Le Sénégal est réputé en tant que pays, dans beaucoup de domaines avant-gardistes, hors du commun et producteur fécond d’idées nouvelles suffisamment innovatrices au point d’être taxé par nos concitoyens africains de laboratoire d’idées où il faut aller puiser, chaque fois que de besoin, pour impulser son développement économique, social et culturel.
Après avoir élaboré et mis en œuvre la Stratégie de réduction de la pauvreté (Dsrp) de 2003 à 2010, et la Stratégie nationale de développement économique et social pour la période 2013-2017 (Sndes), le Sénégal, sous le régime de M. Macky Sall, président de la République, a conçu le Plan Sénégal émergent (Pse) qui est un cadre de référence de l’action gouvernementale à moyen et long termes.
En effet, tout le travail que nous accomplissons dans nos administrations publiques est fait en langue française. Notre langue de travail. Mais une langue qui est à la fois proximité et distance. Proximité, parce qu’elle est un véhicule de savoirs et de valeurs universels. Distance, parce qu’elle nous éloigne de nous-mêmes par l’aliénation.
Bizarrement, le plan Sénégal émergent, la Couverture maladie universelle, la Bourse de sécurité familiale, et la Carte d’égalité de chances, dénominations de «politiques publiques» phare du président de la République M. Macky Sall sont sans équivalents dénominatifs en langue nationale Wolof. Ce qui ne facilite pas le travail aux communicants chargés de les faire comprendre aux populations.
Plan Sénégal émergent
Il traduit sans équivoque, une ambition politique pour le Sénégal clairement exprimée par le président de la République, M. Macky Sall. Cependant, lu ou dit en langue française, le plan Sénégal émergent constitue à la fois un obstacle à la compréhension générale du concept et à l’intériorisation de celui-ci par les différentes couches de la population sénégalaise.
Adopté en novembre 2012, le Plan Sénégal émergent (Pse) vise l’émergence économique à l’horizon 2035 en favorisant une croissance économique à fort impact sur le développement humain. Pour y arriver, le Sénégal se doit de consolider ses acquis, améliorer la gouvernance démocratique, et recentrer les priorités en vue de garantir durablement la stabilité économique, politique et sociale.
Le Plan Sénégal émergent (Pse) est une ambition nationale de développement, jamais initiée par un gouvernement des régimes précédents à celui du président de la République, M. Macky Sall. Pour son appropriation par les populations dans le cadre d’une socialisation plus approfondie, je pense que le gouvernement doit lui trouver une dénomination équivalente en langue nationale wolof. Une dénomination qui participerait à installer dans la conscience collective de l’opinion publique, le Plan Sénégal émergent (Pse) dans sa dénomination en langue nationale wolof. Par exemple «Yonou Yokkute» aurait pu être l’équivalent dénominatif du Plan Sénégal émergent (se).
Couverture maladie universelle
Elle est élaborée et mise en œuvre pour corriger les inégalités sociales criardes entre les différentes couches sociales par rapport à l’accès aux soins de santé de qualité. La Couverture maladie universelle (Cmu) est une des priorités politiques de transformation sociale du président de la République M. Macky Sall dont le ministère de la Santé et de l’action sociale est chargé de mettre en œuvre avec un objectif intermédiaire de couverture de 75%, en 2017. Ainsi, conséquemment, le ministère de la Santé et de l’action sociale a adopté une stratégie axée, d’une part, sur le développement d’initiatives de gratuité des soins de santé en faveur des groupes vulnérables (enfants, personnes âgées, handicapés …) et, d’autre part, sur la promotion des mutuelles de santé communautaires, qui constitue un des meilleurs leviers pour étendre la couverture du risque maladie aux secteur rural et informel.
La Couverture maladie universelle (Cmu) est un ensemble composé en réalité de plusieurs mesures dotées chacune d’une identité propre. Et chaque mesure est un élément de cet ensemble qui s’appelle Couverture maladie universelle (Cmu). Or on constate que la Couverture maladie universelle (Cmu) n’est pas perçue comme telle. Car il est observé que certaines populations confondent la dénomination individuelle des mesures composantes de la Cmu avec la dénomination de la Couverture maladie universelle (Cmu) en d’autres termes, le contenant d’avec le contenu. A titre d’exemple, pour parler de la gratuité des soins des moins de cinq ans, il est plus souvent remarqué que l’on utilise plus souvent le mot «Cmu». Alors que la gratuité des soins des moins de cinq ans est une mesure qui concourt par son apport à la Couverture maladie universelle autrement dit c’est un élément d’un ensemble qui s’appelle Couverture maladie universelle (Cmu).
