Situé sur le flanc gauche de la décharge de Mbeubeuss, Diamalaye 2 est un quartier rongé par plusieurs maux engendrés notamment par les nombreux impacts néfastes de Mbeubeuss. Son délégué, Ibrahima Sow, un vieux qui ne ménage aucun effort pour soulager cette «population opprimée». En dépit de ses modestes moyens.Par Alpha SYLLA –

Il est tout sauf effacé. Il suffit de demander la maison de «Sow». Tout le monde peut t’indiquer. A l’état civil Ibrahima Sow, il est le chef de quartier de Diamalaye 2. Entre lui et ce quartier âgé de bientôt quarante ans, c’est une longue histoire d’amour et de dévouement à la cause sociale. A 84 ans, ce vieux, un peu bavard, se dandine, tous les matins, entre les rues de Diamalaye pour s’enquérir des nouvelles de ses voisins. «Je ne peux pas rester chez moi toute la journée dans ma maison. Il faut que je sache ce qui s’est passé, la veille, dans le quartier», déclare-t-il. Son engagement à servir sa cité est inébranlable. Il est prêt à mettre en garde et enter en guerre avec quiconque tente de nuire aux intérêts de son quartier. Ce, même le maire de sa commune, Malika. Il narre, tout enthousiaste : «Nous avions un directeur d’école qui a tout fait pour Diamalaye 2 et ses enfants. Un jour, j’ai appris qu’il devait être affecté dans une autre école. Sur le champ, j’ai appelé et averti le maire qu’il (le directeur) ne bougera pas d’ici, que nous avons encore besoin de lui, après tout le service qu’il a rendu aux habitants. Il n’ira nulle part. Mais ? A ma grande surprise, cette année, une dame s’est présentée devant moi en tant que nouvelle directrice de l’école.» Il s’esclaffe…..

A Kébémer où Ibrahima Sow a vu ses premiers jours, il fréquenta l’école coranique. A l’âge d’adulte, il rejoint la capitale sénégalaise, s’installe Malika et s’active dans le commerce. Au début des années 80, il atterrit à Mbeubeuss pour fonder Diamalaye 2, un quartier près de la triste célèbre décharge logée à Malika. «Quand on est venus ici, il n’y avait rien, que la décharge. Mon frère (Ndlr, premier délégué du quartier) et moi sommes restés malgré les dangers liés à l’insécurité dans le site où vivaient toutes sortes de bandits. C’est nous qui avons bâti ce que vous voyez aujourd’hui, Diamalaye 2», se souvient-il.

Visage malmené par l’âge et les épreuves, bonnet sur la tête, ce vieux passe la majeure partie de son temps dans son quartier, dans sa maison, scotché sur son lit. «Je suis asthmatique. Je tousse tout le temps alors que je continue de respirer cet air pollué», confie-t-il. Ses sorties, il les dédie au règlement des différends entre les habitants qui ne manquent pas de l’’interpeller. Aux côtés de lui, ses deux fidèles compagnons : une radio posée à même le lit et une petite télé qui trône sur une table. Des occupations, il n’en a pas. Ou plutôt, il en a qu’une : Diamalaye 2. Il se vante : «Je suis élu comme Macky Sall. Comme on a porté Macky Sall au pouvoir, les habitants de la cité Diamalaye m’ont élu délégué. Donc, j’ai une obligation envers les populations implantées dans le quartier. Je consacre tout mon temps à ce quartier.» Pour répondre à cette «obligation», il a posé un geste assez symbolique. «Sow a mis à la disposition des populations, un véhicule qu’il a acquiert par ses propres moyens. Ce qui a permis de mettre fin aux ­nombreuses évacuations de malades par charrette dans le quartier», témoigne Dame, délégué adjoint du quartier Diamalaye 2.
De l’autre côté de la localité, des habitants scandent, pourtant, cette amère chanson: «Nous n’avons pas de maire, ni de délégué de quartier.» «Ce sont des frustrés», répond-il, précipitamment. Avec un accent peulh-wolofisé, il explique : «Je les comprends. Certains sont des sinistrés des inondations de la saison écoulée, d’autres des récupérateurs à qui la mairie a pris des terrains pour la construction de poste de santé. Pourtant, j’ai eu à signer et offrir pas moins de quatre-vingt-quatre papiers de maisons à ces gens, alors que chaque terrain vaut vingt mille francs Cfa (20 000 francs Cfa). Juste parce que je me souci de leurs conditions de vie. C’est donc insensé de parler de trahison dans ce cas de figure.»

Claquemuré dans cette maison digne des habitations banlieusardes avec trois femmes, père de quinze enfants, Sow ne se désengage jamais. L’âge n’est pas une barrière pour lui. Il continue de songer, d’espérer et de croire à un Diamalaye 2 meilleur, avec l’ouverture prochaine du poste de santé de la localité dont les constructions sont achevées depuis bien longtemps.