Plaidoyer pour une revalorisation des pensions de retraite

Depuis l’avènement des augmentations sans précèdent des salaires du secteur public décidées par le régime sortant, notamment dans l’éducation, du préscolaire à l’université, où les émoluments ont été doublés, des voix s’élèvent pour demander une revalorisation des pensions de retraite.
Aussi note-t-on une différence considérable des pensions dans un même corps pour deux agents admis à faire valoir leurs droits à une pension de retraite avec le même grade et la même situation de famille. En conséquence, ceux-là qui s’estiment «lésés» réclament à cor et à cri, une harmonisation. Est-ce-possible ?
Ce sont les textes règlementaires qui régissent les carrières, les devoirs et droits des personnels en service dans une administration, qu’elle soit publique ou privée, qui répondent à cette interrogation. Ceux-ci évoluent naturellement en fonction des circonstances.
La loi n°81-62 du 10 juillet 1981 relative aux pensions civiles et militaires, modifiée par la loi n°2002-8 du 22 février 2002, prévoit, et encore en ses articles 1, 2, 3, 4, 6, 7, 8, 9, 10, 11 et 12 notamment, les conditions et procédures requises pour l’ouverture d’une pension de retraite au profit : des fonctionnaires régis par les dispositions de la loi n°61-33 du 15 juin 1961, des enseignants des universités régis par la loi n°81-69- du 9 novembre 1981, des veuves et orphelins de ces différentes catégories de personnels de l’Administration publique.
L’admission à la retraite est prononcée par l’autorité investie du pouvoir de nomination soit à la demande du fonctionnaire, soit d’office, ou alors parce que l’agent concerné est frappé par la limite d’âge.
Elle donne droit à une pension qui peut se définir comme allocation pécuniaire personnelle et viagère, c’est-à-dire à vie -accordée aux fonctionnaires et, après leur décès, à leurs ayants cause désignés par la loi, en rémunération des services qu’ils ont accomplis jusqu’à cessation régulière de leurs fonctions.
Le montant de la pension -et c’est ce qui attire l’attention de certains collègues inspecteurs ayant noté une différence substantielle entre les pensions de 2016 et les actuelles-, qui tient compte du niveau, de la durée, ainsi que la nature des services accomplis, devrait avoir pour vocation de garantir, en fin de carrière à son bénéficiaire, des conditions matérielles d’existence en rapport avec la dignité de sa fonction.
Les agents concernés SUPPORTENT tout au long de leur période d’activité, une RETENUE de 12% sur les sommes payées au titre des EMOLUEMENTS de base composés par les éléments suivants : la solde indiciaire, le complément spécial de solde, l’indemnité de résidence, l’indemnité différentielle dégressive en cas de changement de corps, l’indemnité d’enseignement instituée par le décret n°62 du 10 mai 1962 et, pour ce qui concerne les enseignants des universités, l’indemnité spéciale Recherche/formation (article 61 bis de la loi n°92-37 complétant la loi n°81-59 du 9 novembre 1981), les augmentations et ajustements de salaire.
Remarquons que ces dispositions règlementaires évoluent naturellement en fonction des circonstances. C’est le cas des augmentations spectaculaires des salaires du préscolaire à l’université -presque le double- qui, immanquablement, auront des incidences significatives sur les pensions de retraite. Une des raisons explicatives de la différence des pensions de 2016 et celles qui ont suivi.
Aussi, la pension proportionnelle est-elle acquise sans condition d’âge ni de durée -à la demande de l’intéressé- pour invalidité résultant ou non de l’exercice de ces fonctions sans conditions de durée de service à ceux qui, se trouvant dans une condition valable pour la retraite, atteignent la limite d’âge de leur emploi sans pouvoir prétendre à une pension d’ancienneté ; sur demande, aux fonctionnaires qui ont effectivement accompli quinze années de services.
L’article 4 du code précise les exigences liées au bénéfice d’une pension d’ancienneté. Celle-ci est acquise lorsque se trouvent réunies les deux conditions d’âge, 60 ans ou, selon le cas, 65 ans -et de durée des services 30 années accomplies- au moment de la cessation des activités.
Sont cependant dispensés de la condition d’âge, les fonctionnaires : reconnus hors d’état de continuer l’exercice de leurs fonctions après avis de la Commission administrative de réforme ; licenciés pour suppression d’emploi ou insuffisance professionnelle ; révoqués sans suppression des droits à pension.
