Le Centre d’études de politiques pour le développement (Cepod) a rendu public hier le Rapport national sur la compétitivité du Sénégal (Rncs) 2024 provisoire. Lequel souligne l’urgence de réformes ambitieuses pour renforcer la compétitivité et atteindre les Objectifs de développement durable (Odd).

Par Dialigué FAYE – Le Sénégal, même s’il a fait quelques avancées notoires, a encore un certain nombre de défis à relever pour renforcer sa compétitivité, selon le Rapport national sur la compétitivité du Sénégal 2024 provisoire du Centre d’études de politiques pour le développement (Cepod) rendu public hier. «L’économie sénégalaise a connu une croissance dynamique depuis 2016, malgré un frein marqué par le Covid-19, ramenant le taux à 1, 3% en 2020 (un des rares taux positifs mondiaux). Cepen­dant, le cadre macroéconomique est caractérisé par un endettement croissant, au-dessus de la norme communautaire, et une faible croissance de la richesse par habitant, passant de 1282 Usd en 2016 à 1476 Usd en 2023», relève Dr Abdoulaye Dièye, expert au Cepod, qui présentait les résultats du Rncs 2024.

Concernant les entreprises, souligne Dr Dièye, «seulement 3% opèrent dans le secteur formel. Ces entreprises modernes ont vu leur chiffre d’affaires augmenter de 78, 8% entre 2016 et 2022, atteignant 20 135 milliards Usd. Leur contribution au développement s’est accrue, comme l’atteste l’évolution des effectifs (338 125 employés au premier trimestre 2024) et des paiements d’impôts. Toutefois, l’indice de compétitivité industrielle de l’Onudi a décliné, plaçant le pays au 102ème rang en 2022.

Sur le plan social, des efforts sont notés suivant l’objectif de lutte contre la pauvreté : le taux de pauvreté a légèrement baissé de 37, 8% en 2019 à 37, 5% en 2022, tout comme les inégalités de revenus, de 35, 1% à 33, 4 %. Néanmoins, les inégalités de genre restent élevées selon plusieurs indicateurs internationaux, même si le leadership politique du Sénégal pro-genre est jugé remarquable. Le pays est classé 122e en 2023 suivant l’indice de progrès social et dans la catégorie à faible indice selon l’indice de développement humain. Le taux d’emploi est de 48, 79% en 2023, et le taux de chômage s’élevait à 23, 6% en 2021».

Des progrès sont observés sur d’autres Objectifs de développement durable (Odd). A preuve, renseigne le Rncs 2024, «la malnutrition est passée de 8, 5% à 4, 6 %, l’accès à l’eau de 79, 10% à 86, 25% et l’accès à l’électricité de 64, 6% à 67, 9%. Malgré divers programmes sociaux, la couverture sociale reste faible (19, 9 % en 2022). Enfin, les performances environnementales ont connu une dégradation entre 2016 et 2020, mais affichent une nette reprise : le Sénégal est passé du 155ème rang en 2020 au 100ème rang en 2024 sur 180 pays. Des efforts importants seront faits pour l’atténuation du changement climatique, la gestion des déchets et la pollution de l’air».

Sur le cadre institutionnel et le climat d’investissement, des défis majeurs persistent pour l’environnement fiscal et les coûts et délais des procédures d’affaires. Relativement au capital humain, des efforts importants restent aussi à faire. «Les classements internationaux sont défavorables : le Sénégal est au 138ème rang sur 173 selon l’indice de la Banque mondiale, avec un score 0, 42 en 2023, et au 112ème sur 134 (Indice mondial de compétitivité des ta­lents, score 28, 62). Ces performances s’expliquent par un faible taux d’alphabétisation de 57, 7% en 2022, une éducation non universelle avec un Taux brut de scolarisation (Tbs) primaire de 82, 6% en 2023, et une qualité des services de santé faible. L’in­vestissement public reste problématique, malgré des progrès en infrastructures routières, aéroportuaires et ferroviaires. L’augmentation de l’investissement privé est un signal positif, mais l’efficacité globale de l’investissement reste perfectible.»

Fort de cette analyse lucide, le Secrétaire général du ministère de l’Economie, du plan et de la coopération assure que le gouvernement ne ménagera aucun effort pour mettre en œuvre des actions coordonnées, concertées, pertinentes et efficaces pour une transformation systémique de notre pays. Mais, précise Mou­hamadou Bamba Diop, il incombe à tous les acteurs économiques (gouvernement, partenaires privés, Société civile, institutions académiques) d’instaurer une veille stratégique permanente sur les déterminants de la compétitivité, afin d’accroître durablement notre richesse et de lutter efficacement contre la pauvreté et les inégalités. Pour lui, il ne s’agit plus d’adopter des réformes isolées, mais de repenser en profondeur notre mo­dèle de développement, pour bâtir une économie compétitive, diversifiée et résiliente.
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