Poursuites contre Madiambal Diagne : Les contours d’une affaire

Le départ de Madiambal à Paris continue de crisper les pouvoirs publics, qui ont pris des mesures conservatoires à l’endroit de certains fonctionnaires de la Police nationale par le ministre de l’Intérieur, qui l’avait déjà menacé d’une plainte en tant qu’avocat de Sonko. Par Mohamed GUEYE –
La nouvelle diffusée par Madiambal Diagne, de sa sortie du territoire, le jour même où il lui a été notifié verbalement d’une interdiction de dépasser les frontières du pays, a mis en émoi toute la «Patriotesphère». En plus des incriminations les plus hardies, portant sur des milliards de Cfa de deniers publics détournés, des personnes en sont déjà venues à prononcer le verdict de la sanction pénale qui devra être prononcée à son encontre.
Tout cela serait plus ou moins risible, si ce n’était superfétatoire. On connaît le modus operandi de ceux à qui nous avons affaire/ l’idée est de diaboliser l’adversaire préalablement à sa mise à mort politique. N’est-ce pas ce qui a été fait pour tous les détenus qui peuplent aujourd’hui les geôles de Pastef ? Avant de s’en prendre à eux, quand ce n’est pas le leader du parti, ce sont des «journalistes» aux ordres, régnant dans des médias stipendiés, qui passent d’abord à l’offensive, faisant tourner l’arme de la désinformation.
Ainsi, combien de personnes peuvent encore nous indiquer ce qui serait réellement reproché à Farba Ngom, à Lat Diop ou Tahirou Sarr ? On a voulu nous faire croire que ces personnalités se seraient fait leur beurre sur des milliards du contribuable, ce qui justifierait ainsi leur détention préventive, sans possibilité de liberté provisoire. Nombreux avis médicaux mettant en garde sur les risques d’une détention prolongée sur sa santé n’ont pas fait fléchir ceux qui ont détenu Farba Ngom. Pour lui, ainsi que pour Lat Diop, une déclaration venue du plus haut sommet de l’Etat avait annoncé la fin de leur carrière politique. On ne sait pas si c’est la matérialisation de cette «promesse» qui se déroule sous nos yeux ?
Il est évident que, même sans «fatwa» expresse, Madiambal Diagne se savait déjà dans la ligne de mire. D’autant que l’arrivée de Me Bamba Cissé, avocat de Ousmane Sonko, semble l’avoir galvanisé. M. Cissé n’a jamais caché la forte animosité qu’il nourrit à l’endroit de M. Diagne. Cela l’avait d’ailleurs poussé, il y a un an de cela, en août 2024, à annoncer une plainte contre toute «attaque contre le Premier ministre Ousmane Sonko». Il s’agissait, pour l’avocat du leader de Pastef, de traîner en Justice, de manière bien claire et spécifique, «Madiambal Diagne pour diverses infractions». Le but étant, selon le communiqué de Me Cissé, «de ne plus tolérer aucune dérive non fondée sur des motifs politiques qui porterait préjudice à leur client, sans une réaction judiciaire appropriée».
Depuis l’annonce de sa plainte, Me Bamba Cissé n’avait pas trouvé d’occasion pour mettre la Justice en branle. Sans doute était-il trop éloigné des sphères de l’Etat. Sa nomination en tant que «Premier flic du Sénégal» lui a donné l’occasion en or qu’il attendait, et il n’a pas hésité à la saisir. Il avait juste oublié un petit détail.
Au moment de sortir du pays, Madiambal Diagne ne faisait l’objet d’aucune mesure, de la part de qui que ce soit. En dehors des «rumeurs» et de fuites savamment distillées dans des médias complaisants et aux ordres, personne n’avait jamais tenté, par aucun moyen, de recueillir son avis sur un quelconque rapport, fut-il de la Centif ou d’un quelconque organe de l’Etat. Les chiffres dont on l’accuserait de détournement ou de «pillage», n’ont jamais été étayés par aucun document ou par un quelconque témoignage. Qui, parmi les médias qui ont avancé des chiffres de détournements dont il a été coupable, a-t-il jamais tenté de le joindre au téléphone ? Pourtant, tout le monde sait que ce monsieur n’a jamais fui les lumières cathodiques.
Connaissant les pratiques des gens qui se sont fait ses adversaires politiques, Madiambal Diagne a préféré prendre les devants pour se préparer au combat qui l’attend. Instruit par les mésaventures des tous les détenus de Pastef -ceux qui ont été libérés, ainsi que ceux qui sont encore dans les liens de la détention-, il est allé affûter ses armes, car il sait que ce qui l’attend est un Mortal Kombat. Ses adversaires montrent déjà qu’ils ne reculeront devant aucun moyen pour tenter de le mettre à l’ombre, et de le réduire au silence avant longtemps. Souhaitons-leur d’avoir pris le temps d’étudier la personne à qui ils ont affaire. Madiambal Diagne est coutumier des combats politiques et n’est quasiment jamais sorti de l’arène. Il n’attaque jamais lâchement ses adversaires, mais il saura, en cas de nécessité, rendre coup pour coup. Et pour un coup reçu, ses adversaires devront s’attendre à dix contre eux. Mais qu’ils se rassurent que, contrairement à eux, Madiambal ne s’en prendra jamais à des membres de leurs familles. Lui n’organisera pas de «cambriolage» contre le domicile de son ex-épouse, ou l’espionnage de la maison familiale dans son village. Mais il pourra lancer des boules puantes.
Quant à ceux qui colportent le «bruit» de sa «fuite», ils devraient avant tout commencer à balayer devant leur propre porte. Même s’il avait «fui» comme ils l’affirment, Madiambal ne se serait-il pas, ce faisant, inspiré que de leurs propres maîtres à penser ? Le temps est-il si long pour que nous ayons oublié ce personnage qui, interdit de sortir du territoire, est allé se photographier sur le pont de Farafegny, en Gambie, narguant ainsi les Fds et la loi ? Ou bien cet autre qui, convoqué au tribunal, a montré des images de lui traversant le fleuve Djoliba sur une pirogue, à l’encontre d’une décision de Justice ? Ne parlons pas de ce groupe d’avocats, mené par celui qui est aujourd’hui dans son bureau de la Place Washington, qui a servi de «bouclier» à un avocat européen interdit d’entrée au Sénégal ? Toutes ces infractions à la loi n’ont pas entraîné la suspension ou des sanctions à l’encontre de n’importe quel officier de police. Peut-être faudrait-il comprendre qu’à l’époque, nous avions un pouvoir bien assis sur le Droit et qui n’avait pas besoin des chemins de traverse pour se faire respecter.
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