Rapport – Education civique comme discipline obligatoire, usage de l’Ia, Fonds national endogène d’investissement éducatif… La Cosydep veut des réformes structurantes pour l’école

Dans un rapport publié hier, la Cosydep a insisté sur certaines réformes structurantes au niveau de l’école, comme la promotion de l’éducation civique, qui deviendrait une discipline obligatoire, et la mise en place d’un Fonds national endogène d’investissement éducatif. Sans oublier l’usage encadré de l’Intelligence artificielle. Par Dieynaba KANE(dkane@lequotidien.sn) –
Dans un rapport, la Cosydep a proposé des réformes structurantes pour l’école. Cette organisation de la Société civile soutient que «l’analyse croisée des contributions citoyennes, panels thématiques, missions régionales et guides d’entretien révèle un consensus fort autour de cinq leviers stratégiques pour opérer une transformation systémique du système éducatif sénégalais». Ces leviers, font savoir les auteurs du rapport, «devraient être au cœur du programme de réforme à initier dès les grandes vacances 2025». Ils conseillent également de «renforcer une gouvernance éducative participative et décentralisée, d’institutionnaliser la redevabilité éducative citoyenne : mise en place d’observatoires locaux de la qualité de l’éducation (ex. Cosydep Thiès), tableaux de bord participatifs, conventions avec collectivités territoriales, renforcer les pouvoirs des Ia et Ief en matière d’allocation budgétaire, de suivi pédagogique et de recrutement adapté».
La Cosydep, à travers la contribution citoyenne qui a permis l’élaboration de ce document, recommande d’impliquer «systématiquement les communautés (familles, Ape, associations locales) dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des projets éducatifs».
Dans la même veine, il est encore souhaité de «refondre les curricula dans une perspective humaniste, inclusive et contextualisée ; de lancer un processus de réforme curriculaire concertée, centré sur les compétences de vie, les valeurs citoyennes, la paix, l’équité de genre, les transitions écologique et numérique ; de valoriser les langues nationales et les savoirs endogènes, notamment dans les premières années du cycle fondamental». Concernant le financement de l’éducation, il est conseillé d’élargir «et assainir les mécanismes, de créer un Fonds national endogène pour l’éducation, financé par : la fiscalité extractive (or, gaz, pétrole), la Responsabilité sociétale des entreprises (Rse), les contributions volontaires des collectivités territoriales». Les membres de la Cosydep estiment qu’il faut «revoir la structure budgétaire actuelle, en réduisant les déséquilibres entre fonctionnement et investissement ; encourager la budgétisation participative locale pour identifier les priorités réelles (ex. abris provisoires, hygiène scolaire, équipement numérique) ; réintégrer pleinement la citoyenneté, la résilience et l’éthique dans l’éducation». Accordant une importance particulière à la question de la citoyenneté, la Cosydep conseille de «rétablir une éducation civique obligatoire avec coefficient dans toutes les filières dès 2025, développer un programme national «Vacances citoyennes éducatives» alliant formations pratiques (secourisme, histoire locale, gouvernance) et engagement communautaire». Autre point évoqué dans le document, c’est la nécessité d’encadrer «l’usage de l’Intelligence artificielle dans l’éducation pour éviter toute déshumanisation du lien éducatif».
Concernant le cadre et l’environnement des établissements scolaires, les auteurs du rapport recommandent «d’accélérer la stratégie de mise à niveau des infrastructures et équipements scolaires, le cadre normatif et l’environnement des apprentissages». Ainsi, la lancinante question de la résorption des abris provisoires, la réhabilitation des infrastructures vétustes et
l’élargissement de la carte scolaire, pour garantir un meilleur cadre d’apprentissage, est aussi revenue dans les recommandations.
Dans la même dynamique, il est conseillé d’améliorer «l’offre publique d’éducation en la rendant plus attractive, accessible, performante et moins coûteuse, à travers des infrastructures viables et des équipements adéquats». De ce fait, il est demandé d’assurer «un environnement scolaire sécurisé, en prenant les mesures nécessaires pour lutter contre : la cantinisation, le harcèlement, les mariages précoces, le travail des enfants, la consommation de drogues, ainsi que toutes les formes de violence en milieu scolaire». Selon cette organisation de la Société civile, le cadre normatif doit être amélioré «à travers une loi d’orientation de l’éducation et de la formation actualisée, l’adoption d’un code de l’enfant, le renforcement du dispositif juridique et réglementaire pour des stratégies de prise en charge responsable de l’Ia et du numérique».
En outre, la Cosydep relève que «la transformation éducative attendue ne peut se réduire à des ajustements techniques». Elle appelle, d’après l’organisation, «une réinvention du pacte éducatif sénégalais, dans une logique de co-construction, de souveraineté budgétaire et de résilience face aux crises». «Les perspectives ici formulées, issues d’une intelligence collective rigoureuse, traduisent la volonté citoyenne de contribuer à bâtir un modèle éducatif sénégalais durable, inclusif et porteur de sens», souligne le rapport. Dans le document, il est précisé que «le présent processus participatif, porté par une diversité d’acteurs citoyens, techniques et communautaires, a révélé une attente forte : l’éducation ne peut plus être pensée, ni pilotée de manière centralisée et déconnectée des réalités sociales». «Face aux crises multiformes -climatiques, éthiques, économiques-, il devient impératif que les autorités étatiques et les partenaires techniques et financiers fassent de cette intelligence collective une boussole pour guider les réformes», font savoir les auteurs. Pour eux, ce document «est un appel ouvert à transformer les discours en politiques publiques, les consultations en décisions co-construites, et les promesses en garanties concrètes pour chaque enfant, chaque enseignant, chaque territoire».
dkane@lequotidien.sn