PROCES EN APPEL – Affaire Serigne Mboup/Issam Omais : La confirmation de la condamnation du Pdg de Ccbm requise

L’Avocat général a requis hier la confirmation de la condamnation en correctionnelle de Serigne Mboup, Pdg de Ccbm, au paiement de 10 millions de francs Cfa à l’homme d’affaires libano-sénégalais, Issam Omais. Il estime que l’infraction de dénonciation calomnieuse et de diffamation à l’encontre de Mboup est bien établie. Le public a été témoin d’un procès passionné entre le représentant du ministère public et Me Baboucar Cissé de la défense. En effet, dans sa plaidoirie, l’avocat de Serigne Mboup s’en était pris au plaignant qui a été peint comme quelqu’un de pieux, de proche des familles religieuses. «Je ne crois pas à ces choses-là», peste Me Cissé. Il sera vite stoppé par l’Avocat général en l’absence des conseillers de M. Omais, qui avaient quitté la salle à cet instant précis. «Ce sont des attaques personnelles. Je suis le garant des libertés. Je ne vais pas les permettre», contre-attaque le maître des poursuites. Alors c’est parti pour des échanges houleux entre les deux hommes. Il a fallu l’intervention du juge, qui a fait observer une pause, pour calmer les ardeurs. Il affirme : «On doit dépassionner ce débat. On est saisi de faits, limitons-nous à juger ces faits. C’est une simple infraction comme les autres. Les considérations personnelles qui sont hors de ce dossier ne m’intéressent pas. On n’est pas là pour juger la croyance des uns et des autres. On n’est pas là pour discuter de la nationalité des gens», précise le juge.
Après cet épisode, la défense a poursuivi sa plaidoirie en demandant l’infirmation de la décision rendue par le premier juge. Elle a aussi sollicité la relaxe pure et simple de son client des fins de la poursuite.
Pour Me Bamba Cissé, «le juge s’est limité à dire que les faits sont prescrits, c’est-à-dire qu’on est resté trois ans sans faire d’action contre Omais. Cette attente était due simplement à des velléités de négociation qui étaient enclenchées par Omais. Donc, cela ne veut pas dire qu’à partir de ce moment qu’il n’y a pas d’escroquerie. Quand le juge s’arrête à la prescription, c’est qu’il ne se prononce pas sur le fond». Selon la défense, M. Issam Omais avait vendu des machines et un fonds de commerce à Serigne Mboup à Louga. Et après un investissement de M. Mboup d’un montant de 500 millions de francs Cfa dans l’usine, «il a été révélé que les biens vendus ne sont pas la propriété de M Omais». Et c’est sur cette base que Serigne Mboup a initié une procédure judiciaire pour escroquerie contre Issam Omais. C’est pourquoi pour Me Baboucar Cissé, «il n’y a pas de dénonciation calomnieuse, parce qu’en l’espèce, il n’y avait aucune intention malveillante». Lorsque Omais, à la suite de cette prescription évoquée ci-dessus, a fait une action en dénonciation calomnieuse, le tribunal a condamné Serigne Mboup à payer 10 millions de francs Cfa en guise de dommages et intérêts.
En revanche, pour Me Ndiogou Ndiaye de la partie civile, «il reste constant qu’il y a dénonciation calomnieuse». Car selon l’avocat de ce haut conseiller des collectivités territoriales, «Serigne Mboup l’a diffamé, il l’a calomnié. M. Omais l’a attaqué sur le plan correctionnel pour diffamation, il a été condamné. Il a voulu se venger. Il a initié une procédure d’escroquerie bancale contre Omais où il a été débouté en première instance, le juge d’appel a confirmé. Il se pourvoit en cassation, la Cour de cassation rejette. Et M. Omais, en revanche, est à bon droit sur la base de l’article 362 du Code pénal de l’attaque pour dénonciation calomnieuse et il a été condamné pour ça».
L’Avocat général a dénoncé hier la sortie en son temps de M. Serigne Mboup dans la presse sur cette affaire. Il a fait la leçon aux citoyens qui s’en prennent à la justice. «Respectons cette justice ! C’est la nôtre. Quand on la saisit, par respect, laissons-la se prononcer. Le débat, ce n’est pas à la télé, ce n’est pas dans la presse écrite. Le débat, c’est à la barre. Revenons à beaucoup plus de raison. Il y a cette tendance qu’on est en train de prendre dans ce pays, si on n’y met pas un terme, je ne vois pas l’avenir radieux de ce pays, quelles que soient les richesses qu’on nous brandit par ailleurs. Parce qu’un pays, c’est d’abord ses citoyens», fulmine le magistrat. Le délibéré a été fixé au 27 août.
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