Profil – Thiémokho dit Soundioulou Cissokho : En rappant sur les pas du grand-père

Thiémokho dit Soundioulou Cissokho est le petit-fils et homonyme de feu Soundioulou Cissokho, le roi de la kora. Mais c’est dans le rap que l’homonyme a choisi de se lancer sur les pas de son illustre grand-père. Par Amadou MBODJI –
Thiémokho dit Soundioulou Cissokho suit les pas de son grand-père Soundioulou Cissokho. Mais pas de la même façon. C’est plutôt à travers le rap que l’homonyme a choisi de suivre les pas de son virtuose du kora de grand-père. «J’ai grandi dans cet univers où mes oncles, tantes et cousins sont musiciens. Du coup, la musique a toujours occupé une grande partie de ma vie. Ma grande sœur et mon petit frère sont aussi musiciens. Entre studios, répétitions à la maison et fabrication de koras, je peux vous dire que l’héritage a été bien transmis», certifie le petit-fils de celui qui avait, à travers ses notes de kora, l’habitude de bercer les mélomanes de belles mélodies puisées dans la pure tradition mandingue. Aujourd’hui, l’artiste se montre très reconnaissant à l’endroit de ceux qui ont été à l’origine de sa vocation. «Je remercie mon père qui a tenu à nous inculquer cette culture», souffle celui dont le nom d’artiste est Sun. Dans le rap, il évolue avec son frère. «Je suis en groupe avec mon petit frère et on nous appelle les Sunzik», souligne-t-il.
La trentaine révolue et titulaire d’une Licence en commerce international, Thiémokho dit Soundioulou Cissokho arrive quand même à concilier sa passion pour la musique et son métier de commercial au sein d’une société de téléphonie. «J’ai pu trouver un créneau qui me permet d’exercer les deux. Je fais mes répétitions les week-ends alors que les soirs, je me consacre à l’écriture. J’écris beaucoup de textes. J’ai écrit des nouvelles que je compte publier», fait savoir le rappeur. «Je lis beaucoup, toute mon adolescence, c’était la lecture. Au Bac, j’ai eu 17 en français», se remémore-t-il. D’ailleurs, c’est le fait d’avoir ce rapport à l’écriture qui l’a poussé dans les bras du hip-hop pour se tracer une carrière dans la musique. «Mes textes sont beaucoup plus adaptés au rap», livre-t-il.
Un modèle familial
Musicien dans l’âme, il joue aussi bien à la guitare qu’à la Kora. Mais il est encore loin d’atteindre le niveau de virtuosité de son grand-père, le regretté Soundioulou Cissokho. De ce dernier, Thiémokho se remémore sa générosité. «Mon grand-père aimait partager. Il donnait beaucoup. Il immolait souvent un mouton qu’on préparait aux hôtes qui venaient à la maison. J’essaie d’être comme lui, même si je n’ai pas encore les moyens dont il disposait. A chaque fois que je le voyais, il m’offrait 2000 franc Cfa», se rappelle-t-il, lui qui garde toujours intact dans sa mémoire le jour du décès de son grand-père. «J’avais six ans lorsqu’il est décédé. Je me rappelle encore la réaction de mon père. Il était figé, sans voix, après avoir appris cette triste nouvelle, cela m’avait intrigué», raconte le jeune rappeur qui a comme référence Karim Xrum Khak, Daara ji, Youssoupha, entre autres.
Thiémokho dit Soundioulou Cissokho, qui a été primé lors de la cérémonie du Galsen Hip-hop Awards organisée par Y. Dee et ses équipes au Théâtre national Daniel Sorano, a fait ses armes dans les Cypher. Une compétition de rap organisé pour, dit-il, révéler de nouveaux talents et dont il a été le vainqueur. «Le gagnant recevait une prime en argent et une collaboration avec l’artiste de l’année. J’ai eu le plaisir et l’honneur de gagner ce Cypher comme on dit dans le jargon», affirme l’artiste.
Le sens de l’engagement
Lui demander d’interroger le rap galsen (du Sénégal) le rend tout de suite très loquace. «Le rap sénégalais a beaucoup évolué, autant visuellement qu’artistiquement. L’image du rap a beaucoup évolué, et la façon de le faire aussi. Pour exister, il faut savoir s’adapter, c’est pourquoi on diversifie notre façon de le faire et on ne se donne pas de limites artistiques.» Mais le rap est aussi synonyme d’engagement et ça, Thiémokho le sais. «Je peux vous dire que l’engagement politico-social, j’y crois énormément, car je pense que tout être humain devrait l’être pour l’intérêt de sa communauté. Etre rappeur et activiste est quasiment naturel vu les origines du rap. Il faut juste qu’on accepte à chacun sa façon d’être actif. Certains vont affronter les Forces de l’ordre si besoin, d’autres vont faire des sons et vidéos, et d’autres feront des publications sur les réseaux sociaux. L’essentiel est de ne pas se perdre en route ou se faire corrompre. Un rappeur doit nécessairement rester vrai», assène Thiémokho dit Soundioulou Cissokho.
Dans sa discographie, Thiémokho est auteur de trois projets : le premier dont le titre est Shine est sorti en 2019, suivi de 21 élaboré en 2021 et Tannée in road en 2023 en tant que Sunzik. Ses sujets de prédilection, l’émigration clandestine, la crise identitaire des Africains, l’amour et la situation politique du Sénégal.
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