Rapport prospectif : Deux visions contrastées pour l’agriculture à l’horizon 2050

Un nouveau rapport prospectif, co-publié par le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), l’Institut sénégalais de recherches agricoles (Isra) et l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (Fao), présente deux scénarios d’évolution pour l’agriculture sénégalaise d’ici 2050 : un modèle agro-écologique et un modèle agro-industriel, selon Apanews.
L’agriculture sénégalaise se trouve à la croisée des chemins face à trois défis majeurs qui détermineront son avenir. Le pays doit d’abord assurer une alimentation suffisante, saine, diversifiée, nutritive et accessible à tous les membres d’une population qui doublera d’ici trente ans.
Parallèlement, le secteur agricole doit fournir un travail et un revenu attractifs aux jeunes générations qui se retrouvent déjà aujourd’hui souvent sans emploi. Aussi, cette transformation doit se faire en préservant les écosystèmes et en s’adaptant aux changements climatiques pour ne pas mettre en danger les capacités productives à long terme.
Intitulée «AgroEco2050-Sénégal», cette recherche est une prospective participative qui cherche à préciser les défis de l’agriculture sénégalaise à l’horizon 2050 en combinant les savoirs d’un groupe d’experts et un modèle biophysique et économique, Agribiom, expliquent Rémi Prudhomme, Marc Piraux et Bruno Dorin du Cirad, auteurs du rapport.
Cette étude prospective distingue deux voies d’évolution radicalement différentes. D’un côté, le scénario agro-écologique mise sur une approche extensive mobilisant davantage de main-d’œuvre et de terres restaurées.
«La principale différence entre ces scénarios est la mobilisation, dans le scénario agro-écologique, d’une plus grande force de travail, des processus écologiques permettant de réduire les intrants industriels, et de plus de terres en restaurant notamment des terres dégradées», précise Cheikh Sadibou Fall, chercheur à l’Isra et co-auteur du rapport.
A l’opposé, le scénario agro-industriel privilégie l’intensification par les intrants chimiques et la mécanisation. Cette approche permet d’atteindre des rendements plus importants sur des exploitations de plus grande taille, mais ces gains de productivité bénéficient à un nombre plus restreint d’agriculteurs.
Malgré leurs différences fondamentales, les deux scénarios convergent sur un point essentiel : l’augmentation nécessaire des revenus agricoles. Cette amélioration constitue, selon les experts, une condition sine qua non pour rendre l’agriculture viable et attractive pour les jeunes générations.
L’impact de cette réflexion prospective dépasse le cadre académique. «Dans l’immédiat, ces travaux informeront l’élaboration d’une nouvelle stratégie nationale pour l’agro-écologie et l’agriculture biologique au Sénégal, initiée par le gouvernement du Sénégal avec la participation des acteurs», précise Anne-Sophie Poisot du Bureau de l’innovation de la Fao.
Cette initiative s’inscrit dans un projet mondial lancé par la Fao en 2022, soutenu financièrement par l’Allemagne, qui vise à renforcer le rôle des processus de prospective pour soutenir les transformations des systèmes alimentaires par l’agro-écologie.
Une vingtaine d’experts issus du monde agricole, de la recherche, des ministères, du secteur privé et de la Société civile ont participé à cette démarche.