Tous les pays du monde développent des stratégies d’ajustement de leur économie à la situation induite par la pandémie. Mais on constate qu’à l’échelle de l’Umoa, il n y’a pas encore  de réponse commune ou concertée. Songez à  ce qui se passe à l’Union européenne où la Bce a mobilisé 750 milliards d’euros pour soutenir les économies de l’union. Aux Usa, la Fed a baissé les taux directeurs et s’engage à acheter toutes sortes de créances publiques pour soutenir l’économie américaine, avant même que le congrès n’approuve 2000 milliards de dollars.  Du fait de notre arrimage à  l’euro, la Bceao tarde à réagir de façon souveraine et significative. Il existe pourtant une palette de mesures, dont les moindres seraient de baisser les taux d’intérêt, de relever le plafond des droits de tirage des Etats, d’abonder un fonds de soutien aux Etats… Pour ce qui est plus généralement des pays sous-développés, il urge de construire un plaidoyer pour des actions sur la dette multilatérale, pouvant aller des moratoires aux annulations partielles ou totales, en passant par les rééchelonnements.
Au Sénégal, pour ce qui concerne le fonds ‘’Force covid‘’, il convient de mettre en place une structure de gestion où sont représentées toutes les forces vives, de manière à assurer la transparence et l’efficacité qui permettent d’atteindre les véritables cibles identifiées. Bien entendu, une structure de monitoring, de collecte des informations, de suivi et d’analyse de la situation des unités économiques, des ménages et du cadre macro-économique doit être mise sur pied, afin de mesurer a posteriori leur niveau de résilience face à la crise.
Consacrer 50 milliards à l’achat de vivres n’est pas pertinent. Il peut ouvrir la porte aux détournements, au copinage, au clientélisme. Il faut préférer la baisse des prix des denrées de première nécessité (riz, huile, sucre, tomate…) par des subventions, et l’amnistie pour les factures d’eau et d’électricité sur la période de la pandémie.
Le fonds de 200 milliards de remise de dettes fiscales : encadrer ce fonds par des critères objectifs stricts (degré d’impact sur l’activité, pertes subies …), mettre sur pied une commission ad hoc pour instruire les demandes de remise. Dans tous les cas, les délinquants fiscaux ne sauraient en bénéficier et la réponse devra se faire à la carte, à l’issue d’une instruction rigoureuse.
*Affranchir les salariés de la retenue à la source d’impôts sur les salaires pour une période déterminée afin d’accroître leur pouvoir d’achat.
*Permettre aux entreprises de passer des provisions exceptionnelles et/ou de déduire les pertes d’exploitation du résultat.
*Reporter les délais de dépôt des déclarations d’impôt sur le revenu, de Tva et autres et accorder au besoin des moratoires de paiements.
*Envisager une baisse sur le carburant (le baril est à un niveau très bas de 21 dollars).
Il urge dès maintenant de prévoir l’après-pandémie par la mise sur pied d’un mécanisme de financement du crédit pour booster ou faire redémarrer l’activité d’entreprises en difficultés. Afin d’amoindrir au maximum l’impact négatif de la crise sanitaire sur l’économie, il convient de trouver un équilibre rationnel entre les stratégies de confinement sanitaire et la préservation de la continuité de l’activité économique. Le dépistage de masse y aiderait beaucoup avec le cas échéant, le confinement et le traitement des malades, et la poursuite de l’activité économique par ceux qui ne sont pas malades. Pour des pays pauvres comme le nôtre, un effondrement économique aurait des conséquences plus meurtrières que le Covid 19 et pourrait déstabiliser durablement nos Etats. Dans tous les cas, l’après-Covid 19 nous interpelle sur le sens de notre vivre individuel et collectif, sur la nécessité de refonder le contrat social, notamment par des critères d’allocation de nos ressources plus justes et plus conformes aux principes de solidarité qui doivent fonder la vie de toute Nation. Mais au-delà de notre Nation, le Covid 19 interpelle l’humanité entière sur le sens de l’homme, de l’univers, et lui fait prendre conscience de son destin commun et de ce que devront être par conséquent les nouvelles valeurs de la mondialisation.
Cheikh GUEYE
Expert fiscal
Inspecteur des impôts à la retraite
cheikhgueye28@yahoo.fr