Les enfants mendiants des rues sénégalaises sont en majorité des enfants du pays. La première phase du Projet d’appui à la protection des enfants victimes de la violation de leurs droits (Papev) a mis en lumière cette situation. Le projet, qui a permis de retirer de nombreux enfants des rues, s’attaque aussi, pour sa deuxième phase, aux problèmes d’état civil.Par Justin GOMIS –
Les enfants étrangers, qui sont dans la mendicité au Sénégal, sont l’arbre qui cache la forêt. En réalité, ils sont de loin moins nombreux que les enfants sénégalais qui font la manche tous les jours dans les rues. «Ce sont plus des enfants sénégalais qui sont dans les rues», a révélé hier Aminata Kébé, Haut-commissaire des droits de l’Homme au Bureau régional Afrique de l’Ouest, lors de l’atelier de planification et de lancement officiel des activités du Projet d’appui à la protection des enfants victimes de la violation de leurs droits (Papev), financé par la Coopération italienne. D’après la coordonnatrice du Papev, les régions de Dakar et Saint-Louis sont celles qui enregistrent le plus d’enfants mendiants. «Mais ils sont présents dans toutes les régions du Sénégal», poursuit-elle. En dehors de ces enfants, «le Sénégal reçoit aussi des enfants des autres pays», précise-t-elle, en citant la Guinée-Bissau et la Guinée comme les pays les plus représentés.
La première phase du Projet de protection des enfants victimes de la violation de leurs droits a permis de retirer beaucoup d’enfants de la rue. «Après la mise en œuvre de la première phase, le projet a permis aux Etats bénéficiaires de renforcer leur système de protection, de retirer beaucoup d’enfants des rues, de faciliter la réintégration dans leur famille», s’est réjouie Mme Kébé. Selon le magistrat Adama Ndiaye, directeur-adjoint des Droits humains au ministère de la Justice, «ce projet a été d’une grande importance dans la promotion et dans la protection de l’enfance». D’ailleurs, selon lui, c’est la raison pour laquelle tous les ministres qui se sont succédé, ont eu à signer un arrêté instituant un comité national de pilotage. Il s’agit successivement du Pr Ismaïla Madior Fall, Me Aïssata Tall Sall, puis Ousmane Diagne, souligne-t-il pour montrer l’importance de ce projet. Ce qui a poussé le gouvernement du Sénégal à faire une demande d’extension pour une deuxième phase dont le lancement officiel des activités a été fait hier.
Selon Eugenia Pisan, chargée de programmes Genre et droits humains (Aics), des résultats ont été enregistrés pendant la première phase, malgré les difficultés pendant le Covid-19, avec les défis sécuritaires et politiques dans les pays. «On a pu appuyer plus de 3500 enfants directement. On a aidé plus de 48 structures dans les 6 pays de la première phase. On a eu le Code de l’enfant qui a été adopté en Guinée et en Guinée-Bissau. On a eu des accompagnements pour structurer la prise en charge des enfants», a-t-elle cité, tout en reconnaissant qu’il y a des défis auxquels il faudrait répondre. D’après Aminata Kébé, la mise en œuvre de la première phase a permis aux Etats bénéficiaires de renforcer leur système de protection et de retirer beaucoup d’enfants des rues. Mais à la fin de ce projet, il y a eu une rencontre de haut niveau des ministres en charge de la Protection de l’enfant des pays bénéficiaires. «Et lors de cette rencontre, une feuille de route a été élaborée pour identifier les défis restants, notamment l’harmonisation des lois par un système de protection juridique efficace et l’élaboration du Code de l’enfant au Sénégal, la prise en charge psychosociale des enfants dans les pays bénéficiaires.» Mais si l’Etat du Sénégal a formulé la demande pour l’extension de la deuxième phase, c’est parce que l’importance de ce projet n’est plus à démontrer. «Outre les efforts réalisés par le gouvernement du Sénégal dans la protection des droits des enfants à travers les différentes activités que le projet a aidé à organiser l’année dernière, il a permis ce qu’on appelle «Zéro enfant dans les rues». Ça nous a permis de retirer beaucoup d’enfants qui étaient de nationalités guinéenne et bissau-guinéenne, et de procéder à leur retour en famille», a-t-elle dit. Ce projet a également permis d’organiser un atelier de renforcement des capacités des acteurs de la chaine judiciaire (policiers, gendarmes, agents de l’Administration pénitentiaire, magistrats, greffiers, éducateurs spécialisés).
Dans la même veine, des ateliers de renforcement des capacités dans les régions de Saint-Louis, Thiès, Kolda et Kaolack ont été organisés.
Pour cette 2e phase qui vient d’être lancée, il reviendra au comité de pilotage de déterminer les activités à mener. Cependant, il est prévu, pour des enfants sans extrait de naissance, de faire des activités avec la Direction générale de l’état civil, informe le magistrat Adama Ndiaye. «Tous les problèmes que rencontrent ces enfants seront pris en compte dans cette deuxième phase», selon lui.
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