Fondateur de la Sedima, Babacar Ngom, 63 ans, qui mène une
carrière tranquille depuis plus de 40 ans, est aujourd’hui au cœur de plusieurs controverses.
On a tous grandi avec la légendaire histoire de Babacar Ngom.
Avec 60 mille F Cfa et 120 poussins, il a fondé Sedima qui est
devenue un empire dans l’industrie de l’agroalimentaire. Cette
fabuleuse histoire est écrite grâce à l’assurance et l’énergie
qui le caractériseront durant toute sa carrière. Mais il est rattrapé par une série de polémiques qui rappellent que la vie d’un homme
est un livre jamais achevé. Entre «googolisant» son nom, les allégations de Aby Ndour et l’affaire des terres de Ndingler apparaissent en boucle. Au crépuscule d’une carrière menée dans la discrétion, ça laisse forcément un goût de cendre dans la bouche.
Il y a le dossier de Ndingler, agité dans un contexte où le débat sur le foncier fait rage dans ce pays. Aujourd’hui, la Sedima est
entre le marteau de Ndingler et l’enclume de Djilakh, villages
situés dans le département de Mbour où la tension est palpable.
Les deux patelins réclament la paternité des 80 hectares attribués à Babacar Ngom qui devait y installer un projet avicole. «La
population de Ndingler affirme que 75 hectares des 224 hectares
attribués à Babacar Ngom leur appartiennent. Les autorités
administratives n’ont qu’à prendre leurs responsabilités. Nous
contestons avec la dernière énergie le titre foncier de Babacar
Ngom. Ce qui a été attribué à la Sedima est énorme. Pour contester, nous avions organisé une marche en 2013. Il était parti et 6 ans après, il revient avec un titre foncier et cela n’arrange pas la population de Djilakh», détaillent les populations de Djilakh qui
contestent cette attribution. En même temps, les jeunes de
Ndingler revendiquent 80 ha sur les mêmes terres.
Réuni en procédure d’urgence par visioconférence le dimanche
17 mai, le Conseil d’administration du Cis avait demandé le
retrait de cette motion qui «n’a pas fait l’objet d’un examen préalable par aucune des instances appropriées du Cis». Mais il
avait buté sur l’intransigeance de Babacar Ngom qui a vu ce jour la confiance de ses partenaires à son management s’éroder. Ce
jour-là, certains membres du Conseil d’administration se sont
mis d’accord pour poser de manière nette la question de la
gestion du Club des investisseurs sénégalais et de sa gouvernance.
Face à cette situation, les autres membres du Cis avaient décidé de mettre tout à plat, à commencer par les comptes de la
boîte. Dans son édition du 22 mai dernier, Le Quotidien rappelait que plusieurs membres avaient relevé que la boîte, en une année, a consommé plus de 600 millions de francs Cfa en fonctionnement et voudraient comprendre les tenants et les aboutissants. En même temps, la direction exécutive, qui «consomme» environ 18
millions de Cfa par mois, était restée à travers la gorge de plusieurs adhérents qui voudraient aussi y voir clair.
Babacar Ngom, qui semble croire encore à la bonne étoile
qui l’a porté au firmament de l’agroalimentaire, n’a pas su canaliser la colère de ses «amis». Au cœur de la polémique Akilee,
plusieurs «adhérents» avaient démissionné du Cis comme le
patron de la société de sécurité Sagam, Abderrahmane Ndiaye.
Controverses
Pris dans le tourbillon Akilee, Babacar Ngom avait fait son
mea-culpa : «Le Cis est né du besoin de fédérer un large pan
de forces vives de l’entreprenariat sénégalais afin d’impulser
une dynamique capable de définir et de porter les idéaux d’une
nouvelle approche du patriotisme économique. Son objectif est
d’apporter sa contribution au combat national pour l’émergence d’un Sénégal nouveau. (…) Et voici qu’au moment où il
ambitionne de déployer ses ailes dans le ciel des affaires du pays,
le Cis est pris dans une tempête.
La cause : une motion de soutien à une jeune entreprise sénégalaise dont les principaux acteurs sont membres du Cis. Erreur sur le fond comme sur la forme. Sur le fond, je ne connais pas les termes du contrat liant Akilee à la Senelec, et sur la forme nous n’avions pas consulté tous les membres. Je voudrais, humblement, sincèrement reconnaître, ici et maintenant, mon erreur et présenter mes excuses à tous ceux que cela a
dérangé, déplu ou agacé. Mea culpa, maxima culpa !».
Depuis le lancement de Sedima, il avait réussi à mener sa vie professionnelle sur un fleuve tranquille. Mais la vie est un grand
film dans lequel on met du temps à trouver son rôle. Evidemment,
Babacar Ngom ne courait pas après sa place au générique après
avoir accumulé une solide réputation qu’il a enfermée dans un coffre, comme le paysan du conte chinois garde, enfermée, la boîte d’où pourrait s’échapper le dragon. Au crépuscule de sa vie professionnelle, il doit apprendre à affronter les polémiques.
Lui-même admet qu’il flotte un autre air dans notre ère. Il a
décidé de prendre la parole demain pour continuer à entretenir ce mythe qui commence à s’effriter. «Au soir de ma carrière professionnelle et au moment de passer le flambeau à une nouvelle génération, c’est une solide éthique comportementale fondée sur la droiture et le sens permanent de l’effort que j’espère de tout mon cœur leur laisser en viatique dans un monde où les repères ont beaucoup changé et changent nombre d’entre nous», avait-il libellé dans sa note d’excuses au lendemain de l’affaire Akilee dont le dénouement a été électrique.