A Mbour, les projets poussent, mais les inquiétudes grandissent. C’est un euphémisme de dire que le problème d’espace est devenu récurrent dans la Petite-Côte. Il peut éclater à tout moment vu l’enjeu économique que constitue le département. Le Collectif pour la préservation et la valorisation des terres paysannes (Cpvtp), avec son équivalent en wolof Mass (Manko aar sunu souf), alerte sur les dangers qui guettent les populations. Selon Philip Malick Dione, coordonnateur du comité de pilotage du Collectif pour la préservation et la valorisation des terres paysannes (Manko aar sunu souf), un travail d’évaluation a été fait. D’ailleurs, lors de ce diagnostic participatif, les différentes délégations avaient énuméré un certain nombre de litiges qu’elles rencontrent dans leurs communes. Et ces litiges concernaient les populations et les conseils municipaux, les populations entre elles-mêmes et les populations avec l’Etat.
Dessinant les contours des problèmes entre les conseillers municipaux et les populations, le coordonnateur du comité de pilotage de Mass avance : «Il y a beaucoup de délibérations qui ont été faites. Et ces délibérations, les populations ne sont pas d’accord avec car souvent elles sont mal faites ou illégales. Par exemple dans la forêt de Balabougou, commune de Nguéniène, des centaines d’hectares ont été affectés à un promoteur privé. C’était l’espace pastoral qui restait dans la commune et les populations se sont opposées à cela parce que c’est le seul espace où ils pouvaient faire paître les troupeaux.»
M. Philip Malick Dione soutient que les problèmes fonciers interpersonnels existent aussi. «Les espaces pastoraux sont occupés par des champs, récemment, nous avons vu dans le département beaucoup de problèmes entre agriculteurs et éleveurs. Non seulement les gens n’ont plus d’espaces où faire paître leurs troupeaux, mais en plus de cela, ils voient que ces espaces sont en train d’être affectés à des promoteurs. Ces derniers font des cultures commerciales qu’ils exportent. Et cela ne peut pas favoriser notre autosuffisance alimentaire, et beaucoup de paysans, se sentant menacés, ont commencé à brader leurs terres et reviennent pour être employés par ces mêmes promoteurs qui vont leur payer des sommes dérisoires», a constaté le coordonnateur du comité de pilotage du Collectif pour la préservation et la valorisation des terres paysannes (Manko aar sunu souf).

C’est pourquoi le collectif invite l’Etat à accompagner les paysans et à leur donner les moyens afin qu’ils puissent valoriser leurs terres. «Ce n’est que de la sorte que nous pouvons assurer un développement durable, parce que la terre, c’est l’or noir, si on laisse faire, rien ne va plus rester. En plus de cela, il y a de grands projets d’envergure qui sont au niveau du département car il fait partie des plus attractifs. Il y a une autre menace, des gens plus nantis viennent nous envahir et si on n’y prend garde, ils vont finir par occuper nos terres, faisant de nous des ouvriers agricoles sur nos propres terres», déplore Abdou Diouf, le président du Collectif pour la préservation et la valorisation des terres paysannes (Cpvtp).

Toutefois, il a précisé que des solutions peuvent être trouvées pour désamorcer ces conflits qui sont devenus récurrents. «Nous avons relevé un certain nombre de solutions. Concernant les solutions juridiques, il faut que l’Etat ose revoir la loi sur le Domaine national de 1964, pour la réactualiser. La gestion des terres du Domaine national doit revenir aux collectivités locales. Il faut que ces collectivités locales exigent de l’Etat la mise en place de plans d’occupation et d’affectation des sols pour qu’on puisse définir la fonction des sols et que dans ces plans, on puisse déterminer les zones où on doit cultiver, les zones pastorales, les zones d’habitation, et s’il y a des infrastructures publiques ou autres, voilà où on doit les implanter. Et que cela se fasse en concertation avec la population», préconise M. Diouf.

D’autres voies telles que les solutions administratives ont été suggérées. Le collectif a invité l’Etat à mettre en place un système d’informations foncières, qui permettra de géolocaliser les différentes limites afin que chaque commune ait sa base de données. Cela facilitera l’identification des limites de chaque commune pour avoir des délibérations moins contestées.