Musique – Nouvel album du duo de choc Melo’nomade : Magou Samb invite les Sénégalais à sauvegarder le métissage culturel

Le duo de choc Melo’nomade formé par deux artistes, Raphaële Murer, violoncelliste classique originaire d’Alsace, et Magou Samb, guitariste, koriste, héritier du folk des pêcheurs lébous, annonce la sortie de leur nouvel album le 12 mars prochain. Pour Magou Samb, le chanteur à la voix rocailleuse et bluesy, cet album est «symbolique». Le public de l’Institut français a eu un avant-goût de cet album, ce samedi.Par Ousmane SOW
– L’amour a toujours été un vecteur de création musicale. Raphaële Murer et Magou Samb sont mariés dans la vie comme dans la musique et forment depuis 2017, un duo de choc qui a vu naître Melo’nomade, lequel est un voyage exploratoire et mélodique, une plongée à l’intérieur de l’âme de la kora, la guitare et le violoncelle, une quête poétique puisant dans le soufisme et la pureté nostalgique des cordes, pour dessiner un nouveau paysage sonore. Pour revenir sur leur projet artistique mêlant cordes africaines et européennes, entre classique, folk et blues, le couple a fait face à la presse vendredi dernier, à l’Institut français de Dakar, pour présenter ce nouvel album.
En répondant aux questions des journalistes, Magou Samb a reconnu que c’est un peu difficile d’expliquer l’album. «Je peux expliquer chaque morceau comment ça m’est venu. Et il y a des morceaux qui datent de 26 ans. Par contre, j’ai un projet qui s’appelle Dakar transe, constitué de folk, rythmes traditionnels où se mêlent chants, danses et percussions. Donc, cet album est beaucoup plus épuré», dit humblement l’artiste. Les deux musiciens qui ont donné un concert samedi dernier sur la scène de l’Institut français de Dakar, rêvaient de ce cocktail du classique et de l’afro-folk qui fait la force et l’ingéniosité du Melo’nomade. «Depuis cinq ou six ans, on a commencé à jouer ensemble. Petit à petit, en faisant des concerts, on a envie de concrétiser quelque chose, a soutenu Raphaële Murer, violoncelliste classique formée à la musique de chambre au Conservatoire de Strasbourg. Parfois, le hasard fait bien les choses. Pour sa rencontre avec Raphaële Murer, Magou Samb parle d’un pur hasard. Une rencontre qui a eu lieu dans un café à Paris, en 2004. Dans cette ville où joue une diversité de nationalités africaines, Magou va découvrir le côté assez métissé de la musique. «J’ai un côté assez métissé. Donc cet album-là, quand je composais Freedom (liberté) c’est par rapport à plein de choses. Il y a également un morceau sur le ndeup, c’est-à-dire la tradition léboue», a-t-il expliqué. Actuellement, sa musique porte ces influences de la scène parisienne. «Ma musique, c’est des influences», confirme-t-il.
Un album symbolique
Cet album de 10 titres est intégralement produit en duo et il n’y pas de subvention. «La première fois que j’ai entendu dire violoncelle, c’était avec tonton Seydina Issa qui m’a intégré au Just 4 U. Cet album, on l’a enregistré dans le salon de mon cousin Diogal. Ce sont des morceaux que je n’avais jamais donnés aux producteurs et il n’y a pas de subvention. Donc pour moi, cet album est très symbolique.»
Pour le guitariste et koriste originaire de l’île de Ngor, les morceaux qui composent l’album rendent aussi un hommage à son oncle Seydina qui était l’ami de son père, et son cousin Doudou Mar, également décédé. Ayant grandi dans un milieu lébou, à l’île de Ngor, où le ndeup occupe une place de choix, Magou Samb accorde une place centrale à la spiritualité dans sa musique. Si Raphaële Murer n’a pas la culture de l’improvisation, Magou Samb, lui, a appris la musique avec de l’improvisation. «Quand j’ai commencé à jouer avec Raphaële, on faisait de l’improvisation et elle m’a dit qu’elle n’improvisait pas. Du coup, on est mariés musicalement comme dans la vie», dit fièrement le fondateur du groupe «Dakar transe», avec lequel il a tourné pendant une décennie en Europe, qui porte toutefois l’influence de l’univers musical sénégalais. Selon lui, les Sénégalais comme les Indiens apprennent cet art avec de l’improvisation. «C’est quand je jouais avec les Indiens que je me suis rendu compte que le Sénégal est le pays le plus indien de l’Afrique de l’Ouest», commente Magou Samb, qui constate que le Sénégal a quelque chose d’incroyable en matière de musique et il faudrait même construire des écoles de musique. Il a invité les Sénégalais à garder le métissage culturel. «Puisque je voyage, je me rends compte que nous, quelque part, on est en avance sur la France. Les religions ne nous font pas peur. On a gardé ce syncrétisme et cette ouverture d’esprit.» Pour celle qui a collaboré avec les compositeurs Klaus Huber, Ahmed Essyad, Gualtiero Dazzi, Georges Aperghis, le violoncelle fait le lien entre la voix et la guitare. Ce sont des instruments qui parlent.