«Tentative de déstabilisation et détournement de deniers publics» sont les deux délits visés par le mandat d’arrêt émis par les autorités ivoiriennes contre l’ancien président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire, Guillaume Soro, dont le vol qui revenait de Paris hier n’a pas finalement atterri à Abidjan, installant une controverse entre ses partisans et les autorités.
L’ancien président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire est appelé à faire face à la justice de son pays. Guillaume Soro fait en effet depuis hier l’objet d’un mandat d’arrêt émis par les autorités d’Abidjan pour «tentative de déstabilisation et détournement de deniers publics». Devant regagner la capitale ivoirienne hier après-midi, M. Soro a dû en fin de compte interrompre son voyage à Accra, la capitale du Ghana.
Pourtant, dans un courrier intitulé «Télégramme-lettre» daté du vendredi 20 décembre 2019 et dont Le Quotidien détient une copie, l’état-major particulier de la Présidence ivoirienne accordait «l’autorisation du survol du territoire et d’atterrissage à l’aéroport Félix Houphouët-Boigny sous le n°1695/Pr/Emp/Sam à un appareil de nationalité allemande». L’avion qui transportait Guillaume Soro et sa délégation avait quitté l’aéroport Paris Le Bourget pour atterrir à Félix Houphouët-Boigny et devait par la suite rallier la ville de Zurich, en Suisse.
Même le ministère de la Sécurité et de la protection sociale, à travers la direction générale de la Police, annonçait par un document officiel «le retour en Côte d’Ivoire le lundi 23 décembre 2019 de Monsieur Soro Guillaume, ex-président de l’Assemblée nationale, et président du mouvement Génération des peuples solidaires (Gps)». La Police nationale indiquait qu’appuyée des autres forces, elle «prendra les dispositions sécuritaires nécessaires pour assurer le service d’ordre et de sécurité en empêchant tout attroupement». Une mesure dictée par le «contexte actuel marqué d’une part par les fêtes de fin d’année, d’autre part les menaces et attaques terroristes et les mouvements d’humeur d’associations politiques et d’organisations de la société civile dans lequel intervient ce retour».
Les interrogations ne manquent après le constat de l’absence d’atterrissage de l’appareil transportant l’ex-président de l’Assemblée nationale ivoirienne. Dans deux vidéos, on voit des frères de Guillaume Soro constater qu’ils sont privés d’accès à la résidence de leur aîné. Dans le cadre des préparatifs du retour de Soro, il y a eu même la tenue de «deux réunions préparatoires les 13 et 17 décembre 2019 à la salle de conférences de la Préfecture de police d’Abidjan avec les organisateurs conduits par le ministre Alain Lobognon et Monsieur Meité Sindou. Elles étaient présidées par Monsieur le Préfet de police d’Abidjan». Comme mesures, il avait été préconisé, entre autres, d’«empêcher tout regroupement de foule sur tout l’itinéraire de l’aéroport Félix Houphouët-Boigny au domicile de Soro Guillaume sis à Marcory résidentiel». Mais aussi d’«observer les mouvements de foule sur tout l’itinéraire sus indiqué afin d’interpeller tout fauteur de trouble, (et de) renforcer les mécanismes de veille et de traitement des menaces (…)».
Abidjan n’a «en aucun cas empêché l’atterrissage»
Du côté du Gps, on soutient que l’avion de Guillaume Soro a été empêché d’atterrir par les autorités. Plusieurs membres du parti de Soro dont Alain Lobognon, membre fondateur du Gps, auraient été arrêtés par la gendarmerie à l’issue du point de presse tenu à leur siège, d’après leurs avocats. Mais dans un communiqué daté d’hier dont Le Quotidien a aussi obtenu copie, le directeur général de l’Aviation nationale civile ivoirienne informe qu’«en aucun cas, les autorités ivoiriennes n’ont empêché l’atterrissage» du vol transportant l’ex-président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire. Sinaly Silue renseigne qu’au cours du vol de la compagnie Mhs aviation Gmbh «qui a débuté ce lundi 23 décembre 2019 à 7h Gmt (8h à Paris), Monsieur Guillaume Kigbafori Soro a de son propre chef, par l’intermédiaire de Monsieur Amer Mouja, représentant l’agence Trip support services, demandé que l’avion le transportant qui survolait le Burkina Faso, soit dérouté vers Accra». «Les autorités ivoiriennes lui ont confirmé l’autorisation de se poser à Abidjan, mais malgré ces assurances, Monsieur Guillaume Kigbafori Soro a dérouté le vol sur l’aéroport d’Accra où il s’est posé à 14h 16 mn», fait savoir le Dg de l’Aviation nationale civile ivoirienne.