Un gros pavé dans la mare du chef de l’Etat ivoirien, Alassane Ouattara. Sa volonté de transformer le franc Cfa en Eco d’ici juin 2020 ne passe pas auprès des autres membres de la Cedeao qui l’ont fait savoir hier, dans un communiqué publié à l’issue de leur rencontre d’Abuja.
La décision de Alassane Ouattara et de Emmanuel Macron de renommer le franc Cfa Eco, avec quelques aménagements, n’a pas fini de soulever des remous au sein de la région de l’Afrique de l’Ouest. La dernière réaction en date est celle des Etats membres de la Cedeao qui ne font pas partie de l’Uemoa, donc hors zone Franc. A l’issue d’une réunion extraordinaire hier à Abuja, les ministres des Finances et les gouverneurs des Banques centrales des huit pays non-membres de la zone Franc ont publié un communiqué dans lequel ils disent avoir «noté avec inquiétude la déclaration de Son Excellence Alassane Ouattara, président du Comité des chefs d’Etats et de gouvernement de l’Uemoa, le 21 décembre 2019, de renommer le franc Cfa Eco en 2020.»
Le communiqué ajoute : «Le Conseil de convergence de la zone monétaire ouest africaine souhaite mettre l’accent sur le fait que cette action n’est pas conforme aux décisions de l’Autorité des chefs d’Etat et de gouvernement de la Cedeao qui ont adopté l’Eco comme le nom d’une monnaie unique indépendante à la zone Cedeao.» Cela sonne comme un camouflet clair du processus engagé du côté de la zone Franc et qui avait, dès le départ, paru comme une manœuvre de certains pays pour donner l’impression de se débarrasser du franc Cfa qui est fortement chahuté ces derniers mois, et d’en garder les fondamentaux.
Un moment, le Ghana avait semblé conforter les partisans du changement de nom du Cfa. Mais c’était ignorer que le Ghana émettait des réserves fondamentales sur le fait que la monnaie proposée par le Président Ouattara et son homologue français restait arrimée à l’Euro, au lieu de la proposition de la laisser fluctuer en suivant un panier de devises. D’ailleurs, quelques jours après, le gouvernement sierra léonais, lui, déclarait sa franche hostilité à l’initiative bénie par l’Uemoa. Ce n’est donc pas étonnant aujourd’hui de lire dans le communiqué d’Abuja que les ministres et gouverneurs de ces pays demandent à tous les pays «d’adhérer aux décisions des chefs d’Etat et de gouvernement concernant la mise en œuvre du processus de mise en œuvre de la monnaie unique de la Cedeao».
Pour finir, les participants à la réunion extraordinaire ont recommandé que les dirigeants de la Zone monétaire ouest africaine se retrouvent rapidement au cours d’une réunion extraordinaire pour que toutes les questions en suspens soient aplanies.
Quoi qu’il en soit, on peut se demander si cette divergence entre l’Uemoa et les autres pays membres de la zone Franc ne signifie pas le renvoi du projet de monnaie unique aux calendes… ouest africaines. Ce serait d’une certaine manière, selon certaines personnes trop intelligentes, ce qui était le but de Alassane Ouattara. Ces personnes rappellent qu’il n’y a pas encore un an que le chef de l’Etat ivoirien chantait les louanges du franc Cfa qu’il considérait, en sa qualité d’ancien gouverneur de la Bceao, comme son «bébé», selon ses propres dires.