Les nouvelles données sur le nombre de personnes qui s’injectent des drogues sont plus élevées que les précédentes. C’est ce que révèle le dernier rapport de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc). Selon l’organisation, cette situation découle du fait que «les services de traitement et autres interventions sont insuffisants, y compris pour un nombre record de personnes déplacées en raison de crises humanitaires».Par Dieynaba KANE –

La consommation de drogues dans le monde ne cesse de croître. Les nouvelles données du rapport mondial sur les drogues 2023, publié aujourd’hui par l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc), montrent que «plus de 296 millions de personnes ont consommé des drogues en 2021, soit une augmentation de 23% par rapport à la décennie précédente». Le document renseigne également que «le nombre de personnes qui s’injectent des drogues en 2021 est estimé à 13, 2 millions, soit 18% de plus que les estimations précédentes». En même temps, il a été constaté que «le nombre de personnes souffrant de troubles liés à la consommation de drogues est monté en flèche pour atteindre 39, 5 millions, soit une augmentation de 45% en dix ans».

Les auteurs de ce rapport notent que «les jeunes restent le groupe le plus susceptible de faire usage de drogues». Ainsi, «en 2021, au niveau mondial, la prévalence annuelle de l’usage de cannabis chez les jeunes de 15 et 16 ans était de 5, 34%, contre 4, 3% chez les adultes». L’Onudc fait savoir dans son document que «la consommation de drogues est particulièrement nocive pour les jeunes». D’après les experts des Nations unies, «dans certaines régions, ceux-ci sont plus gravement touchés par les troubles liés à l’usage de substances». Prenant l’exemple de l’Afrique, ils soulignent que «70% des personnes traitées pour usage de drogues ont moins de 35 ans». Le rapport révèle également que «l’offre de traitement des troubles liés à l’usage de drogues est toujours loin de répondre à la demande, et des disparités persistent en matière d’accès». Dans le document, il est noté qu’«au niveau mondial, environ une personne sur cinq souffrant de troubles de cette nature a reçu un traitement en 2021, mais il existe de grandes disparités, tant entre les régions qu’en ce qui concerne le type et la qualité des traitements». De même, regrette l’Onudc, «les différentes formes de traitement ne respectent pas tous les droits humains et ne sont pas toutes fondées sur des données factuelles». S’agissant des inégalités, le rapport fait remarquer que «les femmes se heurtent à des obstacles dans l’accès aux services de traitement». «En 2021, 45% des personnes qui avaient fait usage de stimulants de type amphétamine au cours de l’année écoulée étaient des femmes, mais celles-ci ne représentaient que 27% des personnes bénéficiant d’un traitement», renseigne l’Onudc. Toujours concernant ces disparités, il a été constaté que «c’est en Asie et en Afrique que la part des femmes parmi les personnes traitées pour usage de drogues est la plus faible». Toutefois, d’une manière générale, «la demande de traitement des troubles liés à la drogue reste largement insatisfaite». Face à cette situation, les auteurs du document estiment que «la santé publique, la prévention et l’accès aux services de traitement doivent être prioritaires dans le monde entier, faute de quoi, les problèmes liés à la drogue feront de plus en plus de personnes délaissées».

«Menaces plus graves dans le contexte des conflits»
Dans ce même ordre, d’après l’Onudc, «si les nouvelles recherches sur l’utilisation de drogues contrôlées sont prometteuses, telles que les psychédéliques pour traiter les troubles mentaux et les troubles liés à l’utilisation de substances», le rapport met en garde contre le fait «que le rythme rapide des développements pourrait compromettre les efforts visant à adopter des politiques qui placent les préoccupations de santé publique au-dessus des intérêts commerciaux». Et de prévenir : «En l’absence de cadres bien conçus et ayant fait l’objet de recherches adéquates, l’accès aux traitements pourrait être insuffisant pour ceux qui en ont besoin ce qui pourrait inciter les patients à se tourner vers les marchés illégaux ou, à l’inverse, les psychédéliques pourraient être détournés à des fins non médicales.»

Financement de groupes dans le Sahel
En outre, les problèmes liés à la drogue font également «peser des menaces plus graves dans le contexte des conflits et des déplacements de population». Le rapport renseigne qu’au cours «du premier semestre de 2022, plus de 100 millions de personnes ont été déplacées de force dans le monde, ce qui constitue un record».

D’après cet organe des Nations unies, il est «devenu plus difficile de prévenir et de traiter les troubles liés à l’usage de drogues chez les personnes déplacées». Autre difficulté évoquée dans le rapport, «la possibilité qu’il y ait production et trafic de drogues favorise des cycles d’instabilité dans les zones touchées par des conflits». D’ailleurs, selon les auteurs du rapport, «le conflit armé qui est en cours en Ukraine a entraîné un déplacement des itinéraires de trafic d’héroïne et de cocaïne». Pire, avertit l’organisation, «l’on voit poindre la menace d’une augmentation de la fabrication et du trafic de drogues synthétiques». Quid de la situation au Sahel ? Dans cette partie du continent, le rapport révèle que «le commerce illicite de drogues finance les groupes insurgés et les groupes armés non étatiques, qui prélèvent des «impôts en échange d’une protection».
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