Le tandem de l’Exécutif lance, vendredi, son Plan de redressement économique et social ou Jubanti Kom, pour faire face à une «situation héritée». Il y a 29 ans, le Sénégal avait aussi lancé, sous Abdou Diouf, le Plan d’urgence de redressement de la situation des finances publiques, appelé Plan Sakho-Loum, constitué de mesures d’austérité comme la réduction des salaires des fonctionnaires. Avec comme conséquence, pour Diouf, la perte du pouvoir. 

 

Par Bocar SAKHO – Vendredi, Diomaye et Sonko vont lancer le Plan de redressement national pour faire face «à la situation économique héritée». C’est le temps du «choix de l’action et des solutions» pour remettre sur le chemin de la relance et de la prospérité un «pays en ruines». C’est dans un «Live» fait le 1er juillet que le Premier ministre avait annoncé qu’un plan allait être partagé sous peu pour endiguer la crise économique.

Ouattara candidat à un 4ème mandat : «Le devoir transcende la parole donnée»

Aujourd’hui, le Plan de redressement national sera-t-il un complément de l’Agenda national de transformation Sénégal 2050, des politiques publiques ? Et va-t-il précéder les phases d’impulsion 2025-2034 et d’accélération 2025-2050 ? Comment activer la relance des activités économiques, la réduction de la dette, entre autres, avec un pays dont les notes souveraines ont été dégradées par les différentes agences de notation ? Cela fait craindre la mise en place d’une cure d’austérité, surtout après l’annonce de la banque britannique Barclays, qui avait réévalué la dette publique du pays à 119% du Pib pour 2024. Il y a plusieurs mois, le Premier ministre avait annoncé la fusion de plusieurs directions et/ou agences, la réduction du train de vie de l’Etat, dans un contexte où les relations avec le Fonds monétaire international sont toujours glaciales. Le Fmi, qui est en train d’étudier le rapport du Cabinet Mazars, enverra à Dakar, à la fin du mois d’août, une nouvelle mission qui pourrait fonder un nouveau cadre de partenariat après les révélations de falsification des comptes publics dont une dette cachée de plus 5 mille milliards de F Cfa.

Austérité et tension économique

La même institution de Bretton Woods avait refusé de soutenir le Plan Sakho-Loum (Ndlr : 1993-1995, anciens ministres de l’Economie et des finances et aussi du Budget), qui fut aussi un plan d’urgence de redressement de la situation des finances publiques pour le financement par emprunts obligataires et la réduction drastique des dépenses publiques. Dans le cadre des plans d’ajustement structurel, le Fmi avait appuyé le pays avec la Facilité d’ajustement structurel renforcée (Fasr) sur la période 1994-1998. Elle sera suivie d’un second arrangement sur la période 1998-2000, puis la Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (Frpc) entre 2000 et 2002. Avec les mesures prises à l’époque, comme la réduction des salaires des fonctionnaires de 15%, le prélèvement d’une journée de salaire par mois dans le privé, la généralisation de la Tva et la suppression des exonérations douanières. A l’époque, les syndicats, excédés par ces mesures, râlent, avant que ne frappe les ménages, comme un tsunami, le 12 janvier 1994, la dévaluation du franc Cfa.

Grève des greffiers : LA JUSTICE EN ÉTAT DE CHOC

La monnaie commune perd 50% de sa valeur, provoquant une hausse de presque 25% des prix des denrées, alors que l’inflation frôle les 30%. Avec le Plan Diomaye-Sonko, à la tête d’un pays où l’impatience est latente et s’ajoute à l’attente de la concrétisation des promesses électorales mirobolantes, c’est le temps de «l’action et des solutions». A quel coût ? Comme il y a près de 30 ans déjà, les priorités pour les populations n’ont pas changé, elles se sont même accrues. La jeunesse est toujours sevrée d’emplois décents, tandis que le système éducatif, depuis Diouf, et malgré les efforts accomplis par Wade et Macky Sall, s’est encore plus dégradé. Et le ministre de l’Enseignement supérieur du tandem «Sonko mooy Diomaye», comme un parent découragé, se plaint des énormes montants consacrés aux étudiants. Oubliant qu’il avait été accueilli en messie lors de sa nomination dans ce secteur.

Indemnité de logement dans l’Administration : 16 MILLE AGENTS ATTENDENT À LA PORTE

S’ils avaient trouvé un pays souffrant à leur arrivée, les nouveaux dirigeants l’ont aujourd’hui rendu exsangue. Le Plan de relance de ce vendredi est leur dernière cartouche. Il leur faudra faire mieux que leurs prédécesseurs. Car, comme Sakho et Loum, ce qui sera difficile pour eux à retrouver, ce ne sont pas seulement des finances pour relancer la machine. La chose qu’ils ont le plus dilapidé à ce jour, c’est la confiance de leurs compatriotes, sans laquelle aucune relance ne sera possible à moyen terme. En 2000, Abdou Diouf, qui assurait que «nos fruits sont mûrs», n’avait pu obtenir un nouveau mandat. «Diomaye mooy Sonko» fera-t-il mieux ?
bsakho@lequotidien.sn