Le président du Conseil d’administration du Musée des civilisations noires (Mcn), Abdou­laye Racine Senghor, a appelé au développement de la littérature. Il était un des panelistes de cette table ronde de l’Apcs et du groupe «Nous aimons lire» sur la critique littéraire. S’adressant aux maisons de presse, il estime que de manière générale, elles laissent très peu de place aux livres et à la lecture. «Je suis pour qu’on continue à assister les journalistes culturels, à leur donner les moyens pour qu’ils puissent vraiment constituer une équipe dynamique et que les rédactions leur accordent les meil­leures places dans les journaux, les meilleurs créneaux horaires à la radio et à la télé. Il nous faut une critique littéraire, une critique journalistique», a souligné Abdoulaye Racine, auteur et critique littéraire. Le critique littéraire, selon lui, aide à choisir et par conséquent à penser. «Chez nous comme ailleurs, il y a tellement de livres qui sortent qu’on a besoin quelquefois qu’on nous dise lequel choisir. Et on y va parce qu’on a confiance en celui qui l’a dit.» Pour marquer l’affirmation, Abdoulaye Racine Senghor prend comme exemple, les quelques jours qui ont précédé la proclamation du Prix Gon­court de Mouhamadou Mbougar Sarr. «Beaucoup d’articles sont sortis. Il y a ceux qui écrivaient pour massacrer l’œuvre et d’autres pour l’encenser», se souvient M. Senghor, estimant qu’un critique littéraire doit être honnête. Et pour être honnête, dit-il, celui qui est l’auteur de la critique doit être bien formé et savoir de quoi il parle. A l’en croire d’ailleurs, un critique littéraire qui écrit sur Mbougar Sarr, Prix Goncourt, et qui n’a pas lu «Le devoir de violence» de Yambo Ouologuem qui est le socle de ce roman de Mbougar Sarr, passerait sérieusement à côté. Il faut donc que le journaliste culturel ou n’importe quel critique littéraire ait une connaissance assez large de la littérature.

Une bibliothèque nationale au nom du Professeur Amady Aly Dieng
Dans le même ordre d’idées, Abdoulaye Diallo, directeur de L’Harmattan, croit qu’il faut commencer par chercher du côté de la presse. «L’un des pires obstacles se trouve au niveau du non-respect quelque part du cahier des charges des groupes de presse que signent tous les entrepreneurs de la presse qui demandent l’autorisation d’émettre. On constate très peu de présence de texte, de compte rendu de critique littéraire au niveau de la presse écrite», observe-t-il. Abdoulaye Diallo lance un appel pressant aux autorités pour l’érection d’une bibliothèque nationale au Sénégal. «Nous sommes en train de nous battre pour l’édification d’une bibliothèque nationale du Sénégal et que cette bibliothèque soit décernée au Professeur Amady Aly Dieng», explique M. Diallo. Revenant sur le contexte socio-culturel, il dira que parler de critique littéraire, ce n’est pas forcément dire qu’un livre est mauvais. Cependant, précise-t-il, la qualité de certains livres qui sont produits dans ce pays pose problème parfois au niveau des maisons d’édition. «Certains textes que nous recevons, je n’ai pas peur de le dire, ce sont des brouillons. Nous, à L’Harmattan Sénégal, tenez-vous bien, pour un livre que nous avons publié, nous en avons rejeté 3. Et les 3 que nous avons rejetés se retrouvent édités soit par autoédition, soit par d’autres maisons d’édition de la place. Il y a problème à ce niveau», déplore-t-il. Avant de poursuivre : «Nos jeunes auteurs lisent également très peu. Et on ne peut pas écrire de livre quand on ne lit pas.» Directeur de L’Harmattan, il appelle à une formation pour les maisons d’édition. «Pour qu’on puisse donner envie à des journalistes, des enseignants de lire nos livres, de critiquer, il faut que les écrivains écrivent de bons textes, qu’ils cessent de nous envoyer des brouillons. Et il faut que nous éditeurs également, prenions la peine d’apprendre notre métier. On ne devient pas éditeur parce qu’on est frustré de la manière dont son texte a été rejeté. L’édition est un métier tout aussi sérieux, voire plus sérieux que la médecine parce que, ce que nous mettons à disposition, c’est dans la tête des enfants que nous mettons cela.» Telle est la conviction de Abdoulaye Diallo qui plaide pour avoir une loi sur le livre.