Dans le procès ayant opposé Madiambal Diagne à Souleymane Téliko, le verdict prononcé contre le premier, 6 mois de prison dont 3 ferme et une amende, est «disproportionné», selon Article 19. Dans un communiqué de presse, l’organisation recommande à l’Etat du Sénégal de «s’abstenir d’appliquer des sanctions privatives de liberté contre des journalistes en faveur des sanctions civiles proportionnées».Par Mame Woury THIOUBOU

– Dans l’affaire l’opposant au magistrat Souleymane Téliko, Madiambal Diagne a écopé d’une peine de 6 mois de prison, dont 3 ferme, et une amende. Selon l’Ong Article 19, ces peines de prison «sont disproportionnées». Dans un communiqué de presse, le directeur régional adjoint d’Article 19 Sénégal et Afrique de l’Ouest, Alfred Nkuru Bulakali, indique que «la peine de prison contre le journaliste Madiambal Diagne pour diffamation est incompatible avec les normes internationales sur la liberté d’expression». L’organisation de défense de la liberté d’expression rappelle que de telles peines sont de «nature à priver le public de l’accès à l’information». «Non seulement elles visent à priver le journaliste de sa liberté, mais elles sont aussi de nature à priver le public de l’accès à l’information. Les peines privatives de liberté ont un effet dissuasif et intimidateur sur les autres journalistes qui pourraient opter pour l’autocensure par crainte des représailles judiciaires et de la prison». Article 19 indique dans son communiqué avoir, à plusieurs reprises, «exprimé ses inquiétudes concernant les dispositions des lois sénégalaises sur les médias qui criminalisent les délits de presse tels que les injures et la diffamation, dans la mesure où elles menacent la liberté d’expression et celle de la presse».
Dans cette affaire, Ma­diam­bal Diagne a comparu pour diffamation après avoir soutenu que le juge Sou­leymane Téliko a indûment réclamé des frais de mission pour un hébergement au Tchad, alors que lesdits frais avaient déjà été pris en charge par le gouvernement tchadien. «Il est urgent que les autorités sénégalaises abrogent toutes ces dispositions et mettent leur législation en conformité avec les normes internationales relatives à la liberté d’expression et des médias. Les autorités doivent s’abstenir d’appliquer des sanctions privatives de liberté contre des journalistes en faveur des sanctions civiles qui doivent, elles aussi, être nécessaires et proportionnées, comme le recommandent les organes internationaux de droits humains. Les sanctions civiles devraient en outre assurer la protection de la vérité», indique M. Bulakali. Article 19 recommande ainsi que «les peines de prison ou toute autre forme de privation de liberté, les amendes excessives et autres sanctions sévères ne devraient jamais être prévues pour sanctionner une violation des lois sur la diffamation».
Les normes africaines et internationales établissent clairement que la criminalisation de la diffamation n’est pas une restriction justifiable à la liberté d’expression et que les lois sur la diffamation criminelle doivent être abolies et remplacées, quand c’est nécessaire, par des sanctions civiles appropriées, rappelle Article 19. En attendant la tenue du procès en appel, l’organisation appelle de ce fait les autorités judiciaires à prendre en compte ces normes internationales, en particulier les décisions des organes et Tribunaux régionaux des droits de l’Homme lorsqu’ils ont eu à se prononcer sur cette question.
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