Il y a quelques semaines, la commune de Mbour a été fortement endeuillée avec le naufrage d’une embarcation de migrants qui a fait 40 morts. En installant, dans la foulée de cette tragédie, la section départementale du Comité interministériel de lutte contre la migration irrégulière (Cilmi), l’Etat tente d’endiguer le phénomène. Même s’il admet que la lutte sera intense pour neutraliser les réseaux de passeurs et faire renoncer à ces jeunes leur rêve d’une vie meilleure ailleurs.

 

Par Alioune Badara CISS – Le ministre de l’Intérieur et de la sécurité publique, Jean-Baptiste Tine, a installé officiellement, hier dans la salle de délibération de la mairie de Mbour, la section départementale du Comité interministériel de lutte contre la migration irrégulière (Cilmi). Il sert de cadre de coordination de la lutte contre la migration irrégulière suite au décret n°2024-692 du 6 mars 2024 portant création du Comité interministériel de lutte contre la migration irrégulière (Cilmi) en remplacement du Comité interministériel de lutte contre l’émigration clandestine (Cilec).

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Dans sa présentation, le Commissaire Malang Badiane, en poste au ministère de l’Intérieur et de la sécurité publique, a rappelé que le Cilmi est une structure de coordination et de suivi des services compétents en matière d’émigration et de surveillance du territoire. «C’est un service rattaché au Cabinet du ministre de l’Intérieur. Dirigé par un Secrétaire permanent, il compte, hormis les membres d’office des ministères, d’autres structures étatiques et non étatiques, les comités régionaux et départementaux, 1 adjoint, 5 divisions, 10 bureaux et un Secrétariat particulier. Son fonctionnement en mode collégial offre un plateau bien équilibré pour des décisions concertées et consensuelles pour une plus grande efficience des actions», a déclaré le Commissaire.

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Il révèle qu’entre janvier et juin 2024, 294 embarcations sont arrivées aux îles Canaries avec 19 mille 260 migrants irréguliers. En écho, Jean-Baptiste Tine, ministre de l’Intérieur et de la sécurité publique, a rappelé que le phénomène de la migration est une problématique qui affecte profondément le pays. «Au Sénégal, ce phénomène prend sérieusement des proportions à la fois préoccupantes et alarmantes, notamment chez les jeunes attirés par des mirages d’une vie meilleure ailleurs. Pourtant, ce chemin souvent clandestin est semé d’embûches, de risques mortels et d’incertitudes. Nous connaissons tous ces images tragiques de jeunes Sénégalais perdant la vie en mer et dans le désert, tentant désespérément d’atteindre les côtes et les terres européennes. Cette réalité est intolérable. La migration irrégulière n’est pas seulement une perte en vie humaine, elle représente aussi une perte de talents et d’espoir pour notre Nation», déplore le ministre de l’Intérieur et de la sécurité publique.
Face à ces nombreuses vagues de morts, il invite à trouver les raisons de ces départs risqués. Il n’a pas manqué d’en citer quelques. «Le manque d’opportunités économiques, la pression sociale et parfois la désinformation véhiculée par les réseaux de passeurs sans scrupules qui prospèrent sur le dos de ces âmes vulnérables. Face à cette situation, notre devoir est clair. Nous devons renforcer la sensibilisation en informant nos jeunes des réalités de cette aventure périlleuse, mais aussi en leur offrant des alternatives viables ici même au Sénégal. Il est primordial de créer des opportunités économiques et promouvoir l’entrepreneuriat, et investir massivement dans la formation professionnelle pour donner à nos jeunes l’espoir d’un avenir meilleur dans notre pays», conseille Jean-Baptiste Tine.

En plus de cela, il a adressé une sévère mise en garde à l’endroit des passeurs, tout en invitant le Cilmi  à intensifier la lutte contre les réseaux de passeurs en coopérant avec les pays voisins et les organisations internationales pour démanteler ces structures criminelles. «La répression des acteurs de cette chaîne est une nécessité pour protéger nos citoyens. En tant que Nation, il est impératif que nous redoublions d’efforts pour promouvoir une migration légale, ordonnée et sûre. C’est seulement ainsi que nous pourrons offrir un avenir à nos jeunes et préserver la dignité de notre pays sur la scène internationale.

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Ensemble, œuvrons pour un Sénégal où les opportunités sont créées, où l’avenir ne se cherche plus dans l’exil, mais dans l’engagement ici, sur notre terre. C’est un défi immense, mais avec la volonté, la solidarité de tous, on va y arriver», assure le ministre.

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Auparavant, le 1er adjoint au maire de Mbour a dessiné un tableau très sombre de cette émigration irrégulière, notamment dans la commune de Mbour qui a été fortement touchée. «La jeunesse, cheville ouvrière du pays, s’affaiblit. Des milliers de mamans de victimes se vident de leur substance avec cette saignée démographique. Certaines embarcations faites aujourd’hui à Mbour se multiplient pour avoir assez d’hommes pour l’équipage afin d’aller en mer ; tellement la saignée a été profonde. Les départs continuent malgré les nombreux morts», regrette Bayati Babou.
abciss@lequotidien.sn