Hugues Diaz, directeur de la Cinématographie du Sénégal : «Il ne faut pas que le commercial prenne le dessus sur le culturel»
C’est une thématique à problèmes. Il ne faut pas qu’on pense tout le temps à l’aspect commercial du produit culturel. Ce dernier est d’abord porteur de valeurs, d’identités. A travers les propos de Bernard Azria se dégage l’aspect commercial qui tue l’identité du créateur. La liberté du créateur est aussi vaste qu’on peut la restreindre. Quelqu’un qui prend l’initiative de créer doit apporter un plus. Je m’interroge sur l’universel. Qu’est-ce que l’universel, sinon une somme d’identités. Si faire l’universel équivaut à faire comme les Américains, je ne suis pas d’accord. Je suis un Africain et je tiens à protéger mes identités culturelles. Quand on fait un film, c’est vrai que c’est pour qu’il plaise au public, mais ce qu’il faut faire pour qu’un film plaise au public, ça ne s’impose pas de soi. Le produit culturel n’est pas un produit commercial de première nécessité. Il faut toute une médiation, une communication, une éducation, une participation pour qu’un public aime un produit culturel. Un produit culturel informe, éduque et divertit.
Nare Nadège Delwende, réalisatrice Burkinabè : «Nous ne sommes pas obligés d’écarter la culture»
En tant que jeune réalisatrice, nous sommes dans un dilemme : faire des films d’auteur ou des films commerciaux. Moi si je fais du cinéma, c’est parce que je pense qu’il y a beaucoup de choses à raconter entre les mythes, traditions,… En Afrique, on est envahi de partout par des images qui nous viennent de l’extérieur. Même pour les enfants. A la télé il y a plein de dessins, mais ils nous viennent de l’extérieur. Etant enfant, le seul dessin animé africain que je voyais, c’était Samba et… Ce serait bien qu’on puisse avoir des images de chez nous. Avec Novelas Tv que les femmes et certains hommes passent leur temps à regarder, on perd énormément de temps. J’ai l’impression que c’est abrutissant, et je trouve que les gens sont scotchés à 100% sur ces films. Sommes-nous obligés de faire ce genre de films pour être vus et regardés ? C’est important de raconter des histoires africaines et qui touchent l’universel. C’est à nous jeunes réalisateurs de réinventer le cinéma en Afrique. Nous ne sommes pas obligés d’écarter la culture.
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