La Cour des comptes relève, dans son rapport sur l’exécution de la loi des finances 2018, une forte hausse du service de la dette publique extérieure, liée aux émissions d’Eurobond dont le service est 221,7 milliards de francs Cfa, soit 52,58% du total du service de la dette publique extérieure.Par Dialigué FAYE

– «L’évolution du service de la dette extérieure est marquée par une hausse continue de 2014 à 2018, passant de 159,79 milliards à 421,64 milliards de francs Cfa, soit une évolution de 163,87%. La forte hausse s’explique, entre autres, par les émissions d’Eurobond dont le service est 221,7 milliards de francs Cfa, soit 52,58% du total du service de la dette publique extérieure», note la Cour des comptes dans son rapport sur l’exécution de la loi des finances 2018.

Au cours de cette période sous revue, précise l’institution supérieure de contrôle, «le service de la dette publique extérieure avant allégement dans le cadre du Ppte/Iadm (Pays pauvres très endet­tés/Ini­tiative d’allègement de la dette multilatérale) s’élève à 421,64 milliards de francs Cfa. Il se répartit entre la dette multilatérale pour 63,95 milliards de francs Cfa, la dette bilatérale pour 78,21 milliards de francs Cfa, les crédits exports pour 7,55 milliards et les dettes commerciales pour 271,93 milliards de francs Cfa».

Pour la gestion 2018, ajoute la Cour, «le Sénégal a bénéficié de réductions de la dette pour un montant d’1,55 mil­liard de francs Cfa au titre de l’Initiative sur l’allégement de la dette multilatérale. Les ordonnancements du service de la dette publique extérieure de la gestion 2018 s’élèvent à 421,64 milliards de F Cfa contre 283,81 milliards de francs Cfa en 2017, soit une hausse de 137,83 milliards de francs Cfa. Le taux de réalisation est de 97,90% en 2018 contre 107,90% en 2017».

Aussi, mentionne le rapport, «les remboursements au titre de la dette commerciale occupent la proportion la plus importante avec 64,49%, alors que ceux portant sur les crédits bilatéraux et les crédits multilatéraux représentent respectivement 18,55% et 15,17%. Les remboursements relatifs aux crédits à l’exportation ne représentent que 1,79%.

La Cour relève que pour «l’Eurobond, le montant du principal de 110,11 milliards de francs Cfa est en deçà de celui des intérêts et commissions qui est de 111,59 milliards de francs Cfa».

Le ministère des Finances et du budget, cité dans le document, explique cette situation «par le rachat de 40% de l’Eurobond 2021 (émis en 2011), soit un nominal de 200 millions Usd, afin de réduire le risque de refinancement de la dette publique en 2021». Il ajoute que «l’amortissement (paiement principal) intervient, en règle générale, à l’échéance finale, même si sur certains titres, l’amortissement se fait durant les trois dernières années pour lisser les paiements. Par contre, les coupons (intérêts) sont payés régulièrement suivant la périodicité semestrielle».

Hausse irrégulière du service de la dette intérieure
Cette tendance haussière a été également notée au niveau du service de la dette publique intérieure. Son évolution, d’après les vérificateurs de la Cour des comptes, «est marquée par une hausse continue de 2014 à 2016, passant de 260, 57 milliards de francs Cfa à 562,14 milliards, avant de connaître un recul en 2017 avec 456,71 milliards de francs Cfa. En 2018, une légère reprise est notée comparativement à la gestion de 2017, avec un taux d’évolution de 0,62%».

Dépassements de crédits de 38,18 milliards
Des dépassements de crédits sont constatés dans l’exécution de la loi des finances 2018. Pour cette période sous revue, mentionne la Cour des comptes, «les crédits évaluatifs sont ordonnancés à 463,60 milliards de francs Cfa pour des prévisions définitives de 425,42 milliards de francs Cfa, soit un dépassement de 38,18 milliards de francs Cfa».

Ce dépassement, indiquent les contrôleurs, «se répartit entre les pouvoirs publics (présidence de la République, Cons­titutionnel) pour 0,95 milliard représentant 2,50% du total, les ministères pour 22,82 milliards de francs Cfa, soit 59,77%, et les charges non réparties pour 14,41 milliards équivalent à 37,73%.

La présidence de la Répu­blique pour les pouvoirs publics, le ministère de l’Edu­cation nationale et le ministère de la Formation professionnelle, de l’apprentissage et de l’artisanat pour les ministères connaissent les dépassements les plus importants, avec res­pectivement 896 millions 382 mille 45 francs Cfa, 19 mil­liards 680 millions 564 mille 774 francs et 1 milliard 960 millions 47 mille 757 francs Cfa, soit des parts de 2,35%, 51,54% et 5,13%».
Relativement à cette situation, la Cour avait indiqué, dans son rapport sur l’exécution de la loi des finances 2016, que du point de vue de la régularité budgétaire, «les dépassements de crédits évaluatifs ne posent pas de problème parce que prévus par la loi n°2011-15 du 8 juillet 2011 portant loi organique relative aux lois de finances et autorisés par la loi n°2015-23 du 18 décembre 2015 portant loi de finances pour 2016 qui permettent que les dépenses auxquelles s’appliquent les crédits évaluatifs, s’imputent au besoin au-delà de la dotation inscrite aux chapitres qui les concernent. Autrement dit, les dépenses excédant les montants des crédits évaluatifs ouverts ne sont pas irrégulières».
Toutefois, relèvent les collaborateurs de Mamadou Faye, président de la Cour, «avec des dépassements à hauteur de 19,11 milliards de francs Cfa pour le ministère de l’Education nationale, il se pose un problème de sincérité des prévisions budgétaires».

Aussi, la Cour avait-elle recommandé au ministre des Finances de veiller à la sincérité des prévisions pour les crédits évaluatifs, afin de limiter l’ampleur des dépassements. Cette recommandation est restée sans suite en 2018.
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