Abdoulaye Faye est décédé samedi à Dakar. A près de 78 ans, ce membre fondateur du Pds a aura été un fidèle de Abdoulaye Wade et défenseur du libéralisme.Par Hamath KANE –

Il était l’autre Abdoulaye qui restait à Abdoulaye Wade, parmi les membres fondateurs du Parti démocratique sénégalais (Pds). Militant fidèle et engagé, défenseur de l’idéal du Sopi dans les années de l’opposition, Abdoulaye Faye a participé à tous les combats de ce parti né en 1974 à Kaolack. Si c’était en football, on aurait dit que le Pds a perdu un défenseur, un libéro. Lui aussi, comme beaucoup d’autres caciques du principal adversaire de Abdou Diouf, a goûté aux emprisonnements post-élections. Lemonde.fr rendait compte du procès de Me Wade le mardi 26 avril 1988 devant la Cour de sûreté de Dakar suite à de violents incidents qui ont éclaté au lendemain de la Présidentielle du 28 février. Et parmi les prévenus, il y avait, en plus du Secrétaire général du Pds, 7 autres libéraux dont Me Ousmane Ngom et Abdoulaye Faye lui-même, tous les deux députés à l’époque. Le journaliste rapportait que le dernier avait 45 ans, donc 78 ans aujourd’hui jusqu’à ce samedi 12 juin 2021. Ce n’est là que l’une des preuves de son engagement auprès de celui qui deviendra président de la République 12 ans après. Alors dans cette première alternance, il fait partie de la task-force de Abdoulaye Wade, comme l’ont été Pape Diop, Idrissa Seck et autres. Il n’occupe pas encore des fonctions nominatives mais reste un homme de confiance de Wade. Aux élections locales de mai 2002, le Pds et ses alliés raflent presque toutes les collectivités dont le Conseil régional de Dakar. Abdoulaye Faye occupe ce fauteuil jusqu’en 2009 lorsque l’opposition, sous la bannière de Benno siggil senegaal, a raflé tout le département de Dakar. Malick Gakou de l’Afp, au nom du partage de la mairie et du Conseil régional entre le Ps et l’Afp, lui succèdera, le 8 avril 2009, jusqu’à sa nomination dans le gouvernement de la deuxième alternance. «Depuis le Saloum où je me trouve présentement en tournée, j´ai appris avec tristesse la disparition du doyen Abdoulaye Faye du Parti démocratique sénégalais. Je voudrais rendre un vibrant hommage à ce grand homme dont je fus le successeur à la tête du Conseil régional de Dakar. Il fut un homme d’Etat doublé d’un homme politique et grand serviteur du Peuple sénégalais», a réagi le leader du Grand parti sur xalimasn.com.

«Laye cravache»
Abdoulaye Faye revient aux côtés de son ami, au Palais présidentiel. Dans ces moments de doute, après la raclée du 22 mars 2009, Wade avait besoin de ses fidèles et de ceux qui lui tiennent un langage de vérité. Un responsable du Pds, sous l’anonymat, confie : «Ablaye était l’un des rares responsables du parti à oser regarder le Président les yeux dans les yeux et à lui dire non. Dieu sait, et je sais, qu’il l’a fait à maintes reprises et dans des contextes les plus sensibles. Quand il n’est pas d’accord, il le dit avec beaucoup de sagesse.» Me Wade avait sans doute commis l’erreur d’investir son fils, Karim, sur la liste de Dakar, contre le gré du maire sortant, Pape Diop. Abdoulaye Faye lui aurait pourtant prévenu en privé, selon des confidences. En mars 2017, lorsque Abdoulaye Wade a décidé d’exclure ses wadistes plus que des libéraux, Farba Senghor et Pape Samba Mboup qu’il disait avoir accueilli au Pds, l’administrateur général du Pds n’a pas hésité à dire non. Et publiquement d’ailleurs. Pour lui, c’était tuer «deux symboles du wadisme». Surtout qu’il revenait à l’enseignant de formation qu’il fut de prendre le bâton, en tant que président de la Com­mission de discipline du Pds. Ces nombreuses sanctions contre les «rebelles» lui avaient valu le sobriquet de «Laye cravache». «Il fallait engager des contacts directs avec les mis en cause, les entendre dans la semaine, rendre compte avant de prendre une quelconque décision. La bonne option n’était pas de les exclure. Une telle décision n’est pas opportune surtout dans le  contexte actuel», déclarait-il. C’est ainsi qu’il conseillait Mboup et Senghor, qui ont rejoint Macky Sall, d’introduire un recours auprès du Secrétariat national. C’est en octobre 2019 que Me Abdoulaye Wade a procédé à un remaniement de la Commission de discipline. C’est ainsi que Daouda Niang, maire de Rufisque, a remplacé Abdoulaye Faye dont la santé était devenue chancelante. En octobre 2015, il appréciait l’appel du porte-parole du Khalife général des mourides à des retrouvailles entre Wade et Sall. Et dans L’Observateur, Abdoulaye Faye y souscrivait mais relevait qu’il y avait des «goulots d’étranglement à ces retrouvailles». «Il appartient à tous ceux qui se sentent concernés de faire table rase de certaines choses et d’aller vers l’essentiel qui consiste à reconstruire la famille libérale. Je ne m’inscris pas dans la dynamique de parler de l’arrestation de Karim Wade comme goulot. Je dis juste que nous sommes intéressés par ces retrouvailles, car notre Secrétaire général l’a déjà indiqué et nous travaillons à sa concrétisation», avait-il souligné. Avec Idrissa Seck et des responsables du Pds comme Oumar Sarr, il y a des retrouvailles entre Libéraux. Mais, Abdoulaye Faye ne sera pas témoin d’éventuelles retrouvailles de la famille libérale, tant que Wade ou son fils, Karim, ne s’allieront pas avec Macky Sall.
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