La condition de durée peut être réduite de cinq années et arrêtée à 25 ans, lorsqu’il s’agit d’emplois présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles. Des bonifications de service sont accordées à la femme fonctionnaire à raison d’un an par enfant dans la limite de 3 enfants déclarés à l’état civil.
Quels sont les services pris en compte dans la constitution du droit à pension ? Ils sont au nombre de cinq : les services accomplis à partir de l’âge de 18 ans en qualité de fonctionnaire ; les services de stage rendus à partir de l’âge de 18 ans ; les services militaires accomplis à partir de 18 ans ; les services accomplis dans les emplois permanents des organes régionaux, des administrations commerciales et des établissements publics ; les services des fonctionnaires détachés.
Il faut cependant noter qu’aucun service accompli postérieurement à la limite d’âge ne peut être pris en compte dans une pension. Voir circulaire 1380/PN/MN ET du 17 mai 1993 relative au maintien dans leur fonction des enseignants titulaires de classe frappés par la limite d’âge dans le courant de l’année scolaire.
Comment calcule-t-on la pension ?
Le montant de la pension est calculé sur l’ensemble des services effectués par le fonctionnaire au moment de son admission à la retraite. Il est également dépendant de la moyenne des émoluments soumis à retenue durant les trois dernières années précédant l’admission à la retraite -cf. l’article 28 nouveau- auxquelles on applique le taux de 1.80 que l’on multiplie par le nombre d’annuités liquidables avec un maximum de 37 années et demie ; soit (1.80 x 37,5) / 100 = 67, 5%.
Les veuves des fonctionnaires ont droit, sous réserve de conditions d’antériorité du mariage, à une pension égale à 50% de la pension obtenue par le mari où qu’il aurait pu obtenir au jour de son décès, et augmentée, le cas échéant, de la moitié de la rente d’invalidité dont il aurait pu bénéficier.
Chaque orphelin a droit jusqu’à 21 ans ou à vie, s’il est atteint d’une infirmité le mettant dans l’incapacité de gagner sa vie, à une pension égale à 10% de la pension obtenue par le père ou qu’il aurait pu obtenir au jour de son décès, et augmentée, le cas échéant, de 10% de la rente d’invalidité dont il bénéficiait ou aurait pu bénéficier sans que le total de la pension de veuve et des orphelins puisse excéder le montant de la pension et, éventuellement, de la rente d’invalidité ou qui aurait été attribuée au père.
Les pensions sont payées mensuellement. Aussi, le montant définitif de la pension annuelle est-il arrondi au franc supérieur de manière à la rendre divisible par 12 s’il ne l’est pas.
Les pensions et rentes viagères d’invalidité sont incessibles et insaisissables, sauf en cas de débet envers l’Etat ou ses démembrements, ou pour créances privilégiées aux termes du Code civil. Les fractions applicables sont respectivement 1/5 et 1/3 -pour les pensions alimentaires- cumulables. Les retraités bénéficient, ainsi que leurs familles, de prestation de maladies relatives à la sécurité sociale.
Deux innovations substantielles ont été introduites par la réforme du 22 février 2002 : le délai de prescription pour pension et rente viagère d’invalidité préalablement fixé à 5 ans à partir de la date de notification de la mise en retraite, de la radiation des cadres ou pour les ayants cause, du jour du décès du fonctionnaire a été supprimé par l’article 69 nouveau -cf. la loi n°2002-8 du 22 février. Sont désormais prévus : une jouissance pour compter de la date de dépôt de la demande de pension présentée au-delà du délai de cinq ans ; un rappel d’une année d’arrérages pour celle réduite dans le délai de cinq ans ; la suppression totale du délai de prescription pour les demandes dont le retard n’est pas imputable au fait personnel du pensionné.
Voilà globalement dressé, jusqu’au moindre détail, le processus de mise au point de la pension de retraite civile et militaire, du calcul au paiement mensuel. En conséquence, compte tenu de la vie qui devient de plus en plus chère et du pouvoir d’achat qui, chaque jour, baisse davantage, j’invite les autorités à revaloriser les pensions dès que la situation économique et financière l’autorisera.
Yakhya DIOUF
Inspecteur de l’Enseignement élémentaire à la retraite