Le procès en appel de l’affaire des faux médicaments de Touba Bélel a été jugé hier à la Cour d’appel du Palais de justice de Thiès. L’Avocat général a demandé à la Cour de ramener la peine de Bara Sylla, qui a comparu seul à la barre, de 7 à 4 ans de prison ferme, et de faire une exemption de peine pour Mamadou Woury Diallo, son co-accusé, bénéficiaire d’un décret de grâce.

Le procès en appel de l’affaire dite des faux médicaments de Touba Bélel, après deux renvois, a été jugé hier à la Cour d’appel du Palais de justice de Thiès. Bara Sylla, condamné en première instance par le Tribunal correctionnel de Diourbel, à 7 ans de prison, a comparu, seul, à la barre. Son co-accusé, Mamadou Woury Diallo, retranché en Guinée, depuis qu’il avait bénéficié d’un décret de grâce, le 4 avril 2019, n’a pas jugé nécessaire de se déplacer. D’ailleurs, le Parquet général a demandé, à la Cour, une exemption de peine pour le Guinéen.

4 ans requis
contre Bara Sylla
Moins chanceux, Bara Sylla, reconnu coupable par le ministère public, d’exercice illégal de la profession de pharmacien, de contrebande et d’association de malfaiteurs, risque, par contre, de voir sa peine réduite de 7 à 4 ans. Il a devant la barre reconnu avoir des magasins et soutenu que les produits en question ne sont pas pharmaceutiques mais des produits de massage. Il a, en outre, nié être de connivence avec Mamadou Woury Diallo. Et sur le montant des produits estimés à 1,350 milliard par l’Ordre des pharmaciens du Sénégal, il dit, devant le président de la Cour, le juge Souleymane Téliko, avoir acquis en Guinée ces produits qui sont d’une valeur de 30 millions de F Cfa. Et le tout a été confié à un certain Alpha Oumar Baldé.
Suffisant pour que son avocat, Me Khamissou Touré, signale que ce dossier «est incomplet». Il plaide : «Dans ce dossier, les conclusions faites à l’enquête préliminaire sont tendancieuses depuis le début du procès. Il y a les numéros de téléphone dans le dossier des nommés Alpha Oumar Baldé, Mamadou Saliou Bâ à qui, dit-on, appartiennent les véhicules qui transportaient la marchandise et un certain Kane, qui gère l’entrepôt qui alimente les vendeurs. Mais ces derniers ne sont pas inquiétés.» Pis, poursuit l’avocat de la défense, «une descente n’a pas été faite chez Bara Sylla par la gendarmerie pour vérifier son officine. Et aucune perquisition n’a été faite». Son confrère, Me Adama Fall, dans la même lancée, a plaidé la clémence du Tribunal parce que, selon lui, «la peine a été très disproportionnée».
L’avocat de l’Ordre des pharmaciens, partie civile dans ce procès, Me Abdoulaye Babou, pour sa part, rappelle : «Nous avons affaire dans ce dossier à une mafia bien organisée. Des gens qui ont décidé de se mettre en marge de la loi et de s’adonner à des trafics qui tuent. Les faux médicaments tuent des milliers de Sénégalais. Les statistiques nous disent que ça tue plus que les accidentés de la circulation. Et malheureusement ce sont des pauvres sénégalais qui en pâtissent.» D’après l’avocat, ce qui montre qu’il y a une forte organisation mafieuse qui n’en est pas à son coup d’essai, c’est qu’«on a réuni 1,3 milliard de F Cfa, pour aller jusqu’en Guinée affréter deux gros camions, les amener jusqu’au Sénégal, à Touba Bélel, et paradoxalement, sans jamais être inquiétés». Et de s’indigner : «Ces gens-là se nourrissent de ce commerce et y gagnent des milliards et des milliards sur le dos du Peuple sénégalais.» L‘avocat demande à la Cour de maintenir la peine jugée en première instance. Il insistera surtout sur la faiblesse de l’Etat. «Le président de la République, Macky Sall, ne pouvait pas ignorer la grâce accordée à Mama­dou Woury Diallo. Il l’a fait exprès et cela ne l’honore pas.»
La Cour d’appel a décidé de joindre ces exceptions de nullité et d’illégalité soulevées par la défense et la partie civile dans le fonds. Le délibéré est prévu pour le 22 juillet.
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