Que représente cet hommage que la Fac de Droit vous a rendu aujourd’hui ?
Je suis animé par un sentiment de satisfaction et de fierté. La première reconnaissance, c’est celle qui vient de vos pairs, de vos étudiants ou de votre milieu professionnel. Je suis très content et fier que les étudiants m’aient choisi lors de la 3ème édition du Forum des études politiques pour me rendre hommage. En réalité, ils voulaient le faire depuis l’année dernière mais c’est moi qui avais des réserves, des appréhensions sur l’opportunité de l’hommage. Je pensais que je suis en milieu de carrière. Il me reste encore beaucoup d’années à travailler à l’université. La conception que j’ai de ma personne, mon humilité et ma modestie faisaient que j’avais quelques réserves. Finalement, les étudiants m’ont convaincu. Je remercie les collègues, que cela soit le doyen, les professeurs, les étudiants, les amis, les docteurs que j’ai formés dans plusieurs pays africains et qui ont fait des témoignages positifs sur ma personne.
Vous êtes aujourd’hui plus occupé par vos charges de ministre conseiller juridique du président de la République et on vous voit de moins en moins à l’université. Pourquoi ce choix ?
C’est votre appréciation. En réalité, je suis toujours à l’université. Je suis responsable de la formation doctorale au niveau de l’école doctorale. Je reçois les étudiants pour leur donner des conférences de méthodes, c’est-à-dire comment faire une thèse. J’anime aussi un cours en sciences politiques. Je continue toujours à encadrer des thèses en doctorat. J’en ai encadré une trentaine. J’ai un pied à l’université et un autre dans la pratique en ma qualité de ministre conseiller juridique du président de la République et président du Comité Itie. Je n’ai ni abandonné ni quitté l’université. J’essaie de faire une répartition équilibrée pour ne pas dire équitable entre l’université et l’extra-universitaire.
Quelle appréciation faites-vous de la modification de l’article L78 du Code électoral intervenue jeudi dernier à l’Assemblée nationale ?
Quand il y a un problème qui est réel et susceptible de menacer le processus électoral -soit en rendant compliqué le déroulement des opérations de vote électoral, soit en décourageant les électeurs à se rendre aux urnes-, il est impératif et nécessaire que les acteurs discutent pour essayer de voir comment anticiper et faire en sorte qu’il n’y ait pas beaucoup de désagréments au niveau de la tenue du scrutin. Les acteurs l’on fait sous la supervision de la Cena. Cela s’est très bien fait. Je crois que la Cena était bien placée pour faire ce travail parce qu’elle est le superviseur et l’observateur indépendant des élections. La Cena a arbitré ce dialogue et il y a une décision adoptée par la majorité des coalitions présentes. Il n’y avait peut-être pas eu d’unanimité mais une majorité. La question qu’on doit se poser, c’est est-ce que cette mesure va contribuer à faciliter l’organisation du scrutin et à atténuer les effets négatifs de la présence de 47 listes aux Législatives ? Je pense que si on est raisonnable, objectif et lucide, on peut dire que c’est une mesure qui peut contribuer à limiter les effets négatifs de la pléthore de listes.
Mais sur le plan juridique, cette réforme ne viole-t-elle pas le Protocole additionnel de la Cedeao qui, dans son article 2, dispose qu’«aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les 6 mois précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques» ?
Je pense qu’il faut évoquer la lettre et l’esprit de ce Protocole additionnel de la Cedeao. L’esprit de ce protocole, c’est de faire en sorte qu’il n’y ait pas la possibilité pour une majorité de prendre des mesures unilatérales qui menacent le processus démocratique ou la crédibilité des élections. Une mesure invitant les électeurs à prendre au moins 5 bulletins ne me semble pas être une mesure attentatoire ou qui menace la sincérité et la crédibilité du processus électoral. Sous ce rapport, je pense que l’esprit du protocole de la Cedeao est respecté.
Et le secret du vote dans tout cela ?
Il est respecté parce que si tu prends 5 bulletins, personne ne saura pour qui tu vas voter.
Mais on saura pour qui on n’a pas voté…
D’accord. Mais il y a au moins un secret du vote qui est respecté. Vous pouvez me demander si le secret absolu du vote est respecté. Mais est-ce qu’il y a un secret absolu du vote ? Je ne le pense pas.
A vous entendre, on dirait que le recours de l’opposition devant le Conseil constitutionnel est voué à l’échec ?
Je ne peux pas me prononcer sur un recours au niveau du Conseil constitutionnel qui est un organe indépendant. J’ai mon propre point de vue sur la question. Je ne peux pas le développer ici. Je préfère laisser le recours suivre son cours normal.
bgdiop@lequotidien.sn