Après sa visite d’une semaine, la Mission du Fonds monétaire international (Fmi) revient au mois de juin à Dakar dans le cadre d’une autre Mission du programme 2023-2026, conclu avec le Sénégal, qui prévoit un décaissement total de l’ordre de 1150 milliards de francs Cfa. Selon le Fmi, les nouvelles autorités ont admis que les principaux piliers du programme s’alignent sur leurs propres objectifs stratégiques, comme l’amélioration de la résilience budgétaire et la réduction des vulnérabilités de la dette, entre autres. Par Bocar SAKHO –
Après une semaine de discussions avec les autorités, la Mission du Fonds monétaire international (Fmi), dirigée par M. Edward Gemayel, qui a séjourné au Sénégal du 25 avril au 3 mai 2024, les relations entre les deux parties se poursuivent. Elles ont jeté «les bases de discussions de la seconde revue du programme soutenu par le Fmi», qui a fait le point, avec l’Etat du Sénégal, «sur les développements économiques et politiques récents». Le programme 2023-2026, qui prévoit un décaissement total de l’ordre de 1150 milliards de francs Cfa, continue. «Les discussions pour la seconde revue du programme soutenu par le Fmi au titre du Mécanisme élargi de crédit (Mec) et de la Facilité élargie de crédit (Fec), et la Facilité pour la résilience et la durabilité (Frd) sont pour l’instant prévues au mois de juin 2024», déclare Edward Gemayel.
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Cela veut dire qu’une nouvelle Mission de cette institution viendra à Dakar au début du mois de juin 2024, pour procéder à la revue du programme et préparer un deuxième décaissement au mois de juillet 2024, après validation par le Conseil d’administration du Fmi. Cette nouvelle tranche sera un autre bol d’air frais pour Diomaye et Sonko, qui ont décidé de poursuivre ce programme conclu par le régime précédent. «Les nouvelles autorités ont réaffirmé leur engagement à poursuivre le programme actuel soutenu par le Fmi. Elles reconnaissent que les principaux piliers du programme s’alignent sur leurs propres objectifs stratégiques, à savoir : améliorer la résilience budgétaire et réduire les vulnérabilités de la dette, renforcer la gouvernance et la résilience au changement climatique, promouvoir la transformation structurelle de l’économie. L’équipe du Fmi remercie les autorités et les autres partenaires pour leur excellente coopération et les discussions franches et constructives au cours de la visite», salue le Fmi.
Réserve de liquidités de 320 milliards F Cfa
Il faut savoir que l’ancien régime a même légué une réserve de gestion de 320 milliards F Cfa. Alors que Macky Sall, en 2012, avait dû aller solliciter un appui budgétaire de la France à son élection à cause du mauvais état dans lequel son prédécesseur avait laissé les finances publiques. Dans son communiqué, le Fmi confirme, sans donner de montant, que «le gouvernement a constitué des réserves de liquidités en prévision de l’élection présidentielle». «Ce qui a contribué à une augmentation de la dette du gouvernement central (73,4% du Pib) au-delà du plafond de dette fixé dans le cadre de l’Uemoa. Le déficit du compte courant est resté important (18,8% du Pib), reflétant la faiblesse persistante des exportations de biens», expose Edward Gemayel. Il faut noter que les nouvelles autorités ont aussi décidé, pour faire face au service de la dette, d’aller vers les marchés financiers pour lever des fonds.
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Selon le tableau peint par les fonctionnaires du Fmi, l’économie sénégalaise a fait preuve de résilience en 2023, «en dépit d’un contexte difficile». «Malgré les tensions politiques autour de l’élection présidentielle et les chocs extérieurs, la croissance économique a dépassé les attentes (4,6%), reflétant une bonne campagne agricole et un secteur tertiaire solide. L’inflation a également connu une baisse plus rapide que prévu, retombant à 5,9%. Des dépenses élevées de subventions à l’énergie (620 milliards de francs Cfa, soit 3,3% du Pib) et d’intérêts sur la dette ont été compensées par des réductions des dépenses d’investissements afin de contenir le déficit budgétaire à 4,9% du Pib, conformément à l’objectif du programme», détaille le chef de la Mission du Fmi à Dakar.
Service de la dette
Les premiers mois de l’année 2024 ont été moins réjouissants à cause du contexte électoral tendu et incertain. «La croissance de l’activité économique au premier trimestre 2024 a été plus faible que prévu, du fait des incertitudes politiques liées à l’élection présidentielle. Les indicateurs de conjoncture montrent que la croissance de l’activité économique a été modérée, les entreprises ayant reporté leurs investissements et les consommateurs réduit leurs dépenses. L’inflation s’est repliée à 3,3% (en glissement annuel). L’exécution du budget a été marquée par une moins-value au niveau des recettes et un dépassement du coût des subventions à l’énergie par rapport à l’enveloppe budgétaire initiale», note-t-il. Mais, précise le Fmi, les perspectives économiques restent toutefois favorables : il annonce que la croissance économique pour 2024 est maintenant projetée à 7,1% contre 8,3% auparavant. A leurs yeux, cela reflète «une activité économique impactée au premier trimestre par le contexte électoral et un démarrage retardé de la production de gaz jusqu’en décembre 2024».
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Si les «données préliminaires pour la fin de l’année 2023 indiquent que le programme soutenu par le Fmi reste globalement sur la bonne voie», le Fmi donne des indications claires pour atteindre l’objectif de déficit budgétaire de 3,9% du Pib fixé pour la fin de l’année 2024.
Audit de la Senelec
Que faire pour y arriver ? «Il faudra prendre des mesures ambitieuses pour rationaliser les dépenses fiscales et améliorer l’efficacité des dépenses. Ces mesures devraient être prises dans le cadre d’un budget rectificatif qui permettrait la réalisation de l’objectif régional de déficit budgétaire de 3% du Pib en 2025», enchaîne le Fmi. Il y a une Loi de finances rectificative qui devrait être adoptée pour conduire ces mesures. Elles devraient être suivies aussi de «réformes structurelles» sur la révision de la formule de détermination des produits pétroliers et la réalisation d’un audit de la Senelec «afin de mettre en œuvre une nouvelle grille tarifaire pour l’électricité, avec un tarif social pour les ménages vulnérables». «En outre, les autorités progressent dans les mesures visant à sortir le Sénégal de la liste grise du Groupe d’action financière (Gafi)», ajoute M. Guamayel.
Il faut savoir que l’équipe du Fmi a été reçue durant cette semaine de visite par le Premier ministre Ousmane Sonko. Elle a rencontré le ministre des Finances et du budget, Cheikh Diba, et des hauts fonctionnaires de l’Administration et discuté avec des représentants des milieux d’affaires et des partenaires de développement.
bsakho@lequotidien.sn