PUBLICATION – «Le cybersalon des épouses qui ont mal au lit» : Jean Meïssa Diop pose le débat des forums sur internet pour résoudre les problèmes conjugaux

La communication interpersonnelle virtuelle peut-elle se substituer à celle physique ? C’est tout le nœud de la problématique que le journaliste et désormais essayiste, Jean Meïssa Diop, pose dans son livre «Le cybersalon des épouses qui ont mal au lit». Dans cet essai, il est question de ces femmes qui recourent aux réseaux sociaux et aux sites de discussion pour résoudre leurs problèmes conjugaux. Jean Meïssa Diop s’emploie à démontrer la faillite de la société et des familles qui généralement jouaient le rôle de conseillers conjugaux.
Aujourd’hui, rares sont les femmes qui ne sont pas membres de groupes ou de pages sur les réseaux sociaux, groupe Nob sa dieukeur, Ladies club, Iron ladies, Sama dieukeur sama kharit, T’es de Dakar, Femme chic… Les groupes se multiplient, les noms varient, mais les sujets abordés sont presque les mêmes. Ça parle d’adultère, d’avortement clandestin, de pédophilie, de viol, de violence conjugale… Les femmes passent des journées entières à deviser dans ces groupes ou à lire les «Ano» qui racontent leurs histoires, chacune plus incroyable que l’autre. Le journaliste Jean Meïssa Diop avait, il y a bien des années, perçu les signes avant-coureurs de ce phénomène qui débutait avec le site Sentoo (qui n’existe plus).
Dans son ouvrage intitulé Le cybersalon des épouses qui ont mal au lit, l’écrivain parle de ce site qui, dans les années 2005-2006, regroupait dans ses forums pas mal de femmes qui ont mal au lit. Des milliers de femmes y déversaient leurs problèmes dans l’espoir certainement d’y trouver une oreille attentive ou plutôt une solution. «Quand l’espace conjugal ne permet plus de communiquer autour des problèmes du couple, et que les canaux traditionnels de résolution des conflits n’existent plus, ne fonctionnent plus ou sont inefficaces, des femmes se rabattent sur les nouveaux espaces d’échange… Ces espaces virtuels deviennent l’exutoire de ces femmes qui y trouvent leur confort et accessoirement réconfort… Mais est-ce une soupape pour par exemple des femmes adultères à qui pèserait le poids de la faute ?» M. Diop campe le débat dès les premières lignes de son livre. Il démontre que l’urbanisme grandissant a amené ces femmes à recourir à internet. «Notre société se modernise et s’individualise. Les couples vivent maintenant dans des appartements, carrément coupés de leur base familiale. Il n’y a presque plus de réunions de famille. Vous comprendrez aisément alors que le couple ne recourt pas à la famille pour résoudre ses problèmes conjugaux», analyse-t-il. Désir d’avoir un enfant, polygamie de l’époux, infidélité, amour extraconjugal, incompréhension, climat au foyer, mariage forcé, mauvais traitements, relations avec la belle-famille, solitude conjugale, tout y passe et Jean Meïssa passe, lui, au peigne fin le site Sentoo, et révèle à l’appui de tableaux bien renseignés l’âge, la nature du problème, la date, le nombre des intervenants, bref des statistiques claires visant à donner sans doute un cachet scientifique à son travail.
D’ailleurs, toujours dans cette perspective, l’auteur n’hésite pas à faire des interviews, avec notamment la sociologue Fatou Sow Sarr, à se référer à d’autres penseurs, à interroger des psychologues, et à citer des articles parus dans la presse, donnant plus de poids à ses arguments. Et au-delà d’une simple analyse des données récoltées sur Sentoo en 2005 et 2006, c’est-à-dire 2 ans, et qui révèlent du caractère méthodique et pointilleux de l’auteur, ce dernier livre son avis d’expert des médias sur un sujet qui concerne les nouveaux médias. Et cela, il le fait dans un français que même un élève de l’élémentaire est à même de comprendre et avec un titre si accrocheur, rappelant toujours l’expérience d’homme des médias de l’auteur de la chronique «Avis inexpert». «Le titre a beaucoup fait jaser. C’est drôle, c’est provocateur c’est pour cela que je l’ai choisi, Les épouses qui ont mal au lit. Mal au lit, c’est une allégorie de la réalité conjugale. Quand on a mal au lit, on passe ses nuits au salon. Et le salon aujourd’hui, c’est la virtualité.»