Les relations entre l’Europe et l’Afrique sur la libre circulation des personnes est à repenser pour restaurer la dignité des Africains. «C’est la faute aux dirigeants africains qui sont complexés devant les Occidentaux. S’il y avait une libre circulation, ils n’allaient pas rester en Europe dans la galère. Avant de signer des accords, les chefs d’Etat africains doivent prendre le temps de bien regarder et ne pas signer à l’aveuglette», note Thierno Dia. Toujours dans ses explications, M. Dia précise : «Les conditions sont tellement difficiles que même pour obtenir un rendez-vous au Sénégal par exemple, on peut rester 6 mois. Les conditions difficiles d’obtention de visa font que lorsque les personnes viennent, elles ne veulent plus repartir et préfèrent rester pour tenter leur chance. Les présidents africains doivent prendre leur courage à deux mains, dire carrément à leurs homologues européens stop, ça suffit.»
Les citoyens européens se déplacent facilement en Afrique. Il faut appliquer la réciprocité, dit-il. Alberto Isifin Tchama insiste : «Les dirigeants ne doivent pas accepter de recevoir de l’argent de l’Europe en contrepartie du rapatriement de leurs compatriotes. On ne peut pas dire que ce sont des présidents des années 60 qui sont en Afrique. Pour la plupart, ce sont des présidents nés après les indépendances, qui doivent avoir un nouveau logiciel de gouvernance et de coopération faisant valoir les intérêts de l’Afrique avant toute chose et refuser de traiter les Africains à l’étranger comme des bandits.» «Un jeune Belge, avec son passeport, il peut voyager dans plus de 160 pays dans le monde sans visa, contrairement au jeune Africain. Ensuite, on n’a pas un avenir dans nos propres pays. La situation dans laquelle se trouve l’Afrique est de la responsabilité des dirigeants africains», ajoute Mamadou Taslim, qui parle d’un système à la fois de domination et d’exploitation mis en place depuis des siècles.
«C’est difficile de dire aux jeunes que l’Europe n’est pas l’eldorado»
Les membres du collectif de la Voix des sans-papiers de Bruxelles ne sont pas insensibles au drame de l’émigration irrégulière, avec les chavirements de pirogues dans l’Océan atlantique. «C’est difficile de dire aux jeunes que l’Europe n’est pas l’eldorado. Ils vont te demander pourquoi tu es resté en Europe si tu étais convaincu du contraire. Personnellement, je fais face à cette situation puisqu’on me le rétorque souvent dans mes échanges avec les amis sénégalais restés au pays. Quoique j’essaie de les convaincre avec mes arguments que si je savais, je n’allais pas rester ici», déclare Thierno Dia, qui était transitaire au Sénégal avant de venir à Bruxelles. Et d’expliquer : «Je suis venu avec un visa à Bruxelles. J’ai regrette d’être resté. C’est une déception totale que j’aie eue.» Il poursuit sa narration : «Mes frères me demandent de rentrer au pays mais avec ce qui se passe au niveau de la Vsp, il y a une autre motivation qui fait que je reste pour sensibiliser mes frères et sœurs sénégalais, voire africains. On ne leur dit pas toute la vérité. Il faut au moins 10 ans ou plus pour avoir des papiers. Sans les papiers, c’est une vie de galère.»