La dénomination Couverture maladie universelle (Cmu) lue ou dite en langue française est un obstacle que l’on peut ajouter aux éléments à l’origine de l’incompréhension et de la confusion chez certaines populations entre ce qui est mesure dont l’effet induit étend la Couverture maladie universelle (Cmu) et ce qui est la Couverture maladie universelle (Cmu) qui est à la fois une vision, un ensemble de mesures contributives à la Cmu. Une wolofisation du concept Cmu et de ses composantes aurait facilité, à mon humble avis, sa compréhension et joué un rôle de fédérateur autour de ses objectifs.
Bourse de sécurité familiale
Elle a apporté dans les familles bénéficiaires soulagement, satisfaction et progrès social depuis son institution. Cependant, force est de constater que la Bourse de sécurité familiale est connue auprès des populations beaucoup plus par ses objectifs que par sa dénomination.
Extraite du programme «Yonou Yokkute», la vision du président de la République dans le domaine de la protection sociale, repose sur l’instauration d’une Bourse de sécurité familiale pour les familles défavorisées, conditionnées à des critères de revenus, d’inscription et d’assiduité à l’école des enfants, afin de combattre les injustices sociales et les inégalités pour une meilleure répartition des richesses nationales.
En somme, je reste convaincu, pour que les populations, de façon globale, et les bénéficiaires, de manière particulière, puissent à la fois intérioriser et mémoriser et les effets induits par la Bourse de sécurité familiale et la dénomination de cette politique, une wolofisation du nom de Bourse de sécurité familiale s’impose hic et nunc pour servir la postérité. Car lue ou dite en langue française, je ne suis pas sûr que les bénéficiaires eux-mêmes de la Bourse de sécurité familiale puissent connaitre cette dénomination, l’intérioriser et soient capables de la répéter et de la transmettre dans leur entourage comme un héritage.
Carte d’égalité des chances
Son instauration a révolutionné le statut social et la condition de handicap des personnes frappées de handicap. Selon la loi d’orientation sociale n° 2010-15 du 6 juillet 2010 relative à la promotion et à la protection des droits des personnes handicapées, «le handicap doit être prouvé par la détention d’une carte spécifique délivrée par le ministère en charge de l’Action sociale sur proposition des commissions techniques départementales. Cette Carte d’égalité des chances permet à son titulaire de bénéficier des droits et avantages en matière d’accès aux soins de santé, de réadaptation, d’aide technique, financière, d’éducation, de formation, d’emploi, de transport, ainsi qu’à tout autre avantage susceptible de contribuer à la promotion et à la protection des droits des personnes handicapées» (Article 3).
La dénomination Carte d’égalité des chances montre clairement les objectifs visés par le gouvernement à travers le ministère de la Santé et de l’action sociale en l’instaurant. Cependant, lue ou dite en langue française, cela pose un problème de compréhension pour les personnes qui ne savent pas lire ou écrire le français, autrement dit pour les personnes qui ne comprennent pas le français. Mais, cela ne veut pas dire qu’ils sont incapables de percevoir le sens politique et l’objectif de la Carte d’égalité des chances. Une wolofisation de la dénomination Carte d’égalité des chances est à envisager et serait un atout non négligeable, qui facilitera une intériorisation et une mémorisation plus faciles non seulement de la dénomination trouvée en langue nationale wolof mais des valeurs culturelles et sociales positives partagées qu’elle incarnera.
En résumé, les dénominations suivantes : Plan Sénégal émergent (Pse), Couverture maladie universelle (Cmu), Bourse de sécurité familiale, et Carte d’égalité des chances, mériteraient d’avoir leurs équivalents dénominatifs en langue nationale wolof pour faire adhérer davantage et mobiliser massivement, les populations autour de leurs objectifs respectifs par le biais d’un marketing culturel à mener de main de maitre.
Une dénomination en langue française d’une politique publique n’exclut pas la dénomination de celle-ci en langue nationale. Au finish, la dénomination en langue nationale d’une politique publique vise essentiellement à faciliter sa compréhension, son intériorisation et son appropriation par les populations. Donc, c’est très important de penser pendant l’élaboration des projets de politiques publics, à la double dénomination ou à la dénomination exclusive en langue nationale desdits projets politiques publics, avant toute communication publique.
Vive le Sénégal ! Vive la République !
Baba Gallé DIALLO
babadediana@gmail.com