faibles et qu’ils évoluent à pas de tortue, en dépit de l’importance économique que revêt le projet d’intégration monétaire dont le processus en cours évolue depuis dix-sept années. Ainsi, l’horizon 2020 qui était prévu pour l’avènement de la monnaie unique fut repoussé au-delà de 2023 à minima, en raison du non-respect par les Etats hors zone Uemoa des critères de convergence de premier ordre et de la création d’un institut monétaire qui n’a pas toujours vu le jour, prélude à la création d’une Banque centrale commune au niveau des Etats de la Cedeao. Au cours de ce mini-sommet, pour gagner du temps, le Président Issoufou du Niger avait suggéré la mise en circulation d’une monnaie commune suivant le modèle européen avec l’euro dans les pays techniquement prêts et l’adhésion se fera au fur et à mesure pour les Etats retardataires.
Il faut rappeler que les huit Etats de la zone Uemoa qui ont une monnaie commune arrimée à l’euro (Côte d’ivoire, Sénégal, Mali, Burkina Faso, Niger, Togo, Bénin, Guinée-Bissau) ne sont pas dans la même situation que les sept autres pays hors zone de l’Union économique et monétaire quant au respect des critères de convergence, lesdits pays battant des monnaies nationales inconvertibles entre elles (Cap-Vert, Gambie, Ghana, Guinée, Liberia, Nigeria, Sierra Leone). Si bien qu’à ce mini-sommet la présence de tous les chefs d’Etat de la Cedeao n’était pas nécessaire, encore moins de l’Uemoa.
Le président en exercice de l’Union économique et monétaire, Ouattara, et le Président Issoufou du Niger, hôte du sommet, pouvaient suffisamment représenter la zone Uemoa, le Président Buhari du Nigeria et le Président Addo du Ghana représentaient les sept autres pays hors zone Uemoa, le Président Faure Gnassingbé faisant office de président en exercice de la Cedeao : c’est dire qu’à ce mini-sommet, il y avait deux représentants pour chaque zone économique en plus du président en exercice de la Cedeao qui explique la présence logique de cinq chefs d’Etat sur quinze à ce mini-sommet .
Certains esprits retors, qui font l’amalgame entre monnaie unique et décrochage du franc Cfa, de l’euro ou de toute autre monnaie reliée à une devise forte par des accords monétaires ont accusé à tort le Président Macky Sall de fuir comme la peste ce mini-sommet de la Cedeao sur l’intégration monétaire où il était convenu que seuls cinq chefs d’Etat devraient s’y rendre en raison des mandats de leurs pairs au niveau des zones communautaires.
Pourtant, la volonté politique du Président Macky Sall, ainsi d’ailleurs qu’au niveau de tous les chefs d’Etat de la zone dont le panafricanisme ne souffre d’aucun doute, est bien réelle pour l’avènement d’une monnaie unique. Cette volonté politique a été attestée, entre autres, par l’adoption à Dakar d’un instrument matérialisant l’union douanière entre les Etats de la Cedeao avec le Tec (Tarif extérieur commun) qui était l’étape la plus importante vers l’union monétaire. Aujourd’hui, c’est surtout les Etats hors zone Uemoa qui accusent un retard dans le respect des critères de convergence qui est un obstacle à l’avènement de la monnaie unique. Toutefois, le processus est en cours et le chemin difficile si l’on sait que l’Ue a mis plus de cinquante ans pour arriver à la monnaie unique.
Au demeurant, l’amalgame fait par les partisans d’une «souveraineté monétaire» métaphorique entre monnaie unique et décrochage d’une quelconque monnaie par rapport à une devise forte et, Dieu sait qu’il y a en plusieurs cas de figure similaires dans le monde, font dans la diversion et l’exemple de la monnaie unique du franc Cfa qui a cours forcé dans l’ensemble des Etats de l’Uemoa en est patent.
Demain, la monnaie unique Cedeao pourrait bien être liée à une devise forte internationale pour assurer sa convertibilité internationale en attendant que nos balances commerciales soient excédentaires dans l’union, afin de lui conférer un pouvoir d’achat international autonome.
Kadialy GASSAMA
Economiste
Rue Faidherbe X Pierre Verger
Rufisque