Présidentielle 2024 – Couverture de la campagne électorale : Les journalistes plaident pour un fonds d’appui aux médias privés
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20 candidats sont en lice pour l’élection présidentielle du 25 février 2024. Mais les organes de presse sénégalais, qui ont des effectifs très faibles, auront sans nul doute de la peine à assurer la couverture médiatique de la campagne de tous ces candidats. Au cours d’un après-midi d’échanges organisé par le Cored dans le cadre de ses cas d’école, le sujet a été débattu. Occasion pour les professionnels de demander un fonds spécial pour la couverture de la campagne au bénéficie de la presse privée.Par Justin GOMIS –
Pour la première fois dans l’histoire politique du Sénégal, 20 candidats sont sur dans starting-blocks pour l’élection présidentielle. Mais les organes de presse sénégalais, qui ont des effectifs très faibles, auront sans nul doute de la peine à assurer la couverture médiatique de la campagne de tous ces candidats. Pour apporter une réponse à cette préoccupation, le Conseil pour l’observation de l’éthique et de la déontologie (Cored) a saisi le prétexte de ses rendez-vous bimestriels sur les thèmes d’actualités, pour poser ce cas d’école des journalistes qui ont eu à couvrir des campagnes électorales. A travers le thème : «Comment travailler avec un candidat sans corrompre la relation, travailler en bonne intermittence sans altérer les conditions des journalistes.» De l’avis de Mamadou Ndiaye, directeur de publication du journal Bès Bi, cette élection présidentielle est différente de celles passées et de celles à venir. Et pour assurer une bonne couverture médiatique d’une campagne électorale, les journalistes doivent s’organiser et s’outiller pour avoir un stock d’informations sur le candidat et sur son parti. Mieux, ils doivent se donner les moyens pour faire une bonne couverture. Car «les hommes politiques sont des séducteurs et corrupteurs qui, une fois élus, ne vous connaissent plus», dit-il.
Evoquant le traitement des informations, le patron d’E-Médias conseille de «cesser de nourrir l’illusion de neutralité» en faisant le travail de manière professionnelle. Selon l’homme politique Cheikh Bamba Dièye, le candidat veut que le journaliste soit son miroir embellissant. Et c’est dans ce sens qu’il demande au journaliste d’être focus sur son projet et sur les idées qu’il développe. Pour l’ancien maire de Saint Louis, le journaliste ne doit pas perdre de vue que le candidat n’est qu’une personne. D’ailleurs, d’autres panelistes n’ont pas manqué de dénoncer le fait d’embarquer les journalistes dans le cortège du candidat. Cette proximité peut créer le syndrome de Stockholm et empêcher le journaliste d’être équidistant et professionnel, s’il est pris en charge par le candidat.
Nécessité d’un fonds d’aide aux médias du privé
De l’avis de Diatou Cissé Coulibaly, au regard du nombre de candidats, il reste établi que la couverture médiatique de cette Présidentielle sera un casse-tête pour les médias, particulièrement la presse privée qui manque de moyens humains et matériels consistants lui permettant d’assurer la couverture de la campagne électorale pendant 21 jours. L’ancienne Secrétaire général du Synpics, qui assurait au cours de cet atelier, le rôle de modératrice, pense que l’Etat doit appuyer les organes privés. «Sous cette perspective, on pense qu’au niveau de l’atelier, même si les délais sont très rapprochés, il est possible de déployer un plaidoyer à l’intention des autorités», dit-elle. Un plaidoyer qu’elle fonde sur trois arguments forts. «Une bonne couverture médiatique de l’élection contribue à avoir un scrutin apaisé et transparent, parce que les médias sont l’œil du public pendant la campagne électorale et le jour du vote. C’est du renforcement de la démocratie dont il est question en créant les conditions pour une presse libre, indépendante, qui fait son travail en toute transparence. Nous sommes d’accord que lorsque les journalistes sont embarqués dans le cortège des candidats, la coexistence ne se passe pas toujours bien. Et si la coexistence se passe bien, si on n’y prend garde, on se retrouve à faire de la communication, du marketing au profit du candidat, ce qui ne recoupe pas les attentes du public. Le deuxième argument, c’est une question de justice et d’équité. Je ne défends pas la presse privée, mais elle a une mission de service public. Tout le monde sait que couvrir une élection présidentielle induit des dépenses, mais n’apporte pas des bénéfices. C’est strictement du service public. Puisque le président de la République subventionne les médias du service public, la justice et l’équité auraient voulu que pour la campagne électorale, on puisse également subventionner la presse privée qui est appelée aussi à faire du travail professionnel. Elle contribue à un scrutin plus apaisé», a-t-elle fait savoir.
C’est aussi l’avis de Daouda Diouf de la Radio futurs médias (Rfm), qui lance un appel au chef de l’Etat, à qui il demande de mettre en place un fonds spécial pour la couverture de la campagne. Pour lui, si les organes publics bénéficient de cette manne financière, cela doit être aussi le cas pour le privé, afin de mettre les confrères dans de meilleures conditions. Pour Mamadou Thior, le président du Cored, il faut aussi penser à la mutualisation des moyens entre les organes privés afin de pouvoir assurer la couverture médiatique des différents candidats.
justin@lequotiduen.sn