Le gouvernement s’est enfin prononcé sur la recrudescence de l’émigration clandestine avec des centaines de morts. Accusé d’avoir raté sa politique d’emploi ayant conduit les jeunes désespérés à prendre les pirogues, les membres du gouvernement, qui étaient face à la presse hier, ont fait savoir que ce n’est pas la seule cause de ce phénomène.

Le gouvernement réfute les allégations selon lesquelles les jeunes font recours à l’émigration clandestine à cause de l’échec de sa politique d’emploi. Hier, lors de la première conférence de presse du gouvernement sur des questions d’actualité, la cause de la recrudescence de ce phénomène est revenue sur l’intervention des ministres concernés. Pour le ministre de l’Emploi et de la formation professionnelle, «la question de l’emploi n’est pas la seule cause». D’après Dame Diop, «les causes sont beaucoup plus profondes et multiformes». C’est aussi l’avis du ministre de l’Intérieur Antoine Diome qui soutient que «ce fléau n’est pas spécifiquement lié à une question d’emploi, mais c’est connu, l’homme a toujours senti le besoin de se déplacer». Lors de son intervention, le ministre de l’Emploi et de la formation professionnelle a mis l’accent sur les mesures qui ont été prises pour «améliorer le taux de qualification des jeunes sénégalais pour leur permettre d’accéder à l’emploi». Informant que de 37 mille 114 emplois formels répertoriés en 2012, on est passé en 2019 à 65 mille 064 emplois formels répertoriés compte non tenu des autres emplois, Dame Diop estime que «si seulement la question de l’emploi était la cause de l’émigration, on aurait moins de départs». Selon M. Diop, il faudra «sensibiliser», «communiquer» et «prendre des dispositions pour que nos jeunes comprennent qu’il est possible de rester dans ce pays, d’avoir une qualification d’exercer et vivre de son métier». Tout comme lui, le ministre de la Jeunesse a déclaré que des mécanismes ont été mis en place pour permettre aux jeunes d’avoir un emploi ou de les accompagner dans l’entreprenariat. Ainsi, renseigne Néné Fatoumata Tall, avec la Der «des financements» d’une valeur de «57,8 milliards de F Cfa» ont été octroyés aux jeunes. De même, révèle-t-elle, cela s’est traduit par des financements directs «pour 95 mille jeunes et des financements indirects pour 105 mille jeunes». «Notre politique de jeunesse a changé la vie de bien de jeunes au Sénégal», a-t-elle ajouté. Outre la Der, le ministre de la Jeunesse a aussi parlé des programmes déroulés par l’Anpej pour la lutte contre l’émigration irrégulière. A l’en croire, avec le programme «Réussir au Sénégal», c’est un montant de 6 milliards qui a été dégagé pour leur «renforcement de capacités dans le domaine de l’élevage, de l’agriculture et des Tic». Selon Mme Tall, il y a également un «appui à la formation professionnelle, des centres d’incubation», et cela, ajoute-t-elle, «a donné des résultats très positifs».
Par ailleurs, le ministre de la Jeunesse pense que sur la question de l’émigration clandestine «il faut une analyse très objective de la situation» parce que pour elle, il y a plusieurs facteurs à prendre en compte. Dans ses explications, elle a évoqué l’économie de notre pays qui «est en mode confinement depuis mars». A cela, elle ajoute «le fameux eldorado qu’on a vendu à la jeunesse africaine et la pression sociale». D’après elle, «les jeunes vivent une pression énorme dans les maisons, dans les quartiers». Relevant que la responsabilité est partagée, Mme Tall lance un appel : «Met­tre la pression sur les jeunes ne peut pas développer un pays.»
S’agissant des mesures sécuritaires prises pour lutter contre ce phénomène, le ministre de l’Intérieur a parlé «des actions préventives et répressives coordonnées par les forces de défense et de sécurité pour veiller à ce que nos jeunes ne prennent plus le chemin des océans». Interpellé sur la présence de la Guardia civile espagnole sur nos côtes, Antoine Diome a fait savoir que «cela n’est pas nouveau». «C’est depuis 2006 qu’un accord a été signé entre le Sénégal et le royaume d’Espagne à travers l’agence européenne Frontex. Cet accord prévoit des patrouilles conjointes tout au long de nos frontières maritimes ainsi que d’autres actions. Cela a été renouvelé à plusieurs reprises. C’est dans un cadre bien déterminé que toutes ces actions sont entreprises et régulièrement menées afin de venir à bout de ce fléau», a-t-il déclaré.