Panel – Place de la critique littéraire : La leçon du Pr Andrée Marie Diagne

La critique littéraire, tout en étant l’archéologie de la littérature, apporte quelque chose de fondamental en matière de pédagogie et de diffusion des livres. L’Association de la presse culturelle du Sénégal (Apcs) et le groupe «Nous aimons lire» ont saisi au volet un panel sur le thème : «La critique littéraire : pluralité des perspectives et place dans la chaîne du livre», pour encore donner forme à cette envie de lire et d’écrire qui, actuellement, est partout présente, mais aussi réfléchir sur les nouveaux enjeux de la littérature. Par Ousmane SOW –
«La critique littéraire : pluralité des perspectives et place dans la chaîne du livre.» C’est le thème du panel organisé samedi dernier, à l’Auditorium du Musée de civilisations noires, par l’Association de la presse culturelle du Sénégal (Apcs) et le groupe «Nous aimons lire». La thématique titille le pédantisme et l’afféterie. Mais sa réflexion est pourtant intéressante et répond à un besoin des éditeurs, journalistes, écrivains et libraires…, bref, pour le grand public. La critique littéraire, tout en étant l’archéologie de la littérature, apporte quelque chose de fondamental d’abord en matière de pédagogie, mais aussi pour la diffusion des livres. Mais en même temps, la critique est l’objectivation de sa propre subjectivité, une façon de justifier sa sensibilité, son propre regard. Evidemment, il y a un travail à faire avant la critique. Et la perspective choisie par l’Apcs et le groupe «Nous aimons lire» était de voir la «critique» à travers tous les membres de la chaîne du livre, pour permettre de mettre en lumière le rôle de chacun d’eux et peut-être aussi se démarquer de certaines choses dites conventionnelles.
Dans son intervention, Pr Andrée Marie Diagne, formatrice à la Faculté des sciences de l’éducation et de la formation (Fastef), a invité les journalistes à se former et à s’informer pour pouvoir aborder ce métier de critique parce que, dit-elle, il y a des courants de la critique littéraire qui varient d’une époque à une autre. «Le critique doit être formé et informé pour mieux faire comprendre le livre et tout ce qui est autour du livre. Et je dis bien, n’est pas critique littéraire qui le veut. Critique littéraire, nous avons besoin de vous pour que la porte de l’immortalité ne se ferme pas à nos livres», a déclaré l’enseignante à la Faculté des sciences de l’éducation et de la formation (Fastef). Dès lors, estime-t-elle, l’œuvre littéraire apparaît comme un objet culturel qui a des liens culturels très forts avec tous les secteurs de l’économie. Selon Pr Andrée Marie Diagne, le critique construit son point de vue à partir de sa lecture de l’œuvre. «Attention ! Ne parlez pas de ce que vous n’avez pas lu. On n’a pas le droit de critiquer ce qu’on ne connaît pas. Si un critique se permet d’émettre un texte sans avoir lu, c’est le plus gros péché qu’on ne pardonne pas», fait-elle savoir. La critique est-elle un devoir pour l’écrivain ou le journaliste ? Est-elle un besoin pour le public ? Quelle critique littéraire avons-nous ? A-t-on le droit de se taire quand il y a des choses dans un ouvrage qui ne vont pas ? Pour Andrée Marie Diagne, «réagir, c’est un devoir pour les intellectuels de tout notre continent, parce que notre littérature est un reflet de notre Afrique et que nous devons nous battre pour rattraper les séquelles de la traite des nègres, de la colonisation, du néocolonialisme. Et c’est pour nos peuples que nous avons le devoir de faire cette critique littéraire».
Pr Diagne cite l’exemple de Batouala, le roman de René Maran qui avait remporté en 1921 le Prix Goncourt, le plus prestigieux des prix littéraires français, mais qui avait suscité un tollé de réactions, des écrivains n’ayant pas hésité à critiquer René Maran et lui dire qu’il ne méritait pas le Goncourt. «La critique littéraire a pris naissance à ce moment-là.» Selon le dicton, «la critique est aisée, mais l’art est difficile». Et pour Andrée Marie Diagne, «de là découle que cette critique a sa place dans notre société. Parce qu’elle a une sorte de responsabilité morale», a-t-elle laissé entendre.