MUSIQUE – Unique sans aucun artifice dans Siftorde : La douce guitare de Tidiane Thiam

Tidiane Thiam sort Siftorde, son premier album solo sur le label américain Sahel Sounds. Le Sénégalais y dévoile un style à la guitare unique sans aucun artifice dans un enregistrement d’une grande simplicité.
Son jeu à la guitare est virevoltant. Tidiane Thiam joue vite et arrive à créer une atmosphère à lui seul. Sa technique est particulière : il utilise le fingerpicking, très répandu dans le blues et la country et qui complexifie les mélodies. «Parfois les gens me demandent s’il y a plusieurs guitares qui jouent, raconte-t-il. Alors que non, c’est juste une petite guitare acoustique.»
Pourtant, lorsqu’il débutait à la guitare, on lui disait souvent qu’il n’y arriverait pas parce qu’il n’était pas assez patient : «J’étais trop pressé et donc on ne voulait pas m’apprendre. J’ai fini par apprendre tout seul en écoutant la radio. J’essayais d’imiter ce que jouaient de grands musiciens comme Baaba Maal notamment.» Quelques albums plus tard, le natif de Podor s’est joué des Cassandre et entame à présent sa carrière de musicien en solo, après avoir aussi fait de la photo et avoir touché aux arts plastiques.
Signé sur Sahel Sounds, il sort son premier album après avoir été à la guitare dans le groupe Lewlewal de Podor. Le trio figurait d’ailleurs dans la compilation fondatrice du label américain. Et c’est grâce à cette sortie en 2010 et le travail de Christopher Kirkley, aux manettes de la petite maison de disque, qu’il a pu commencer à vivre de la musique. «J’ai beaucoup d’estime envers Christopher parce que tout ça, c’est grâce à lui. C’est lui qui m’a produit !», s’exclame le guitariste.
En plus de l’avoir propulsé, Christopher Kirkley va enregistrer lui-même l’artiste sénégalais. Toujours recueillies de manière simple, les captations se passent en dehors des studios lorsque la musique se fait de façon sincère. Cela laisse de la place pour l’ambiance sonore comme sur Siftorde où l’on entend les éléments de la nature environnante. Une chose à laquelle est attaché Tidiane Thiam : «Quand on écoute les morceaux, cela permet à une personne qui n’a jamais été en Afrique de pouvoir être à notre place.»
Après la compilation, le producteur américain captera des jams du groupe qui sortiront sur Sahel Sounds en 2011. Puis, Tidiane Thiam enregistrera deux sessions avec Christopher lors d’un voyage au Sénégal de ce dernier en novembre 2014. Un premier disque, Waande Kadde, enregistré avec Amadou Binta Konté, pêcheur et aussi guitariste, sortira en 2017. La deuxième captation que rapporte Christopher Kirkley dans ses valises va mettre plus de cinq ans et demi avant d’être publié, c’est Siftorde.
Un disque comme un instant de vie
Après tout ce temps, le musicien éprouve de la nostalgie par rapport à ce moment resté gravé dans sa mémoire. C’est ce qu’il a souhaité évoquer avec le titre de l’album Siftorde traduit en trois langues sur la pochette : le souvenir. «Je me souviens d’une superbe journée passée avec Christopher. Je venais de faire baptiser mon premier fils ce jour-là. On est allé se balader. Et l’on s’était ensuite posé entre amis pour la soirée, raconte le musicien. J’ai commencé à jouer et Christopher a sorti son enregistreur. Ça s’est fait de manière spontanée comme ça ! On entend même les voitures et les grillons autour.»
Ce disque reflète finalement la personnalité de Tidiane Thiam, une personne humble et sincère qui n’a pas besoin d’artifice ou même d’une énorme production pour sonner juste et reprendre à sa façon très personnelle des thèmes traditionnels de la musique sénégalaise.
Rfi