Projet de Centrale électrique à Malicounda : La Senelec accusée de bloquer les indemnisations promises

Par Alioune Badara CISS (Correspondant) –
Plus d’un an après la signature d’un accord historique sur les indemnisations liées à la Centrale électrique de Malicounda, la Senelec n’a toujours pas débloqué sa part de financement. Une situation que dénoncent avec force les Personnes affectées par le projet et l’Ong Lumière synergie pour le développement (Lsd), qui les accompagne dans leur quête de justice. Elle a clôturé, hier à Saly, un atelier de stratégie entre les communautés affectées par les projets financés par la Banque africaine de développement (Bad).
Le projet de centrale, mené dans le cadre d’un partenariat public-privé entre la Senelec et la multinationale Melec Power, concerne un terrain de 18 hectares dans la commune de Malicounda. Cette assiette foncière, acquise via la Senelec, a été partiellement cédée à Melec Power pour la construction de l’infrastructure. «Ces terres appartenaient à 23 familles. Le processus n’a pas respecté les normes environnementales et sociales de la Banque africaine de développement (Bad), qui finance pourtant le projet», alerte Aly Mari Sagne, directeur de l’Ong Lsd.
En 2021, les Personnes affectées par le projet (Pap) ont saisi l’Ong, qui entame avec elles une procédure de médiation. Celle-ci aboutit, en décembre 2023, à un accord impliquant Melec Power, la Senelec et les Pap. Le document prévoit un programme de restauration des moyens de subsistance, financé à hauteur de 128 millions de francs Cfa dont 62, 4 millions francs Cfa par Melec Power et 53 millions par la Senelec.
Aujourd’hui, seule la multinationale Melec Power a respecté ses engagements à hauteur de 22% du montant promis. «En revanche, la Senelec n’a toujours pas levé le plus petit doigt. Deux courriers sont restés sans réponse. Cela fait plus de six mois qu’on nous promet un chèque qui ne vient pas», s’indigne Aly Mari Sagne. Il interpelle directement le Directeur général de la Senelec, Pape Toby Guèye. «Dans un autre projet à Sendou, la Senelec a débloqué un milliard de francs Cfa. Pourquoi refuse-t-elle ici de libérer une enveloppe de 53 millions ? C’est ridicule, scandaleux et totalement irresponsable», déplore-t-il.
Les représentants des Pap, eux aussi, dénoncent un mépris inacceptable. «Nous avons été dupés», affirme Alioune Faye, président des Pap de Malicounda. «Après un an de négociations, un protocole a été signé. Le paiement devait débuter en janvier 2024. Mais jusqu’ici, rien. Une entreprise étrangère tient parole, alors que notre propre société nationale nous tourne le dos», fustige M. Faye.
Quant à Assane Kane, un autre représentant des Pap, il fustige également l’attitude du Dg de la Senelec. «Nous avons écrit, mais il garde le silence. C’est un manque de respect total. La moindre des choses, c’est de répondre aux citoyens. S’il ne veut pas écouter les populations, nous irons plus haut, au président de la République ou au Premier ministre», avertit M. Kane. Les communautés concernées rappellent que leurs terres ne sont pas de simples espaces cultivables, mais un héritage ancestral. «Ce que nous revendiquons n’est pas un caprice. C’est un droit», martèle Alioune Faye.
Alors que la Centrale de Malicounda poursuit ses activités, les familles impactées, elles, attendent toujours réparation. Face à ce blocage, les regards se tournent désormais vers les autorités gouvernementales pour faire respecter les engagements pris.
Interpellé, un des responsables de la Senelec en charge de cette zone abritant le projet a dit n’avoir aucune information relative à ce dossier. Sur la base d’un mail qui lui a été envoyé, il devrait nous revenir. Mais jusque tard dans la soirée, aucune suite.
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