L’imam Babacar Ndiour est revenu sur les problèmes d’organisation des Législatives et la gestion des deniers publics.

Il n’a pas changé. A la grande mosquée de Moussanté, devant la communauté musulmane thiessoise, imam Babacar Ndiour est d’abord largement revenu sur une «nécessaire justice, la droiture, conformément aux enseignements d’Allah, sur la nette conformité devant toujours lier l’acte et la parole. Bref, sur l’impérieuse nécessité de suivre le doit chemin». Par conséquent, il a condamné avec la dernière énergie «la propagation des dérives notées ces derniers temps sur les réseaux sociaux qui n’épargnent personne. Personne n’est à l’abri de ces injures qui sont condamnées et par nos religieux et par nos coutumes». Le guide religieux pense qu’on «devrait poser la question aux sociologues pour savoir les raisons justificatives d’un tel déchaînement d’injures, car cela n’augure rien de bon». Il invoque «l’histoire de l’humanité» à travers le monde, avec une certaine «catégorie d’injures et surtout de discours ethnicistes ne faisant que créer des dégâts, faire naître plusieurs foyers de tensions sur la planète». Aussi il n’a pas manqué de condamner «certaines tares de la société sénégalaise, notamment le mensonge, le vol, la corruption, l’égoïsme, entre autres». Il dit : «Parmi les vices moraux et les défauts blâmables, le mensonge est le plus laid, le plus pénible et le plus condamnable, alors que la sincérité doit être l’objectif de l’homme dans toutes les circonstances de la vie en tout temps et en tout lieu. Il ne doit pas la sacrifier à quoi que ce soit d’autre. Et le musulman doit s’y attacher en apparence et en secret, en propos et en actes.» Il donne l’exemple de «nombre de tensions nées de la chose politique qui ont conduit à la dislocation de plusieurs familles sénégalaises, lesquelles ont pourtant toujours vécu en paix, en parfaite harmonie, mais qui aujourd’hui s’entretuent à coup de machettes, d’invectives. De graves faits qui se sont produits avant, au cours et après les élections législatives du 30 juillet ont créé énormément de problèmes dans le pays». A l’origine, l’imam ratib pense en particulier aux failles constatées dans le processus avec un sérieux problème d’organisation sur le retrait des cartes, au point de priver nombre de citoyens, les jeunes surtout, de leur droit de vote, voire leur citoyenneté.

«Une élection, ce n’est pas une fin»
Aux manquements dans le déroulement du scrutin, il pense que «c’est soit fait exprès, soit c’est une question d’incapacité au plan organisationnel. Alors qu’en matière de processus électoral, tout doit reposer sur la justice, l’équité et la droiture». Le religieux rappelle «qu’une élection, c’est un point, mais pas une fin», tout en remarquant qu’«à travers le monde on voit à longueur d’année des troubles postélectoraux.
Malheureusement au Sénégal, on pense souvent que ça n’arrive qu’aux autres, alors que c’est un phénomène imprévisible». Pour dire «qu’il est donc temps de privilégier la concertation pour faire tout dérouler dans la droiture».
Par ailleurs, il s’est offusqué sur le fait que «l’argent ait coulé à flots lors des élections et on en ignore la provenance». Il s’interroge sur la «dilapidation de ces fonds» à un moment où «nombre d’engagements de l’Etat ne sont pas encore respectés vis-à-vis des enseignants par rapport à leur droits : avancement ou alignement, rappel. Aussi des travailleurs de la santé qui passent tout leur temps entre sit-in et grèves pour rentrer dans leurs droits». Il se pose beaucoup de questions sur «la finition de certains chantiers, le chômage des jeunes diplômés, le recrutement des vacataires». Et de faire remarquer : «A ce rythme, le développement n’est pas pour demain au Sénégal. A moins qu’il ne soit profitable à une catégorie et des individus particuliers très riches, dans un pays très pauvre et endetté.» Il constate que les villes du Sénégal rivalisent de pauvreté. Et ne manque pas de se demander «à qui profitent ces nombreux programmes tant vantés, comme Promoville», «à quoi nous servent certains ministères : Renouveau urbain, Cadre de vie, Infrastructures, Assainissement, entre autres». «La ville de Thiès ne relève-t-elle pas de leurs compétences ?», se demande-t-il.
Imam Ndiour n’a pas manqué d’évoquer «l’achat de consciences dans certains milieux qui n’est rien d’autre qu’une forme d’exploitation injuste par ceux-là qui profitent de l’indigence des populations opprimées, qui sont dans le besoin». Il s’est offusqué de «certaines pratiques malsaines en cours dans notre pays, certains écarts comme le détournement de deniers pu­blics, la fraude (scolaire, fiscale, douanière) qui freinent le développement» et s’est interrogé sur «l’utilité de certaines juridictions financières comme l’Ofnac, la Cour des comptes».

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