Plus grand-chose, sommes-nous tenté de répondre à cette question qui est d’une brûlante actualité, sinon le mythe d’un établissement scolaire jadis fleuron du système éducatif sénégalais.

Anciennement maison d’éducation, l’établissement est devenu depuis peu un lycée d’excellence et accueille les meilleures élèves filles du pays en fin de cycle élémentaire. En effet, le Lycée d’excellence Mariama Ba (Lemba) présélectionne d’abord les 50 filles les mieux classées du Concours d’entrée en sixième, pour en retenir subséquemment les 35 meilleures à la suite d’un deuxième concours. Ce double filtre, contrairement à l’accès au Prytanée militaire ou à l’Ecole militaire de santé par exemple, place toutes les filles en classe de Cm2 du pays sur le même pied, en ce qu’il s’organise en fin d’année, quand les élèves ont fini de recevoir l’intégralité de leurs enseignements, mais surtout il ne laisse aucune place au hasard ou à la chance, et donne ainsi tout son crédit au concours qui devient dès lors le plus sélectif organisé par l’Education nationale du Sénégal.

Seulement, dès leur admission au Lemba, les pensionnaires, comme leurs parents, déchantent et doivent supporter un calvaire sans fin lié à leurs dures conditions «d’internat» et surtout aux sorties intempestives auxquelles les filles sont astreintes. Elles sont systématiquement libérées chaque fin de semaine à partir de vendredi à midi, le moindre prétexte est souvent saisi pour les renvoyer chez elles au moment où les enseignements continuent à être dispensés dans les autres établissements du pays.

Ces sorties intempestives, en plus d’impacter négativement les enseignements, coûtent très cher aux parents d’élèves, surtout ceux qui sont de l’intérieur du pays, constituent un stress permanent pour les filles et leurs parents, et surtout elles sont une réelle menace pour les filles, qui se déplacent souvent à des heures impossibles pour regagner l’école ou leurs domiciles.

Le respect du quantum horaire semble un défi au Lemba, pourtant lycée d’excellence du pays
Sinon, comment comprendre la décision de débuter des travaux de rénovation dans cet établissement au moment de la rentrée des classes, quand l’autorité avait toute la latitude de les réaliser pendant les grandes vacances scolaires ? Quel est le rationnel à fermer l’école en l’absence d’urgence, car aucune menace ne pèse sur la sécurité des pensionnaires malgré l’état de décrépitude des bâtiments ? L’année scolaire écoulée, les élèves avaient perdu des semaines de cours pour des problèmes liés à la disponibilité de l’eau dans l’école, la présente s’annonce pire si l’Etat du Sénégal ne prend pas ses responsabilités en reportant sine die les travaux de rénovation qui n’ont pas encore débuté, ou en proposant un plan alternatif viable, à même de permettre aux filles de recevoir à temps leurs enseignements dans des conditions correctes, au même titre que les autres élèves du pays.

Au moment où je vous saisis pour cette situation du reste inédite et ubuesque, comprenez que les pensionnaires du Lemba et leurs parents sont dans le désarroi. Ce n’est que ce jeudi (3 octobre 2024, Ndlr) que l’on nous a mis devant le fait accompli, en nous informant de la fermeture de l’établissement et que les enseignements seront délocalisés au Lycée Lamine Guèye de Dakar. Ce dernier a-t-il la capacité et la logistique pour accueillir correctement les élèves du Lemba en sus de ses effectifs ? Le Lycée Mariama Ba compte beaucoup d’élèves qui viennent de l’intérieur du pays et de la banlieue de Dakar, comment peut-on à 4 jours de la rentrée des classes, demander à leurs parents de leur trouver un logement à Dakar et leur assurer la nourriture et le transport ? Aujourd’hui, l’on vient de nous informer que la rentrée est reportée au 14 octobre prochain pour le seul lycée d’excellence pour jeunes filles du pays.

En tous les cas, des conditions éprouvantes que l’on n’ose pas infliger aux étudiants, de très jeunes filles fragiles et sans défense sont obligées de les supporter depuis longtemps. Elles impactent forcément le niveau intellectuel des filles. Ainsi, les résultats du Lemba au Concours général sont aujourd’hui mitigés et ne sont pas à la hauteur de ceux du Lycée d’excellence de Diourbel, pourtant créé depuis peu. Premières à l’entrée en sixième, si les pensionnaires du Lemba se retrouvent ainsi larguées à la sortie, c’est la preuve que leur niveau a globalement baissé quand celui des autres s’est amélioré. Le Lemba fait-il baisser le niveau des meilleures élèves filles du pays, si l’on admet que le Concours général célèbre encore les meilleurs talents des classes de Première et de Terminale du pays ?

Ainsi, ce cri du cœur d’un parent d’élève ne vise qu’à informer l’opinion, alerter l’autorité et porter le plaidoyer pour venir au secours des pensionnaires du Lycée d’excellence Mariama Ba de Gorée, afin qu’elles puissent recevoir décemment leurs enseignements.

Nous interpellons les autorités, et notamment le ministre de l’Education nationale du pays, le maire de la Ville de Dakar et le maire de la commune de Gorée, les organisations des droits de l’Homme, les associations féministes du pays et tous les Sénégalais sur la situation de leurs filles, nièces et sœurs dont le seul tort est d’avoir travaillé durement pour compter parmi les plus brillantes d’entre-elles et pour qui l’Etat s’est porté volontaire afin de se substituer à leurs parents (qui ont le mérite de les avoir au préalable bien encadrées) pour davantage et mieux les préparer à une vie future porteuse d’espérance et au service exclusif de la Nation.
Dr Mamadou Badara SECK – Membre Ape du Lemba
mamadoubadara@yahoo.fr