Une des propositions phares du Sommet des leaders des médias africains a été la création prochaine d’un média continental pour vendre au monde une Afrique positive. Cette initiative compte dans ses rangs le président de la Banque africaine de développement comme militant, qui s’est engagé à trouver les voies et moyens pour financer cette initiative.

A l’heure où la production d’information n’est plus l’apanage exclusif des médias, avec une multiplication des acteurs et la diversité des plateformes, l’Afrique sombre davantage dans le spectre du traitement déséquilibré de l’information concernant notre continent. L’Intelligence artificielle et les réseaux sociaux impulsent une transformation des médias qui mérite d’être adressée. Mais celle-ci ne pourra se faire en occultant que dans la fabrique mondiale de l’information, l’approche pour parler de l’Afrique est biaisée dès le départ. C’est à cet effet que le président du Forum des leaders des médias d’Afrique (Amlf), Amadou Makhtar Ba, considère, lors de la conférence inaugurale des assises des éditeurs africains à Nairobi, qu’il n’y a rien de plus important pour un média que de disséminer son contenu à travers le monde. Mais, cela se fait dorénavant avec un sentiment de frustration et d’incertitude selon M. Ba, parce qu’on a énormément de mal à distinguer le vrai de l’irréel.

Les challenges de la désinformation et le spectre des fake news se posent en obstacles majeurs pour les médias partout en Afrique, avec une concurrence déloyale d’une multitude d’acteurs générant du contenu. A moyen et long termes, ce qui est créé est une désinformation systématique, avec une information portant sur l’Afrique biaisée au départ ou vendant une image de l’Afrique qui n’arrange guère ses fils. Il y a une guerre d’information qui a cours dans le monde et pour plusieurs responsables de médias présents au sommet Amls 2024, l’Afrique ne doit pas perdre ce front. Les plus grandes victoires comme les plus grandes défaites se jouent aujourd’hui sur le champ médiatique à l’ère de l’information. Il est évident que l’Afrique, en tant que continent, aura assez prêté le flanc pour que scripts et discours sur son quotidien soient entre les mains d’acteurs hors du continent.

Le président de la Banque africaine de développement (Bad), le docteur Akinwumi Adesina, face aux inquiétudes des acteurs des médias africains, conseillera qu’il n’y a aucun intérêt à fuir une réalité des faits ou baser des reportages et du contenu sur ce qui n’est pas factuel. Il pense néanmoins, en donnant l’exemple de sa structure et de ses performances toute cette dernière décennie, que l’information véhiculée est importante dans la perception pour aider au progrès. C’est parce que l’information positive et objective sur l’Afrique est bien véhiculée qu’il sera possible d’augmenter les opportunités pour l’Afrique pour consolider la dynamique d’essor.

Au terme d’une présentation magistrale sur l’état des médias en Afrique, il prendra l’engagement avec la Banque africaine de développement (Bad) en invitant l’Africa Import-Export Bank et les différentes institutions régionales à mettre à disposition des ressources pour créer un média international de qualité afin de présenter l’information de l’Afrique au monde. Cette initiative permettra, de l’avis du Dr Adesina, que l’Afrique présente au monde le discours sur elle et valorise ses potentialités et opportunités. Cette proposition n’a pas manqué de faire des enthousiastes qui la voient comme un chaînon manquant et essentiel dans l’avenir des médias en Afrique.

Les autorités kényanes présentent à la manifestation et donnant l’exemple des stations-radios présentes dans leur pays (299 chaînes de radio dont 70 opérant dans un même bassin régional) ont insisté sur la nécessité de créer des synergies entre acteurs des médias africains pour développer cette industrie partout en Afrique et éviter la logique de concurrence à outrance. C’est en créant des synergies que l’information la plus exhaustive et complète pourra être donnée.

Les dirigeants africains ont pris rendez-vous avec l’histoire, espérons qu’un jour un média continental de qualité et avec les moyens, comme le souhaite le Dr Adesina, verra le jour. Pour citer son compatriote, Chinua Achebe, les histoires de chasse seront à la gloire des lions, le jour où ceux-ci auront leurs historiens.
Par Serigne Saliou DIAGNE
saliou.diagne@lequotidien.sn (Envoyé spécial à Niarobi)