Plaidoyer – Sites, monuments historiques, fouilles et découvertes : Pour une loi qui vise le patrimoine culturel dans son ensemble

La loi 71-12 du 25 janvier 1971, fixant le régime des sites et monuments historiques et des fouilles découvertes, est à revoir. Cette loi est héritée de celle de 1956 qui est française et «obsolète», et qui ne vise que les monuments historiques en titre 1 et 2, les fouilles et découvertes, a révélé hier Abdoul Aziz Guissé, directeur du Patrimoine culturel, au cours d’un atelier de consultation national.Par Ousmane SOW
Pour une révision et mise à jour des termes de la loi 71-12 du 25 janvier 1971, une rencontre s’est tenue hier à la Place du Souvenir. Elle regroupait des universitaires, acteurs culturels et agents administratifs compétents dans la gestion du patrimoine culturel matériel pour une réelecture critique et des propositions adaptées à une réforme de cette loi. A en croire le directeur du Patrimoine culturel, il y a beaucoup d’enjeux qui font que cette loi mérite d’être révisée pour qu’on puisse viser de manière globale notre patrimoine culturel pour mieux le préserver. Abdoul Aziz Guissé en est ainsi arrivé au constat suivant : «Au fond, vous savez aussi bien que moi qu’une loi de 1971, je ne peux pas le dire, mais elle est obsolète. C’est le terme que l’on utilise souvent. Mais une loi pour moi, elle est applicable, quelle que soit sa nature. Et il est aujourd’hui évident que cette loi, qui est héritière de la loi de 1956 qui est une loi française, ne vise que les monuments historiques en titre 1 et en titre 2, les fouilles et découvertes». «Est-ce que notre patrimoine se limite effectivement à ces monuments historiques qui, pour l’essentiel à l’époque, concernaient le patrimoine colonial, qu’on le veuille ou non ?», s’interroge, M. Guissé. Ce qui fait que l’objectif général de l’atelier, organisé à cet effet, était effectivement de revisiter cette loi qui date de 1971 et d’intégrer toutes les conventions que le Sénégal a eu à ratifier entre-temps, mais aussi tous les outils pour une meilleure conservation du patrimoine culturel.
Abdoul Aziz Guissé rappelle : «Nos lieux de mémoire, nos lieux sacrés, notre patrimoine culturel immatériel, cette convention de 2001 sur le patrimoine subaquatique que nous venons de ratifier sont autant d’éléments qui nous obligent à revoir cette loi qui ne répond plus actuellement dans un environnement qui est en plus marqué par des mutations économiques fortes et une urbanisation qui fait qu’on n’a plus les traces de notre patrimoine matériel.»
Compte tenu de tout cela, le directeur du Patrimoine culturel affirme que «cette loi, si elle doit être une sur le patrimoine dans sa globalité, ne doit pas viser seulement les sites, les monuments historiques et les fouilles et découvertes. Elle doit être une loi qui vise le patrimoine culturel dans son ensemble, autant matériel et immatériel».
Demba Faye, directeur de Cabinet du ministre de la Culture et de la communication, abonde dans le même sens. «La loi 71-12 du 25 janvier 1971, fixant le régime des sites et monuments historiques et des fouilles découvertes, doit être révisé afin de pouvoir intégrer toutes les conventions que le Sénégal a eu à ratifier entre-temps, telles que la convention de 2003 et 2001 relative aux sites aquatiques.»
Guiomar Alonso Cano, conseillère régionale section Culture du Bureau régional de l’Unesco à Dakar, de son côté, admet que «ce processus de révision des lois permet également d’améliorer les autres outils du patrimoine comme l’autorisation des fouilles archéologiques ou le certificat d’exportation des biens culturels pour qu’ils puissent sortir légalement du pays, car le Sénégal est devenu une porte de sortie des biens culturels de toute l’Afrique». Par ailleurs, elle ajoute que pour redonner des résultats significatifs sur l’amélioration des mécanismes de protection du patrimoine culturel au Sénégal, «l’Unesco est déterminée à accompagner le Sénégal dans la préservation et le développement du patrimoine culturel historique qui peuvent enfin être interprétés comme une vraie mise en œuvre de la Charte de la renaissance africaine».
Stagiaire