C’est une nouvelle façon de faire de la diplomatie. Londres a demandé à Paris d’accueillir les migrants non désirés par le Royaume uni, qui transitent par Calais, en publiant la lettre sur Twitter. Paris dénonce des «méthodes pas sérieuses» et annule l’invitation faite à la ministre de l’Intérieur britannique pour la réunion, à Calais, de ses collègues de l’Ue. Une crise qui indispose migrants et pêcheurs français. Par Malick GAYE –

Ce n’est un secret pour personne : à la veille d’élections, on ne négocie pas avec des diplomates, à moins de vouloir en sortir perdant. C’est la même logique que Paris et Londres ont adopté, en ce qui concerne la crise de la Manche. En effet, Londres, n’étant plus membre de l’Union européenne, n’entend pas faciliter la gestion des immigrés irréguliers en transit à Calais pour rejoindre le Royaume uni, en même temps, Paris campe sur ses positions. Et pour ne rien arranger, la colère des pêcheurs français vient jeter de l’huile sur le feu, sur une relation diplomatique qui ne cesse d’être tendue.
Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, dans son intention de faire bonne impression devant l’opinion britannique, a affirmé avoir envoyé une lettre au Président français, Emmanuel Macron, qu’il a publiée  sur Twitter, pour demander à la France de reprendre les immigrés qui arrivent dans le Royaume, en passant par Calais. Une «surprise» face à des méthodes qui «ne sont pas sérieuses», a dénoncé Emmanuel Macron. Qui a aussi l’intention de faire bonne figure auprès des Français, appelés aux urnes en 2022 pour l’élection présidentielle. Macron a décidé d’annuler hier matin, l’invitation faite à la ministre de l’Intérieur britannique, Priti Patel, de venir à la réunion de Calais, demain dimanche, aux côtés des ministres de l’Intérieur de l’Union européenne.
Des positions extrêmes qui risquent de perdre les migrants et les pêcheurs. En effet, avec ces positions radicales, il n’est point nécessaire d’être un expert en relation internationale, pour savoir que seuls les migrants et les pêcheurs vont sortir perdants de cette situation.
Mercredi dernier, un drame est survenu sur la Manche. 27 migrants y sont décédés mercredi, dans le naufrage de leur embarcation, au large de Calais. Ce drame est le plus meurtrier depuis l’envolée, en 2018, des traversées migratoires de la Manche, face au verrouillage croissant du port de Calais et du tunnel emprunté jusque-là par les migrants, tentant de rallier l’Angleterre. Avant ce naufrage, le bilan des décès, depuis le début de l’année, s’élevait à trois morts et quatre disparus. En 2020, six personnes avaient trouvé la mort et trois autres avaient été portées disparues. Quatre décès avaient été recensés en 2019.
Ce vendredi matin, des ferries et embarcations britanniques ont été empêchés, par des pêcheurs français, d’accoster au port de Calais. Ces derniers protestaient contre la lenteur des négociations de sortie de l’Ue, qui bloque les licences de pêches de 150 pêcheurs français.
Au regard de cette situation, aucune des parties n’a intérêt à s’éterniser là-dessus. Mais avec l’approche d’élections, les dirigeants ne semblent pas être dans les meilleures disposions pour trouver la bonne solution pour tout le monde. En attendant, le monde va continuer à compter les morts sur la Manche, les Français vont s’asseoir sur leurs licences de pêches et les Britanniques, rêver toujours du fameux Marché unique. Ainsi va le monde, désormais !
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