Dans le cadre de l’élaboration d’une nouvelle politique de jeunesse alignée sur la Vision 2050 de la Cedeao, les jeunes de l’organisation régionale se sont retrouvés au Sénégal pour tracer une feuille de route claire afin de jouer leur partition dans l’intégration communautaire.Par Alioune Badara CISS – 

La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a clôturé, hier à Saly, ses Assises régionales de la jeunesse, sous le thème : «En­gager la Cedeao pour une nouvelle vision de la jeunesse.» Cette rencontre stratégique de trois jours marque un tournant dans la refonte des politiques publiques régionales, plaçant la jeunesse au centre des débats pour construire l’avenir de la sous-région, confrontée à des défis géopolitiques et socio-économiques majeurs.
L’Afrique de l’Ouest fait face à des crises profondes, impactant directement sa jeunesse. Cheikh Oumar Ba, Directeur exécutif de l’Initiative prospective agricole et rurale (Ipar), coordinateur scientifique et technique des assises, insiste sur cette réalité : «L’Afrique de l’Ouest traverse une crise profonde de ses Etats, marquée par des conflits, une instabilité politique et des difficultés à assurer le développement.»
Malgré leur poids démographique, les jeunes ouest-africains subissent une précarité persistante, due à un accès limité aux services essentiels comme l’alimentation, la santé, l’éducation ou la formation. Ce manque d’opportunités, particulièrement en milieu rural, pousse à l’exode vers les villes ou à l’étranger, souvent via des voies migratoires irrégulières. Pourtant, cette jeunesse se distingue par sa capacité d’adaptation et son dynamisme. «Leur capacité à se sentir collectivement utiles peut, si elle est soutenue, donner un nouveau souffle à nos sociétés», affirme Cheikh Oumar Ba.
Grâce au numérique et à l’Intelligence artificielle, les jeunes s’organisent, innovent et réinventent leur rôle social. L’initiative des assises intervient à un moment critique, comme l’a précisé Khady Diène Gaye, ministre de la Jeunesse, qui a présidé la cérémonie d’ouverture à Saly : «Nous évoluons dans un contexte régional complexe, marqué par des tensions géopolitiques, le retrait de certains pays de la Cedeao et une exploitation de nos ressources qui échappe encore trop souvent à nos Etats.» Elle a insisté sur le rôle crucial de la jeunesse africaine, prête à relever ces défis et à accompagner les gouvernements vers une gouvernance plus efficace et durable. «L’Afrique a tout. Mais pour que cela profite à tous, il faut intégrer les jeunes dans les décisions, dans les politiques publiques, dans la gestion de nos ressources.»
En écho, Pr Fatou Sow Sarr, Commissaire au développement humain et aux affaires sociales de la Cedeao, a rappelé que ces assises s’inscrivent dans un tournant stratégique visant à «construire une nouvelle politique jeunesse alignée sur la Vision 2050 de la Cedeao. Cette politique de rupture doit partir des réalités de terrain et des priorités exprimées par les jeunes eux-mêmes». Les travaux, initiés il y a deux ans, aboutiront en 2026 à un document stratégique global et prospectif. Ce document abordera des enjeux structurants tels que la citoyenneté active, l’emploi, l’éducation, la santé, l’Intelligence artificielle et l’exploitation souveraine des ressources.
L’Ipar a joué un rôle central dans l’organisation de ces assises et dans la collecte des attentes des jeunes. L’institution, forte de son expérience en matière de recherche sur l’emploi et la migration des jeunes, et son appui à l’élaboration de stratégies nationales pour l’insertion des jeunes dans l’agriculture, œuvre aujourd’hui pour l’entrepreneuriat vert et l’accompagnement des jeunes.
Cette rencontre a réuni des jeunes de tous les pays de l’Afrique de l’Ouest, anglophones, francophones et lusophones, démontrant leur volonté commune de dépasser les clivages. Comme l’a souligné la ministre Khady Diène Gaye, «les jeunes sont nettement en avance sur les différents gouvernements… Quels que soient les clivages entre les différents régimes, les jeunes restent toujours connectés, restent interconnectés et ont les mêmes ambitions».
L’objectif est clair : bâtir une Afrique unie, prospère, équitable, juste et en progrès.
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