Dakar a abrité la première édition du Dakar Music Expo (Dmx) du 28 janvier au 02 février. Ces nouvelles rencontres ont réuni quelques professionnels du secteur de la musique pour discuter, partager des expériences et découvrir des jeunes talents. La Colombie, invitée d’honneur de cette édition, était il y a quelques années au même niveau que le Sénégal. Aujourd’hui, près de 800 concerts de groupes colombiens sont notés dans le monde entier. Cédric David, manager et producteur, est un témoin privilégié de cette évolution. Il raconte cette expérience dans cet entretien en marge d’un des panels du Dmx.

Entre 80 et 100 groupes colombiens tournent actuellement dans le monde. Pour en arriver là, vous avez dû passer par différentes étapes. Quelles sont-elles ?
C’est un processus depuis une quinzaine, une vingtaine d’années où la Colombie a commencé à croire en son potentiel et à développer de nouvelles musiques. C’est ce qu’on appelle le phénomène des nouvelles musiques colombiennes (Nmc). Ce sont ces jeunes qui ont retouché les musiques colombiennes en les mélangeant avec de nouveaux instruments, en apportant de l’électronique, en mélangeant le hip-hop avec les rythmes traditionnels et grâce aussi aux marchés culturels, comme aujourd’hui le Dmx à Dakar, pendant lesquels les artistes rencontrent des programmateurs qui ont commencé à les inviter sur leurs marchés respectifs. Et aussi grâce au talent d’interprétation de ces artistes. C’est un peu comme l’Afrique en fait. Les gens apprécient la qualité musicale des groupes africains, ils apprécient aussi les groupes colombiens. Il y a une vraie richesse et la Colombie est un des pays les plus riches musicalement en Amérique du Sud. Vous avez Cuba, le Brésil et la Colombie qui sont très bien. Et petit à petit, ça crée des envies, ça professionnalise aussi un secteur. Les managers, les producteurs, les musiciens apprennent à optimiser leurs talents et leurs apprentissages dans ces tournées et maintenant, c’est un pays très demandé avec des dizaines de genres musicaux, pas seulement la Salsa et la Cumbia. Il y a plein de musiques, plein de régions et toutes les musiques rencontrent maintenant leur marché.
Autour de cette richesse musicale, il y a eu des organisateurs, des managers qui ont contribué à cette dynamique…
On dit que l’union fait la force. On s’entraide beaucoup. On travaille ensemble, on se passe des contacts. Si on a fait une tournée dans un pays, on raconte à l’autre pour qu’il fasse aussi la tournée. On bénéficie aussi de certaines aides du gouvernement qui peut financer une partie des coûts ou nous aider à aller assister à des marchés comme le Dmx. Les ambassades aussi en Europe. Deux, trois ambassades qui disent si vous êtes en Europe, on va faire une date soit au sein de l’ambassade ou un évènement allier entre différentes ambassades. On arrive donc à faire des tournées de plus en plus grandes. Je ne sais pas combien de concerts par de groupes colombiens à l’extérieur mais c’est certainement au-delà de 500 à 800 concerts, voire plus.
La Colombie est l’invitée d’honneur de cette première édition du Dmx. Quelles leçons pouvons-nous tirer de vos expériences ?
J’espère faire un petit peu ce qu’on a fait, être un peu stratégique, s’organiser pour travailler ensemble, de croire en son potentiel, en une identité sénégalaise et africaine qui est une richesse. Autant dans la partie musicale que dans la partie de la gestion culturelle, j’espère que le gouvernement sénégalais comprenne l’intérêt pour lui-même de promouvoir les musiques sénégalaises parce que ça aide à véhiculer une image positive du Sénégal, à attirer des touristes, à avoir un vrai secteur dynamique et productif qui génère de l’argent autant pour ceux qui y travaillent et pour l’Etat qui reçoit des impôts. Mais ce n’est pas seulement le Sénégal qui doit apprendre de la Colombie. C’est toujours une histoire de partage.