Si les profondeurs marines sont splendides, on risque de se noyer si l’on y reste trop longtemps. Ousmane Sonko, qui est dans une logique de jumelage avec les leaders politiques et étatiques qui ont les mêmes visions que lui, a amené dans ses murs un invité dont le discours fera jaser. A l’Ucad hier, Jean-Luc Mélenchon a prononcé un discours pro-gay devant des étudiants. Ils l’ont escorté d’applaudissements.Par Bocar SAKHO – 

Jean-Luc Mélenchon va devenir un invité encombrant pour Sonko. A l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, le fondateur de La France insoumise ne s’est pas caché pour faire la promotion de l’homosexualité. Il dit : «Je suis le premier législateur français qui ait déposé un texte de loi à propos de la possibilité du mariage homosexuel…» Puis, il ajoute pour faire un plaidoyer : «Mais je penserais que cette liberté d’amour devrait être ouverte à tous.» Les étudiants, qui avaient conspué le Recteur Ahmadou Aly Mbaye, pour des raisons liées sans doute à la longue fermeture des campus social et pédagogique de l’Ucad, applaudissent le leader politique français, invité de marque du parti Pastef qui lui a déroulé le tapis rouge.

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«Sur ce phénomène particulièrement, je voudrais dire que le Sénégal et d’autres pays africains ne peuvent accepter une quelconque velléité de leur imposer la légalisation de ce phénomène», a répondu le Premier ministre pour essayer de tuer sur le champ d’éventuelles polémiques, qui seraient mal venues pour ce régime débutant. Et aussi une manière de montrer qu’il n’a pas l’intention de réviser sa position sur cette question.

Mais, ce plaidoyer en faveur des Lgbt+ de son invité de marque va être un caillou dans la chaussure de M. Ousmane Sonko. Du temps de l’opposition, il avait soutenu sans ciller : «Si je suis élu Président du Sénégal, la loi criminalisant l’homosexualité sera l’une des premières que je ferai voter.» Le discours de Sarkozy à Dakar le 26 juillet 2007, qui avait soutenu à l’Ucad 2 que «l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire», avait fait un tollé dans le monde intellectuel et universitaire africain. Celui de Dakar aussi du député français d’hier dans le Temple du savoir, où s’étaient massés des étudiants-militants, qui n’ont pas mesuré sa portée, va continuer aussi à résonner dans l’amphithéâtre de l’Ucad 2. Bien sûr, il risque de provoquer aussi des réactions outrées des défenseurs de la morale publique. Ils s’étaient plaints de la visite de Charles Michel à Dakar après son audience avec le Président Diomaye Faye à cause de ses positions pro-gay. Que vont-ils à nouveau dire ?

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Macky Sall s’était aussi retrouvé dans le viseur de certains, lors de la visite à Dakar de Barack Obama en 2013, à cause de cette phrase qu’il avait prononcée devant le Président sénégalais : «Le Sénégal n’est pas prêt à légaliser l’homosexualité. C’est l’option du Sénégal, tout en respectant le droit des homosexuels. Mais nous ne sommes pas disposés à lever cette loi. C’est une question qu’il faut laisser à la société, qu’elle réglera en fonction de l’évolution des mentalités. La dépénalisation de l’homosexualité, c’est comme la peine de mort. Les avis sont partagés là-dessus. Nous avons aboli la peine de mort depuis des années au Sénégal, mais d’autres pays non. Le Sénégal est un pays tolérant, mais pas prêt à légaliser l’homosexualité. Sur cette question, il n’y a pas de modèle fixe applicable à tous les pays.» Pour Mélenchon, si… Car c’est une question de «liberté d’amour qui doit être ouverte à tous».
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