Les combattants de la faction de Diakaye ont officiellement déposé les armes. La cérémonie s’est passée samedi dans le village de Mongone, en présence des acteurs et partenaires pour la paix, et du Gouverneur de Ziguinchor. Une page se tourne dans la zone !Par Khady SONKO – 

Historique ! C’était contenu dans l’accord de paix signé à Bissau le 4 août dernier : le camp de Diakaye a officiellement déposé les armes samedi dans le village de Mongone, situé dans la commune de Djinaky, dans le département de Bignona. Un événement historique et symbolique à la fois après plus de 40 années de conflit et plus de 5 mille victimes dont des milliers de déplacés.
«Si j’ai pris cet engagement pour fatiguer la Casamance où j’habite, que Dieu me tue aujourd’hui même. Mais je suis convaincu que mon engagement dans la forêt était pour sauver mes frères et sœurs, les parents. C’est ce même engagement qui fait qu’aujourd’hui j’ai décidé de déposer les armes pour sauver des vies et épargner mes parents», a déclaré Fatoma Coly. Le commandant des combattants de la faction de Diakaye poursuit : «On ne peut pas avoir peur de la mort et semer la violence, demander la paix et être dans la violence.» Il ne blâme personne car tout le monde veut la paix. Cependant, souligne M. Coly, «si on ne sait pas comment chercher la paix, certainement, on ne verra, on ne comprendra pas le chemin qu’emprunte celui qui œuvre pour la paix. Mais il suffit de s’approcher de lui et demander». Il n’écarte personne dans ce chantier de la construction de la paix. «M. le maire l’a dit ici. Travailler et gâter tout ce qu’on a travaillé n’a pas de sens. Travailler et ensuite fuir et laisser tout derrière n’a pas de sens», se désole le désormais ex-combattant. Fatoma Coly s’explique : «Le développement que nous cherchions, c’est de cela dont on parle aujourd’hui. Diakaye a rendu ses armes au gouvernement, ce qu’ils veulent, c’est le développement, et c’est ce que vous cherchez.» S’adressant aux villages de Mongone, Bri­ka­manding, Samboula­diang, Balonguine, Kateum Teum, qui entourent Diakaye, il dit : «Tout ce que j’ai commis comme faute chez vous, pardonnez-moi cela dans cette vie et dans l’Au-delà. Dans ce monde, personne n’est parfait. C’est dans l’exercice de sa mission qu’on peut faire du bien, et parfois du mal. Pardonnez-moi pour le mal que j’ai fait moi et mes éléments, et aidez-moi dans ce que je fais pour sauver la Casamance.»

Après l’acte des combattants dirigés par Fatoma Coly
Henri Ndecky appelle les autres factions du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance à suivre le chemin des combattants de Diakaye. Le coordonnateur de la Coordi­nation sous-régionale des organisations de la société civile pour la paix en Casamance (Cospac) tend la main aux combattants encore dissidents. «S’ils pensent que nous sommes leurs frères, leurs fils, qu’on peut apporter une solution, nous sommes prêts à accompagner dès aujourd’hui toutes les factions à discuter avec l’Etat du Sénégal.» M. Ndecky demande au gouvernement d’occuper les campements dans la zone.
Par ailleurs, il s’interroge : «Pourquoi les gens veulent bloquer le processus de paix quand en plus de 40 ans vous avez des milliers de victimes, partir sans avoir choisi de partir. Est-ce que nous avons la responsabilité d’enlever, d’ôter la vie à quelqu’un, parce simplement nous avons notre intérêt personnel ?» Le coordonnateur du Cospac invite l’ensemble des 14 régions à accompagner le processus de paix en faisant fi des intérêts personnels qui ont bloqué le processus pendant 40 ans. A l’en croire, les combattants ont toujours voulu avoir une oreille attentive lors des négociations.
La Fondation Frédéric Hébert, l’Usaid, Ajws, le Malao, l’Unicef, le Cnams, le Centre humanitaire Henry Dunant sont les partenaires techniques qui ont accompagné le processus de paix.
Pour le Gouverneur de la région, la cérémonie s’inscrit en lettres d’or dans les annales de l’histoire du Sénégal. D’après Guedj Diouf, ce dépôt d’armes est pour la faction de Diakaye un acte de bravoure traduisant son fort engagement pour la paix et travailler désormais pour le développement économique et social de la Casa­mance. «Il faut certes avoir le courage pour faire la guerre, mais il faut encore plus de courage pour faire la paix. Par cet acte, vous rentrez dans l’histoire pour y demeurer à jamais en montrant à vos frères des autres factions du Mfdc la voie à suivre pour une paix définitive en Casamance», a déclaré le Gouverneur. Pour cela, poursuit-il, «vous méritez le respect et l’estime de tout un chacun. Vous devez donc être fiers de vous, et avec la tête haute, continuer résolument votre chemin vers la paix et le développement économique et social harmonieux et durable de la Casamance, car on ne se retourne pas quand l’horizon vous invite sans arrêt». Ceux qui ont déposé les armes aujourd’hui (samedi) vont devoir reprendre leur place dans la vie sociale et réintégrer la communauté. Pour ce faire, quels que soient les souffrances ou les dommages subis, M. Diouf invite chacune et chacun au pardon et à la réconciliation, à apprendre à oublier et à regarder devant soi pour asseoir une paix sociale durable. «L’Etat sera à vos côtés. Conformément à la vision du président de la République, les efforts jusqu’ici consentis seront poursuivis et renforcés pour le développement de la zone de Diakaye et de toute la région», a promis le Gouver­neur.
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