Le 30 août prochain, la Cour d’appel donnera son verdict dans l’affaire de la caisse d’avance de la mairie de Dakar. Hier, après avoir demandé la confirmation du premier jugement, le Procureur général a pensé que les constitutions de partie civile peuvent ne pas s’exclure.
Dans le procès en appel de Khalifa Sall et Cie, le juge a fixé hier la date du délibéré au 30 août prochain à 10h. Le Procureur général a requis la confirmation du jugement rendu en première instance, c’est-à-dire 5 ans de prison ferme et une amende de 5 millions de F Cfa contre le député-maire. En revanche, le représentant du ministère public estime que les constitutions de partie civile peuvent ne pas s’exclure. Ainsi pour la réparation du préjudice subi, Lansana Diabé Siby a demandé à la Cour d’allouer à la fois à la mairie et à l’Etat du Sénégal le montant qui a été prononcé par Malick Lamotte. «Certes, dans le principe de bonne gouvernance l’Etat à un droit de regard sur les ressources des collectivités, mais il y a les deniers de l’Etat et les deniers des collectivités territoriales», précise-t-il. Cependant, le parquetier reste convaincu que les infractions retenues par le premier juge sont «parfaitement valables» parce que, souligne-t-il, «on n’avait pas besoin d’utiliser de fausses certifications, de faux procès-verbaux de réception, de fausses factures» pour justifier le décaissement d’un montant. Il a commencé par commenter tout le bruit qui a accompagné ce procès. «C’est un procès qui a été à la fois très houleux, où la justice a été encore malmenée, les juges malmenés. Ce qui est important pour nous, c’est le stoïcisme que nous menons toujours dans l’exercice de nos fonctions. Il ne nous appartient pas d’aller dans les radios ou télévisions pour plaire à l’une ou à l’autre partie», rappelle le Procureur général. Sans doute une allusion à sa sortie médiatisée sur l’application de l’arrêt de la Cedeao.
Me Ibrahima Diaw : «L’Etat n’a subi aucun préjudice»
Auparavant, les avocats de la mairie qui se considèrent comme «la véritable partie civile» ont plaidé l’irrecevabilité de la constitution de l’Etat du Sénégal. «Pour prétendre à une constitution, il faut subir directement ou indirectement un préjudice. Or l’Etat n’a subi aucun préjudice. L’Etat qui a déclenché les poursuites n’a pas sa place (dans ce procès) parce que les sommes revendiquées ne lui appartiennent pas. La caisse d’avance est une caisse qui est composée uniquement de recettes propres à la ville de Dakar», défend Me Ibrahima Diaw. Dans sa plaidoirie, il a indiqué que la Constitution reconnaît aux collectivités territoriales une autonomie de gestion et de fonctionnement. Citant l’article 2 du Code des collectivités territoriales, l’avocat de la ville de Dakar a souligné que celles-ci «s’administrent librement par des conseillers élus au suffrage universel direct». Me Diaw a accusé ses confrères engagés par l’Etat de vouloir créer «la confusion en évoquant les fonds de dotation, les avances de trésorerie et les ristournes».
Me Gaye : «Me Ousmane Sèye a porté une robe marron pour débiter des inepties »
Vendredi dernier, les avocats de la mairie avaient été taxés de «défense-partie civile» par Me Ousmane Sèye. Ce lundi, Me Ousseynou Gaye a porté la réplique à son confrère, politique et proche du pouvoir. «Il a porté une robe marron pour débiter des inepties. Il n’a pas le monopole de l’insulte. Je n’ai noté aucun argument de droit valable de tout ce qu’il a dit», lance-t-il. Rappelant la condamnation par la Cour de justice de la Cedeao de l’Etat à payer 35 millions de F Cfa aux prévenus, il a qualifié l’inapplication de cette décision de «honte» pour notre pays. «Vous êtes partie civile ?» C’est par cette question que le juge Demba Kandji a interpellé Me Gaye. L’avocat répond par l’affirmative et insiste : «Je dis mon ressenti par rapport à tout ce qui se fait. Et j’ai honte pour mon pays.» Sur la présence de l’agent judiciaire de l’Etat au procès, il le met dans le compte «des raisons d’ordre politique».
Par ailleurs, Me Gaye a déclaré qu’il ne serait convaincu que «ce procès n’est pas politique» si «l’Etat déclenchait une procédure dans l’affaire du scandale du Prodac où il est question de 29 milliards de francs Cfa». Les avocats des receveurs, percepteurs municipaux ont, quant à eux, sollicité la confirmation du juge correctionnel qui a prononcé leur relaxe, car pour Mes Moussa Sarr et Mamadou Guèye Mbow, Ibrahima Touré et Mamadou Oumar Bocoum ont «rempli leur obligation de contrôle des pièces». Il revenait, à la fin, aux prévenus appelés tour à tour à la barre de dire leurs derniers mots. Yaya Bodian conclut : «Nous sommes les victimes collatérales d’un combat qui ne nous concerne pas.»
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