Le moment viendra un jour, mais l’Eglise catholique n’est pas prête à avoir un Pape noir, a déclaré, vendredi, le Cardinal Théodore Adrien Sarr. «Le monde aujourd’hui n’est pas prêt à avoir un Pape noir. L’Eglise catholique elle-même n’est pas prête à avoir un Pape noir, et je n’ai pas honte de le dire, mais ça viendra», a notamment dit le religieux au cours d’une interview accordée à l’Aps, dans sa résidence dakaroise baptisée Nazareth, en souvenir de la ville de Joseph et Marie, mais aussi de l’enfance de Jésus-Christ, selon la tradition chrétienne.

L’Archevêque émérite de Dakar sous-tend sa déclaration par la tournure actuelle du monde caractérisé par le peu de «considération» pour les «hommes de couleur», comme on disait à une certaine époque. «Vous voyez que dans beaucoup de pays du monde, le Noir n’est pas le mieux considéré, et je n’ai pas honte de le dire», a déploré le Cardinal Sarr.

Il ajoute que, malgré le principe d’égalité de tous les hommes, sanctifié par la religion chrétienne, celle-ci n’est pas moins incarnée par des humains avec leurs faiblesses intrinsèques. «Que voulez-vous ? Même nous chrétiens, même nous Eglise, sommes des humains avec nos limites, nos faiblesses», a-t-il ajouté

Au lendemain du décès du Pape François, le 21 avril dernier, ouvrant la période de sa succession, les cardinaux issus du continent africain, à l’instar du Congolais Fridolin Am­bongo Besungu, du Ghanéen Peter Turkson et du Guinéen Robert Sarah, étaient inlassablement cités parmi les «papabili». A l’arrivée, c’est l’Américain Robert Francis Prevost, appelé Léon XIV, qui a été choisi comme Pape à l’issue du conclave. «Ce sont vraiment les pays européens qui comptent le plus de papes, plusieurs Italiens, mais aussi des Français, des Allemands, etc., le Polonais Jean-Paul II. Mais c’est avec l’élection du Pape François [un Argentin], venu du bout du monde, comme il le disait lui-même, que l’Hé­misphère sud a donné à l’Eglise un Pape», a fait observer le Cardinal Théodore Adrien Sarr.

Ce qui veut dire, selon lui, qu’il faut reconnaître que les choses bougent petit à petit, d’autant plus que «l’Eglise catholique compte plus d’adeptes en Afrique, en Amérique latine et en Asie, contrairement à l’Occi­dent où la sécularisation et l’athéisme gagnent du terrain».

«C’est pour cela que je crois qu’il y aura un Pape africain, mais le monde n’est pas encore prêt», a estimé le religieux sénégalais.

Il ne pense toutefois pas qu’il faille instaurer un système de Pape tournant, qui pourrait permettre à tous les continents de donner à l’Eglise un Pape à tour de rôle. «Un système de rotation obéit à une organisation humaine. Or, ce n’est pas aux humains de choisir eux-mêmes qui serait le prochain Souverain pontife. Ce sont les cardinaux, inspirés par Dieu, qui doivent procéder, par la prière, à l’élection du Pape. Je le crois et nous tous croyons sincèrement que c’est Dieu qui guide à ce choix», a lancé le Cardinal Théodore Adrien Sarr.