Après 18 mois à la tête du ministère des Finances, du budget et de l’économie, Mamadou Moustapha Ba quitte la scène en assurant que l’Histoire «jugera» s’il a bien fait son travail. Mais, il a fait un bilan de ses réalisations dans les domaines des infrastructures, dans le soutien aux ménages, l’augmentation des salaires et du budget dans un contexte difficile. Pour lui, le défi majeur de son successeur «est la restauration des marges de manœuvre budgétaires de l’Etat par la maximisation des recettes, la rationalisation des dépenses et une maîtrise de l’endettement».
Mamadou Moustapha Ba a quitté hier la tête du ministère des Finances, du budget et de l’économie après ses passations avec Cheikh Diba et Abourahmane Sarr dans la sobriété. «Le travail abattu en dix-huit mois seulement est le meilleur témoignage de notre amour pour le Sénégal», assure-t-il. Il s’en va avec le sentiment du devoir accompli. «Je me considère comme un soldat, sans doute pour avoir été enfant de troupe. Or vous le savez, la seule satisfaction du soldat, c’est le sentiment du devoir accompli. L’Histoire jugera si nous avons fait correctement notre devoir.
Mais j’ose dire dès à présent, que j’ai eu le privilège de travailler avec des collaborateurs remarquables, des agents compétents et engagés, des soldats comme moi, qui se sont battus sans relâche afin que ce pays avance…» Evidemment, c’était le moment de faire un bilan de ce temps passé à la tête du ministère des Finances où il a servi pendant longtemps comme Directeur général du Budget. Il dit : «Les finances publiques ont connu des mutations avec des budgets record d’une année à l’autre (on a atteint les 7003 milliards F Cfa en 2024, après les 4071 milliards F de 2019 et les 3022 milliards F de 2016).» Ce qui a permis, note-t-il, d’assurer la mise œuvre des investissements structurants majeurs du Plan Sénégal émergent ayant permis un rattrapage infrastructurel avec les 2526 km de routes, les 6673 km de pistes de désenclavement, les 189 km d’autoroutes, les ponts, le projet-pilote de Bus rapid transit, la relance du transport ferroviaire avec le Train express régional et la réhabilitation de l’axe Dakar-Tambacounda et des villes de l’intérieur, etc., de renforcer la politique d’inclusion sociale, à travers les marqueurs sociaux (Puma, Pudc, Cmu,), de soutenir le pouvoir d’achat des ménages et de procéder à d’importantes revalorisations salariales. «L’ampleur des résultats tangibles que je viens d’indiquer au profit des populations sénégalaises a naturellement éprouvé les finances publiques avec un surcroit d’endettement et de dépenses courantes. Mais les finances publiques ont déjà été fortement ébranlées par les effets des tensions géopolitiques, qui ont exacerbé les prix du pétrole et des denrées alimentaires sur les marchés internationaux, les incidences du Covid, et le resserrement des conditions de financement sur les marchés, et ce, en dépit des performances et efforts salutaires des régies financières pour toujours accroître la mobilisation des ressources, à travers la Stratégie de mobilisation des recettes à moyen terme (Srmt), qui commence à porter ses fruits. Je suis persuadé que vous saurez prendre, avec votre équipe, les mesures adéquates pour apporter les mesures d’ajustements nécessaires», dit-il à son successeur aux Finances.
«Restauration des marges de manœuvre budgétaires»
Dans son discours, Moustapha Ba est revenu sur les mutations liées à la préparation du budget avec la production du compte administratif de l’ordonnateur, la déconcentration de l’ordonnancement est effective et les retards dans la production des lois de règlement ont été résorbés avec l’adoption par le Parlement des Projets de Lois de Règlement pour les années 2018 à 2021, l’instruction en cours de celui de 2022 par la Cour des Comptes et la finalisation de celui de 2023, par les services, avec un dépôt prévu avant le 30 juin 2024, conformément à la réglementation. «C’est dire que la réforme des finances s’est inscrite dans une très bonne dynamique et je ne doute point que le Cap sera maintenu. Le nouveau programme conclu avec le Fmi, s’inscrit également dans cette dynamique d’accélération des réformes consolidantes, permettant d’améliorer la gouvernance des finances publiques, de consolider les mesures pour asseoir un cadre macroéconomique sain et une économie plus résiliente, en assurant une meilleure prise en charge des chocs exogènes et endogènes, d’optimiser les mécanismes pour une utilisation transparente et optimale des ressources attendues de l’exploitation des hydrocarbures et d’assurer la prise en compte des effets des changements climatiques (avec un budget vert en 2024)», détaille l’ex-ministre.
Il a passé les clés de l’immeuble Peytavin à «quelqu’un qui a joué un rôle primordial puisqu’il était aux manettes dans la préparation des lois de finances». Il s’agit de Cheikh Diba, qui était jusqu’à sa nomination directeur de la Programmation budgétaire. Lequel a été aussi conseiller technique chargé du suivi du programme avec le Fmi au ministère des Finances. «Je vous transmets le flambeau, avec confiance et avec la ferme conviction que vous saurez poursuivre l’œuvre accomplie, à laquelle vous avez du reste contribué, en faisant davantage et mieux. Le défi majeur que vous devez et allez relever est la restauration des marges de manœuvre budgétaires de l’Etat par la maximisation des recettes, la rationalisation des dépenses et une maîtrise de l’endettement. J’ose ce pari sur l’avenir car je connais parfaitement vos excellentes qualités professionnelles et humaines, pour les avoir éprouvées et pratiquées», témoigne Moustapha Ba.
Par Bocar SAKHO – bsakho@lequotidien.sn